Texte : Fanny Suteau – Il s’était fait un nom dans le monde de la restauration lyonnaise, avec son service et sa prestance légendaire. L’ancien barman Philippe Bardol est décédé dimanche 8 octobre 2023. Il avait 73 ans.

Philippe Bardol ? Un homme dont l’héritage dans le monde de la restauration et de la culture lyonnaise est immense. Un homme qui a aussi marqué les esprits par sa gentillesse et sa bienveillance. « Il aimait les gens profondément, il a créé un lien privilégié avec chaque personne qu’il a rencontrée », souligne sa fille unique Sophie Bardol, directrice des annonces légales chez Lyon People.

Philippe Bardol a débuté son parcours professionnel en tant que barman dans les années 70, dans le célèbre établissement rue de la Bourse, Le Cintra (ci-dessus). Durant deux décennies, ce dernier a servi une clientèle d’exigence et de prestige, composée de personnalités politiques, d’hommes d’affaires (notamment Albert Artiaco et Daniel Perez), d’avocats et de chefs d’entreprise.

Du Cintra au Caro de Lyon

En 1989, il ouvre son propre bouchon lyonnais, Le Pichet d’Étain. Lui derrière le bar et son épouse Pierrette Soton en cuisine, tous deux faisaient régner une ambiance chaleureuse et amicale. Un lieu où le gérant organisait vernissages et expositions pour soutenir des artistes, comme le peintre devenu son ami, Michel de Matteis. « Philippe était depuis trente ans un père, un ami, un protecteur, un conseiller, un oncle de la grande époque, de ceux que l’on appelait « les tontons » », souligne ce dernier.

« Il a fédéré et créé une communauté. Il était président d’une association d’artistes peintres, « Entrepreneurs Mécènes ». Les artistes, qui n’avaient pas toujours d’argent, payaient la note du bar en toile », se remémore sa fille en souriant. Après avoir vendu Le Pichet d’Étain en 2004, Philippe Bardol a ouvert quai Saint-Antoine Le Phare, en hommage à sa passion pour la voile, qu’il partageait avec ses amis. Le barman a finalement terminé sa carrière derrière le comptoir du Caro de Lyon, auprès de Jean-Claude Caro.

Toujours à l’écoute des autres

« C’est cet esprit-là qui le démarquait, la proximité et l’amitié », confie sa fille. Philippe Bardol a survécu à un cancer de la gorge il y a une dizaine d’années, mais la trachéotomie qu’il a subie a considérablement affecté sa capacité à parler. Celui qui passait son temps à rire et à échanger se retrouvait sans voix. « Il s’est alors un peu renfermé socialement puis il s’est engagé dans l’association des mutilés de la voix », explique Sophie Bardol. Son père est finalement décédé en octobre 2023 des suites d’une maladie.

« Je me souviens aussi du Phare, Philippe était un phare qui tutoyait les plus simples et les plus grands, tous l’écoutaient. Je me souviens de nos déjeuners ces derniers temps, qui finissaient en les écoutant. Il est parti à leur table, celle des plus grands : les Brel, les Brassens et compagnie », confie son ami Gilles Demange. Philippe Bardol a marqué le cœur des personnes ayant eu la chance de le croiser, celui qui maniait comme personne l’art de la convivialité.