Photos © Fabrice Schiff et DR
Propos exclusifs recueillis par Benjamin Solly et Marc Polisson
Les premiers pas d’un homme libre dans les vignes de Bourgogne fin septembre. Quatre mois après avoir récupéré Toni Musulin à la Santé, Maître Christophe Cottet-Bretonnier a accepté de nous dévoiler les coulisses du casse du siècle. Sans langue de bois (ou presque).
Dans quel état psychologique était Toni Musulin à sa sortie de prison ?
Il était perdu. Passer quatre années à l’isolement, c’est quelque chose d’insupportable pour n’importe quel être humain. Même pour quelqu’un qui a la force de caractère de Toni Musulin. En prison, il n’a vu que ses avocats et l’aumônier. A sa sortie, je suis allé le chercher à la prison de la Santé. Il a souhaité que nous passions le week-end ensemble, avant que je le laisse à l’endroit où il m’a demandé de le déposer.
Comment avez-vous organisé son retour à l’extérieur ?
J’avais organisé sa sortie en amont avec la directrice de la prison pour éviter la presse. Mais il y a quand même eu une fuite, car nous avons été photographiés par VSD. Dehors, Toni Musulin était comme un enfant qui redécouvre la vie. Tout l’effrayait : les voitures, la foule… Il n’en revenait pas d’être sorti. Nous avons quitté Paris immédiatement. Notre premier arrêt, nous l’avons fait sur une aire d’autoroute pour partager un café et des croissants. Nous ne nous sommes pas sentis traqués. Nous avons passé le week-end en Bourgogne, le samedi et le dimanche.
La parole se libère-t-elle facilement lors de retrouvailles si particulières ?
Il ne cessait de parler comme si son débit allait de pair avec sa joie intense de retrouver la liberté. « Tu ne peux pas savoir le bonheur que j’ai de manger en face de toi. » Voilà ce que m’a dit Toni devant une belle entrecôte saignante. Il était tout simplement heureux de partager ce moment convivial du repas. En prison, son régime, c’était l’isolement. Son compagnon de gamelle, c’était le mur face à lui.
Pourquoi avoir choisi la Bourgogne pour cette escapade ?
La Bourgogne, c’est un choix commun. Nous avons souhaité faire cette étape, ce week-end ensemble. Nous avons choisi un lieu neutre car nous avions pris un engagement avec un grand média national. Le samedi a donc été consacré à nos retrouvailles. Le dimanche, nous avons fait l’interview pour Paris Match. Nous nous sommes quittés le dimanche soir.
Paris-Match a signé un chèque de quel montant pour avoir l’interview exclusive de Musulin ? On parle de 50 000 euros…
Je m’attendais à cette question. Cette interview, ce n’était pas une opportunité pécuniaire. Il eut été impossible pour Musulin, sauf à se faire saisir immédiatement l’argent, qu’il monnaye quoi que ce soit. Je vous rappelle qu’il est redevable suite à sa condamnation en appel d’une amende au fisc français de 45 000 euros, ainsi que d’une somme de 274 000 euros de dommages et intérêts envers son ex-employeur.
Donc Paris-Match est venu avec une mallette de billets ? A l’ancienne ?
Je ne crois pas que ce genre de pratiques soit dans les habitudes de Paris-Match. S’il y a eu une mallette, je ne l’ai pas vue. Musulin a souhaité s’exprimer une seule fois. Il avait une cartouche à tirer, il voulait le faire sur un média avec lequel il était en confiance. Il n’a pas voulu de télé car c’est quelqu’un qui n’est pas très à l’aise avec la caméra.
Vous noyez le poisson, Maître ! C’est donc vous qui avez « dealé » avec Paris-Match cette interview exclusive ? Pour quelle somme ?
(Enervé) Toni Musulin n’a touché aucun argent de Paris-Match et je ne suis le porteur de valises de personne ! Je me suis contenté d’encadrer juridiquement ce qui pouvait être dit ou pas dans cette interview. Le reste concerne uniquement votre imagination journalistique. Point.
Mais bien sûr… Revenons à votre première rencontre avec Toni Musulin.
Deux à trois mois avant le vol du fourgon de Loomis, Toni Musulin vient me voir à mon cabinet. Il est arrivé un après-midi rue Dunoir. Il avait pris rendez-vous comme tout le monde et je lui avais été recommandé par un ami. Il m’explique alors avoir été victime d’un car-jacking avec sa Ferrari. Il souhaitait que je prenne contact avec son assurance car l’indemnisation traînait. La première chose qui m’a interpellé, alors que j’avais ses bulletins de paye sous les yeux, c’est que cet homme possédait une Ferrari. Comment pouvait-il rouler en Ferrari avec son salaire de 1 500 euros mensuels ? Je ne lui ai pas posé la question.
