Comment Lyon est devenue la capitale de la Lumière… avant de replonger dans l’obscurité

1 janvier, 2023 | Actualités Culturelles / patrimoine, Actualités Lyon, PATRIMOINE | 5 commentaires

De la lumière à l’ombre… Alors que la municipalité écologiste a décrété le black-out, nous avons décidé de rendre hommage à tous ceux qui, pendant 20 ans, ont embelli la capitale des Gaules par leurs jeux de lumière, tour à tour subtils ou éclatants. Le journaliste Philippe Lecoq est allé à la rencontre de nos magiciens de la lumière. Chaque soir, cette semaine, à 17h, nous publierons le portrait de l’un d’entre eux sur cette antenne.

Texte : Philippe Lecoq – A la mairie ce jour-là, ils sont quatre à table. Henry Chabert, Roger Monnami, Michel Noir et Jacques Lion. Monnami, est le patron de Sonepar sud-est (ex-Comptoir Lyonnais d’Électricité), et Lion le directeur du centre EDF-GDF Lyon Métropole. Le finaud Chabert, nouvel adjoint à l’urbanisme de Lyon, souhaite que ses deux acolytes enrôlent le maire dans une idée simple et géniale à la fois : éclairer le patrimoine Lyonnais, lui donner la même force la nuit que celle dont il hérite du soleil le jour. En finir avec la grisaille de la ville et lui donner l’éclat nocturne que sa beauté architecturale mérite.

Michel Noir et Henry Chabert. Le maire de Lyon et son adjoint élaborent le premier plan lumière en 1989 – Archives Lyon Figaro BML

Nous sommes en 1989. Michel Noir est séduit, il donne son feu vert à ce qui deviendra très vite le premier plan Lumière de Lyon. Henry Chabert confie à Alain Guilhot la mise en lumière d’une vingtaine de sites lyonnais, dont l’Hôtel-Dieu, la passerelle Saint-Vincent, la passerelle du Collège, le passage Thiaffait, ou la rue de la République… Rendu de copie le 8 décembre – hasard – de la même année. Les nuits et les hivers de Lyon ne seront plus jamais sinistres. Lyon allait devenir « la » ville Lumière.

Le 8 décembre 1989 donc, les Lyonnais encore pressés à cette époque de descendre dans la rue pour admirer les lumignons posés sur le rebord des fenêtres – comme le veut la tradition depuis 1852 en hommage à la vierge Marie – déambulent dans une ville sortie de l’ombre et par la même du brouillard qui avait fait sa réputation. Le patrimoine, souligné de lumière, leur apparait comme par magie sous un jour nouveau.

A partir de là, les métiers de « concepteur lumière » ou même « architecte lumière » ont commencé à s’afficher. Avec Alain Guilhot en première ligne, il y avait Laurent Fachard, Philippe Hutinet, Roland Jéol et Pierre Marcout, qui ont tous vécu grâce à Lyon de belles aventures entrepreneuriales partout dans le monde. Il a fallu attendre dix années pour que naisse le « Festival Lyon Lumières », un événement sur quatre jours inclus dans les célébrations du 8 décembre.

Roger Monnami poursuivra la mise en lumière avec Raymond Barre dès 1995

Avec, déjà, des œuvres artistiques éphémères qui marquent le public comme le « Chromolithe » de Patrice Warrener projeté sur l’hôtel de ville. « Nous avions décidé de créer le Festival sur quatre jours afin de ne pas proposer des choses extraordinaires qui ne durent qu’une soirée » se souvient Roger Monnami, véritable cheville ouvrière de la lumière à Lyon, qui avait lancé entretemps le Mat’Electrique et créé une association chargée de réunir des fonds pour soutenir la fête.

2001, la ville bascule à gauche. Les Festivités du 8 décembre vont-elles perdurer ?

« Je n’ai jamais voulu séparer la Fête des Lumières – son vrai nom depuis 2004 – de sa culture historique et religieuse » souligne Gérard Collomb, qui donne sa recette d’une fête réussie : « Il faut adhérer d’emblée. Les choses tarabiscotées qui se veulent intellos ne marchent pas. Il faut être populaire, au sens noble du terme ; souligner notre patrimoine, comme par exemple la cathédrale Saint-Jean sur laquelle la lumière permet de découvrir des détails architecturaux qu’on ne voit pas le jour.

