Par Bernard Gouttenoire
Quand Guy Goffette fait le portrait de Marthe Bonnard (1), il en fait non seulement, l’égérie du peintre « nabi japonard », mais aussi une femme qui a, toute la vie du peintre, été celle, qui -se plaignant d’un mauvais état de santé- l’obligeait à une attention particulièrement constante… Il est des couples improbables, qui se sont aimés -dur comme fer- tout comme chez nous, les très fusionnels Jacky et Jean Fusaro…
Alors que Jacky-Cécile fait ses premiers pas, le jeune peintre Jean Fusaro vit entre Lyon et à Paris -avec ses amis les Sanzistes (Paul Philibert–Charrin, André Cottavoz, Jacques Truphémus et les autres Pierre Doye, Françoise Juvin et Pierre Coquet, Paul Clair, Micheline Flory, Bravard, Sanner, Mouriquand, Mélinand, James Bansac…) – prêt à affronter la carrière de peintre international qu’on lui reconnaitra.
Jacky-Cécile, née Melamed, se marie une première fois avec Monsieur Zysman, et donne naissance à Thierry, qui fera carrière comme photographe spécialisé dans les fonds marins, à Tahiti. Puis, divorcée, elle est un temps, styliste et ouvre un atelier sous le nom de « Jackymel ». Elle fréquente les bonnes maisons, notamment le styliste de la rue Sergent Blandan, Daniel Bill mais aussi Clémentine et le regretté Max Chaoul, avant que de devenir la directrice de la célèbre maison de prêt à porter Moreteau (à la Part-Dieu).
Poste qu’elle abandonne pour se consacrer exclusivement à la carrière de son second époux le peintre Jean Fusaro, qui expose à Lyon chez Denise Mermillon (galerie Saint-Georges) et aussi à Paris, Galerie Art Vivant, puis à la galerie Taménaga (ce qui lui ouvre la porte du Japon, à Osaka et à Tokyo, depuis les beaux quartiers de la capitale, avenue Matignon).
Sa nouvelle vie avec Jean Fusaro à partir de 1967
De son côté, Jean Fusaro, né à Marseille en 1925, a vécu à Sète au Mont Saint-Clair. Avec sa première épouse Hélène, ils habitent à Oullins en compagnie de leurs trois enfants, deux garçons, aujourd’hui disparus, récemment Dominique (à Sète) et Jean-Baptiste (en 1991 dans un terrible accident sous le tunnel de la Croix-Rousse) et Eve. Après le divorce de Jean, le nouveau couple réside à la Maisonnée, à Fontaines Saint-Martin.
En 1988, Jackie Fusaro fait appel à l’écrivain Jean Carrière pour se lancer dans l’édition du premier grand livre à Lyon, sorti sur un peintre vivant contemporain. Elle fait appel à BG pour concocter six pages successives sur le thème, cher au peintre, de la délectation. Cela débouchera sur le beau projet du chargé de mission avec la pharaonique décoration murale de l’église de Saint Jacques des Arrets (Haut Beaujolais) voulue par Michel Mercier, avec Yves Bruyas chargé de la culture et Joseph Duccarre, conseiller du canton de Monsols…
Jacky Fusaro est très présente du début du chantier (1990) jusqu’à son inauguration (des 60m2 de peintures murales), le 29 mai 2019 par le cardinal Philippe Barbarin… Elle sait bien que le peintre –son mari- ayant réalisé un monument « à lui » installera son nom définitivement dans la pérennité de l’histoire de l’art… « C’est mieux que d’avoir des peintures qui croupissent dans la réserve des musées » s’évertue-t-elle à répéter. Du coup, elle assiste à toutes les longues réunions qui jalonnent ce lourd chantier.
Avec les architectes Pierre Jas, Jean-Gabriel Mortamet, chargé des monuments historiques, et Frédéric Giuliani, directeur du service culture au Département du Rhône. Elle prévoit tout, dans le moindre détail, la couleur des cadres du chemin de croix qui devra s’accorder à la tonalité des colonnades anciennes de l’église, par exemple, jusqu’à choisir, chez son fleuriste personnel, les bouquets qui embelliront les colonnes de l’église revisitée par le talent unique de son artiste de mari… Rien n’est laissé au hasard…
Mais elle ne perd pas le fil des choses courantes, car la vie trépidante l’amène sur d’autres chantiers toujours pour Jean. Elle réalise des lithographies pour le 50ème anniversaire de la reparution du Progrès de Lyon, commandé par son PDG de la grande époque Xavier Elie, et Jean-Paul Lardy. Également avec Bernard Chaffange, directeur de l’aéroport Lyon-Satolas, il exécute une remarquable lithographie couleur dédiée à l’aviation… Deux projets d’ampleur, liés à l’infatigable Jacky.
Pourtant elle souffre, affaiblie par un cancer. Les dix dernières années seront carrément un calvaire pour le couple, toujours très uni. Elle sera aux côtés de Jean, fragile, parfois prête à tomber, aux vernissages du galeriste de la rue Auguste Comte, Alain Georges. Et elle assistera encore au prestigieux couronnement de Jean Fusaro le 30 novembre 2017, quand le Président du Conseil Départemental Christophe Guilloteau lui remettra les insignes des « Arts et Lettres » (photo ci-dessous).
C’est encore elle, qui, avec Pierre Jamet, avait défendu le legs au Département de la collection du Docteur Antoine Appeau de 39 œuvres de Jean Fusaro (qui risquait d’être dilapidé par l’Eglise de Scientologie) … Et elle ne verra pas non plus le projet qui lui tenait à cœur de l’inauguration de la « médiathèque Jean Fusaro » par la mairie de Cailloux-sur-Fontaine, soutenu par Angélique Enderlin.
En ce vendredi 25 juin arriva ce que tout le monde redoutait, la mort de Jacky-Cécile Fusaro, après d’atroces souffrances, dans les bras de son mari, à la clinique Protestante, où elle a eu le sursaut de dire à Jean, qu’elle aurait souhaité la présence du cardinal Philippe Barbarin, lequel a dit sa messe du dimanche 26 juin, spécialement, pour elle… Jacky-Cécile Fusaro a été incinérée, selon sa volonté, dans la plus stricte intimité.
À Jean Fusaro, nos vives condoléances, à Eve fille de Jean (ainsi qu’à ses deux enfants) nos amitiés respectueuses et compatissantes, à Thierry Zysman, fils de Madame Fusaro, et à sa famille en Polynésie nos condoléances attristées et à Morgan petit-fils de Jacky-Cécile, qui est très proche de sa grand-mère et de Jean Fusaro, toute notre sympathie. BG pour Lyon people
> Nous apprenons aussi le décès du peintre Régis Bernard (1932-2021) le 24 juin, à Taulignan (Drôme).
(1) Guy Goffette «Elle par bonheur, et toujours nue» éditions Gallimard, avril 1998
j:ai connu mr etmme fusaro dans mon restaurant avec le docteur Appo et mme je garde on precieux souvenir