Vous avez sciemment occulté cette question ?
Oui. J’ai d’ailleurs hésité avant de me raviser. Au fond, je me disais que cet homme devait être un sacré personnage. Quelque temps après qu’éclate l’affaire, lors d’une de mes visites au parloir, nous avons reparlé de ce moment. Il m’a avoué que le fait que je ne lui ai pas posé cette question sur sa Ferrari et son salaire avait joué un rôle non négligeable dans la confiance qu’il m’a d’emblée témoignée et dans sa décision de me choisir par la suite pour assurer sa défense. « Cette question, on me la posait tout le temps et ça m’emmerdait prodigieusement ! », disait-il alors.
Vous aviez remarqué l’ambiguïté du « personnage » – pour reprendre votre qualificatif – lors de votre première rencontre ?
Pour moi, c’était un client comme un autre. J’ai eu seulement deux rendez-vous avec lui et des contacts téléphoniques, mais j’ai su créer un lien de confiance. Quand il a fait son casse, je n’ai d’ailleurs pas percuté que c’était lui. Je me souviens de ce moment où je le découvre. C’était un dimanche, je lis le JDD et Le Progrès. Musulin était alors en cavale. Quand je prends conscience que c’est lui, je fais les cent pas dans mon appartement en criant : « Mais c’est mon client ! »
A quel moment Musulin fait-il appel à vos services ?
Après sa reddition à Monaco. J’imagine alors que Musulin peut faire appel à moi, mais j’ai quelques doutes. Je fais du pénal, mais je ne suis pas uniquement pénaliste contrairement à d’autres qui ne font que ça. Quand les policiers lui ont demandé au début de sa garde-à-vue quel avocat il souhaitait contacter, il a donné mon nom.
Comment se passe votre rencontre ?
J’arrive à « Marius Berliet » et je vois l’Hôtel de Police de Lyon comme je ne l’ai jamais vu. C’était Disneyland. Il y avait une quinzaine de camions, des régies, des paraboles partout. Sur place, je suis assailli par les journalistes, les caméras. Je ne dis rien. Je file voir Musulin. Nous avons eu directement une conversation très professionnelle. J’avais préparé un communiqué de presse à ma sortie de l’Hôtel de Police.
A ce moment, vous vous dites que c’est l’affaire de votre carrière ?
Forcément. Même si j’avais déjà connu ce rapport particulier aux médias lors de l’affaire Fauviau en 2006 à la Cour d’Assises des Landes. Je défendais une joueuse de tennis qui avait été droguée par un père de famille jugé à ce moment-là pour avoir empoisonné les adversaires de ses enfants au tennis en mettant du Temesta dans leurs gourdes. L’un d’eux en était mort. C’est l’affaire la plus grave qui n’ait jamais été jugée dans le sport amateur et les medias du monde entier étaient présents. Cette expérience m’a servi pour aborder l’affaire Musulin.
Une affaire comme celle-là, vous décidez pourtant de la partager avec votre confrère Me Banbanaste…
Il n’y a pas de conflits d’égos dans ce type de dossier. J’ai défendu Toni Musulin seul jusqu’à sa mise en examen. Mais il n’était pas question dans mon esprit de continuer à le défendre en solo. Il fallait défendre Musulin à deux comme c’est l’usage dans ce genre d’affaire très médiatisée et m’adjoindre les services d’un confrère. Dès ma première visite à la maison d’arrêt, nous sommes très vite tombés d’accord avec Musulin sur un nom : le pénaliste lyonnais Hervé Banbanaste.
Il a aussi pris toute la lumière médiatique dès le début de l’affaire…
C’est votre jugement. Toutes les décisions sur ce dossier ont été prises à deux. Tout cela était contrôlé très méticuleusement par Toni Musulin qui s’est intéressé de très près à sa défense. C’était une partie de billard à trois bandes : Musulin, Banbanaste et moi. C’est une interprétation de journaliste que d’estimer que, de telle période à telle période, l’un ou l’autre avocat a plus attiré la lumière.
