Texte : Morgan Couturier – Véritable héritage familial partagé de père en fils depuis trois générations, le sport automobile fait aujourd’hui le bonheur d’Etienne Roussel. À 29 ans, le Lyonnais peaufine son coup de volant sur les rallyes régionaux et nationaux, avec l’ambition de s’élever au-dessus de son père, Éric, qu’il affrontera en compétition, en mai prochain.
Pour peu, l’échange aurait pu respecter cette divine expression connue de tous les fans de F1 qui se respecte : « Rendez-vous au premier virage ». Etienne Roussel en est coutumier. Mais à le retrouver casqué sur celui-ci, moteur ronflant, on comprend aisément que l’intéressé n’est pas du genre à se garer devant sa télé. Le Lyonnais préfère prendre les choses en main. Et le volant de préférence. Voilà cinq ans qu’il en fait son compagnon de route, dès que le goudron vient à s’ouvrir devant lui. Il en va ainsi de ce rendez-vous, où l’opportunité de poncer la piste s’érige devant lui, au gré de baptêmes offerts à ses collègues de l’enseigne Murgier.
Une possibilité rare de s’illustrer, de troquer le costume de « chef des ventes 3e marché » pour une plus ajustée combinaison de pilote. Une journée de travail exceptionnelle où l’idée d’impressionner son directeur, Érik Murgier, se joint à une journée d’essais improvisée. Le jeune homme en profite alors pour envoyer. Pour montrer l’étendue de son talent, sa Renault Twingo ne demandant qu’à être bousculée. Ce sera là le point de départ d’une nouvelle saison. D’une nouvelle année faite de courses régionales et nationales. Un éternel recommencement planifié depuis ses débuts en 2018, théâtre de sa première participation au rallye des Vignes de Régnié accompli en compagnie de son meilleur ami, Lucas Jeannerot.
Un baptême du feu et un premier virage dans une carrière autrefois limitée à la lecture de notes. « J’ai commencé avec mon père en 2014. Je faisais son copilote », explique-t-il, sous l’oreille attentive d’Éric, son paternel. « Il a pris le virus », glisse celui-ci, rompu aux voitures de WRC2, aux championnats de France et autres Coupe de France de rallye, au point d’en atteindre la finale en 1998, à bord de sa Honda Civic. Reste que le patriarche n’a guère pour habitude de céder le volant. Jusqu’à cet instant où mis devant le fait accompli, Éric Roussel finit par céder aux avances des invités. Une première. L’occasion de juger. De jauger en temps réel aussi, alors que père et fils doivent s’affronter les 5 et 6 mai prochains, sur les routes de leurs terres originales. À Dieppe, en Normandie, sur ce rallye relancé en 1976, par le grand-père d’Etienne, un certain Philippe Roussel.
« C’est un sport ingrat. Tu passes des mois à te préparer et la voiture peut casser
à tout moment »
Une véritable histoire de famille, qu’Etienne étend aux deux autres frères de la fratrie, Thibaud et Jules, embarqués l’un comme l’autre dans ce duel père-fils. Tous deux feront copilotes, assistant de l’intérieur à une rivalité que cette grande première vient exalter. « J’essaye de minimiser l’événement, sinon ça va être terrible pour lui », charrie Éric, aujourd’hui directeur de… Diep Conseils, société spécialisée dans le conseil pour chefs d’entreprise. Casque sur la tête, ce dernier se gardera pourtant de tout conseil. Son adversaire n’en a que faire. Son but : le devancer, qu’importe la forme. « On peut finir avant-dernier, tant qu’on est devant, ça me va », plaisante Etienne, au sujet de cette inhabituelle confrontation. Et pour cause, d’ordinaire, le plaisir de conduire s’illustre dans cette opportunité de tout partager.
Une association familiale, baptisée Roussel Compétition Communication, en fait même la démonstration sur Youtube et les réseaux sociaux. Une manière originale « d’attirer de plus en plus de partenaires », une quête bien plus préoccupante que le pilotage. « Je passe plus de temps à chercher des sponsors qu’à rouler », souligne Etienne Roussel, le réservoir de fonds ayant tendance à vite s’épuiser. « C’est beaucoup d’investissement. Il faut un vrai moteur », valide Éric Roussel, en connaissance de cause. Mais l’un contre l’autre ne saurait passer outre, la passion demeurant un carburant irremplaçable. « C’est éprouvant psychologiquement, mais c’est ce qui est magique. Avec le rallye, tout est démesuré, que ce soit quand ça se passe bien ou quand se passe mal », enchaîne Etienne. Ainsi va le sport automobile : quelques minutes de bonheur. Une extase spéciale, qu’il convient toujours de remporter.
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