Il faut des spectacles qui étonnent, comme l’éléphant du passage Menestrier ou la baleine de la place nautique (2011 et 2012, réalisation Catherine Garret, NdlR), ou encore l’aquarium dans une ancienne cabine téléphonique (Benoit Deseille et Benedetto Bufalino) ; cela peut aussi être de la poésie : la bulle rose autour de Louis XIV façon boule de neige, les gamins étaient scotchés. Ou ce que l’on a fait au parc de la Tête d’Or ; on peut enfin raconter une histoire, comme place des Terreaux, pas trop longue et compréhensible ».

Elu en 2001, Gérard Collomb appuie sur l’accélérateur pour booster la Fête des Lumières que nous envient les Parisiens, et le premier d’entre eux Bertrand Delanoé.

Avec Jean-François Zurawick, chef d’orchestre de la Fête des années 2005-2020, Gérard Collomb a vraiment donné l’impulsion qui en a fait un événement attirant jusqu’à quatre millions de personnes dont des milliers d’étrangers. Et propulsé Lyon comme locomotive des spectacles gratuits et populaires fondés sur l’art de la lumière, de l’éclairage, de la projection. Au point de faire fuir les Lyonnais du centre-ville pendant quatre jours, lassés d’abandonner leurs trottoirs et rues à des hordes compactes et inciviles ?

« Soit on fait une kermesse, soit on a envie de maintenir une grande fête qui éblouisse les Lyonnais et le monde entier », se justifie Collomb qui reconnaît tout de même qu’il y a eu deux années difficiles sur le plan logistique voire sécuritaire. « Je pense qu’il faut redonner du sens à cette fête, un sens artistique plus fort pour ne pas donner l’impression que nous ne faisons que de l’événementiel » explique Julien Pavillard, coordinateur général de la Fête des Lumières.

Alors qu’au nom de la sobriété énergétique la municipalité écologiste économise des clopinettes en sabrant la mise en lumière de la ville, Lyon peut s’enorgueillir d’être une place forte de la « galaxie Lumière ». Grâce aux plans et à la Fête, grâce à plus de quarante ans de mariage et de passion avec la lumière, un Cluster a vu le jour, il vient de s’installer dans le superbe immeuble Lumen construit par le Groupe Cardinal à Confluence. Il réunit un incroyable panel d’entreprises du secteur, des labos, des bureaux d’études, mais aussi un campus Lumière.

Toute une industrie de la Lumière – dans le sens large du terme – a éclos et s’exporte dans le monde entier. Les frères du même nom, Auguste et Louis, inventeurs du cinématographe peuvent être fiers de leur ville. Espérons que la parenthèse obscurantiste prenne vite fin…

<a href="https://www.lyonpeople.com/author/marco" target="_self">Marco Polisson</a>

Marco Polisson

Rédacteur en chef
Co-fondateur du magazine.
En charge de la rédaction et responsable des partenariats.
Délégué à la protection des données RGPD

5 Commentaires

  1. Sophie

    Economiser des clopinettes??? Connaissez vous le coût global de l’éclairage de la ville. C’est plutôt bien de réduire la luminosité quand c’est moins nécessaire et conserver la fête des lumières.
    Il suffit de trouver les bons équilibres, pour valoriser le patrimoine sans gaspiller.

    Réponse
    • Eric Abrial

      Le plaisir des yeux et son bienfait sur le morale des gens ne se résume pas à un chiffre en Euros.

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  2. HAIAIEL

    Gregory DOUCET c est l Archange déchu du paradis, redescendu sur terre pour y éteindre le rêve et la magie

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  3. Anonyme

    Triste ville de Lyon à Noel pas d’illumination pas de sapin de Noel le dogmatisme c’est triste

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  4. chirouze

    j’étais à Lyon le 31 décembre quelle tristesse alors que les villes du monde entier étincelaient de lumières Lyon était plongé dans le noir à 22h

    Lyon a disparu des radars et n’est plus la ville lumière
    merci les écolos

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