On comprend Maître… ça vous a un peu fâché que Me Banbanaste soit surexposé et que le bébé vous échappe médiatiquement…
(Enervé) C’est une invention ! Avec Hervé Banbanaste, nous avons eu une collaboration parfaite durant ces quatre années. Nous avons fait l’intégralité des conférences de presse ensemble. Et je peux vous dire que si tout cela s’était transformé en conflit d’égos et que si nous avions déçu Musulin, nous sautions.
Me Banbanaste et vous-même auriez pu « sauter », comme vous le dites ?
Honnêtement, non. Je pense que Musulin n’a jamais envisagé de nous remplacer. Mais il y a eu des moments de lassitude de son côté, quand tous nos recours n’aboutissaient pas. Mais Toni comprenait que cette affaire était devenue politique. Il a été très déçu par la justice de son pays. Il pensait que c’est une justice normale qui lui serait réservée. Mais, je le répète, si nous l’avions mal défendu, nous aurions sauté. Musulin ne nous a jamais donné un chèque en blanc.
En parlant de chèque, celui de vos honoraires s’élevait à combien ?
Vous vous doutez que les répercussions de cette affaire sont importantes. Dans un dossier comme celui-là, on ne regarde pas ses honoraires. On ose à peine en demander.
Vous n’avez donc rien touché ?
J’ai envoyé une facture…
A-t-elle été honorée ?
Cette information ne concerne que mon client et moi-même.
Racontez-nous qui a essayé de vous piquer l’affaire à Lyon ?
C’est à Paris qu’on a essayé de nous piquer l’affaire ! Peut-être suis-je un peu naïf mais je ne savais même pas que de tels comportements pouvaient exister entre confrères. Il y a des avocats très connus, dont je tairai le nom, qui ont tenté d’escamoter le dossier. Ils ont écrit directement au père de Toni Musulin en lui disant qu’il ne fallait pas que son fils nous confie sa défense. Derrière, ils proposaient leurs services, évidemment. C’est Toni lui-même qui nous l’a appris.
Même à Lyon, le très médiatique David Metaxas n’a pas essayé de faire main basse sur le dossier ? On a du mal à vous croire…
Oh, allons ! J’adore mon confrère Metaxas (rires). Plus sérieusement, je ne sais pas si Me Metaxas a essayé de me piquer le dossier. Ce qui est évident, c’est qu’il se serait damné pour avoir cette affaire (rires).
Pourquoi avoir accepté de jouer votre propre rôle dans le film de Philippe Godeau 11.6 sur Toni Musulin avec François Cluzet dans le rôle-titre ?
Je ne me voyais pas refuser cette proposition originale de Philippe Godeau de participer à son film le temps d’une scène que nous avons tournée en une matinée à la confluence. A sa demande, nous l’avions souvent rencontré avec Hervé Banbanaste pour l’aider à mieux percevoir la personnalité de Musulin, que ce soit pendant l’élaboration du scénario ou au moment du tournage. Philippe Godeau est devenu un ami et nous nous voyons régulièrement à Paris. Il m’invite sur ses tournages comme dernièrement pour la suite des « Trois frères » avec les inconnus qu’il produit.
Un magazine a établi un classement des plus grands casses de l’histoire, plaçant Musulin en seconde place entre Albert Spaggiari et Jacques Mesrine…
Le point commun de ces trois casses n’est pas l’argent mais l’égo. Jacques Mesrine était rentré dans une sorte de course à la surenchère avec la police et le commissaire Broussard en particulier. Albert Spaggiari, c’était ce petit photographe niçois qui voulait montrer au monde entier qu’il était génial, il avait un complexe d’infériorité énorme. Il a fait des plans très élaborés pour réaliser le casse du siècle à la Société Générale.
Ce sont les complexes de Musulin qui l’ont poussé à escamoter le fourgon de la Loomis ?
Toni Musulin n’a pas de complexes. C’est un personnage complexe. Au bout de quatre ans, j’ai toujours du mal à le définir. Ce que je sais, c’est qu’il a voulu faire un bras d’honneur à son employeur, à un système, en commettant son vol.
Revenons aux personnages clés de cette affaire, en premier lieu, le chauffeur de taxi qui a croisé Musulin alors qu’il transvasait les billets de son fourgon à la camionnette de location… A-t-il pu se servir ?
Il n’a jamais été identifié et il a très bien pu prendre une partie de l’argent. C’est une des hypothèses plausibles. Lorsque Toni Musulin a transféré une partie des 11,6 millions d’euros du fourgon à sa camionnette de location, il y avait tellement de paquets d’argent que tout n’a pas pu être chargé. J’en suis convaincu.
Un autre protagoniste de l’affaire est le propriétaire du box qu’a loué Toni Musulin pour mettre au chaud son magot… Une vraie balance ?
Sans aucun doute ! Il est évident que c’est lui qui fait capoter le plan de Musulin. J’ai toujours dit à Toni que c’était sa seule erreur. Ce bailleur, qu’il a vu sous un faux nom, il eut fallu qu’il le rencontre avec une perruque ou d’autres artifices pour qu’il ne soit pas reconnaissable. Toni Musulin n’est pas parfait. Sinon, il serait parti avec les 11,6 millions d’euros.
Est-ce le propriétaire du box qui a mis la main sur le grisbi ?
Le propriétaire du box avait les clés du box. Il a pu y aller n’importe quand…
Pour se remplir les poches avant de balancer Toni, par exemple ?
Tout est possible. Cela a été évoqué au procès par Toni lui-même. Il n’est pas venu témoigner, il a dépêché un avocat en appel. Il a refusé toute interview… Tout cela laisse penser qu’il n’est pas très à l’aise avec cette affaire.
Le chauffeur de taxi, le propriétaire du box… Et vous Maître ? Toni Musulin vous rencontre une première fois trois mois avant le casse. Vous auriez pu l’aider à planquer le magot pendant sa cavale ?
Ben voyons !… On ne me l’avait encore jamais faite celle-là ! J’adore la liberté de ton des journalistes de Lyon People et c’est pour cette raison que j’ai accepté de répondre à vos questions. Mais là, vous êtes en plein délire !
On parle quand même de 2,5 millions d’euros !
Ça vous fait fantasmer une telle somme, n’est-ce pas ! Pour redevenir sérieux, j’ai d’emblée pensé qu’il était déplacé de poser cette question à mon client. Mais une seule fois, Toni Musulin a abordé le sujet de lui-même lors d’une visite de parloir à Corbas. Les yeux dans les yeux. Nous évoquions le fait qu’il était allé manger ce sandwich après avoir ramené la Kangoo pleine de billets dans le box. Il savait qu’il avait « déconné », car au moment de revenir cacher l’argent derrière son mur, le quartier était déjà bouclé. Il y a eu un silence. Puis il m’a regardé dans les yeux. « Je n’ai pas l’argent. Qu’ils fantasment tous, mais je n’ai pas l’argent. C’est la vérité », m’a-t-il dit mot pour mot.
La parole de Toni Musulin a-t-elle une valeur ?
Totalement. C’est un homme d’honneur.
Pourtant, Toni Musulin a parfois fabulé, voire menti. Par exemple lorsqu’en soulevant de la fonte à la salle de sport, il ergotait devant ses camarades en assurant qu’il était patron d’un commerce de voitures de luxe dans le nord de la France…
On ne peut pas objectivement en disconvenir. Cela fera partie de son mystère.
Qui a effectué le recomptage des billets ?
La police.
Les lardus ont-ils pu alimenter leur caisse noire avec les billets manquants ?
(Il hésite) La police arrive la première sur les lieux, elle a la main mise sur le recomptage des billets. Ce ne serait pas la première fois que l’on verrait des policiers se servir sur un butin. Ce n’est pas injurieux de dire cela, c’est une réalité. Mais dans 95% du temps, la police fait bien son travail. Ça aussi, c’est une réalité. Les 5% restants sont du domaine de la conjecture. Personnellement, je n’ai pas voulu communiquer publiquement là-dessus car j’ai estimé que ce n’était pas un argument forcément favorable à la défense de Toni Musulin.
La mise en cause de Michel Neyret dans cette affaire, c’est un plantage de Maître Banbanaste ?
Il n’y a eu aucun plantage dans la défense de Toni Musulin entre Me Banbanaste et moi. Il y a eu un sujet de désaccord. Etait-ce de l’intérêt de la défense de notre client de médiatiser l’hypothèse Neyret autour d’une hypothétique malversation dans le recomptage des billets ? Je n’en étais pas convaincu. Hervé Banbanaste était persuadé que c’était utile à la défense de notre client. Il est donc monté seul au créneau médiatique sur ce sujet.
C’est à ce moment-là qu’entre Banbanaste et vous la lune de miel a tourné court !
C’est le seul point où nous ayons eu un désaccord en quatre ans de collaboration. Si vous voulez vous gargariser avec ça, faites-le.
On sait qu’en mai 2009, quelques mois avant le vol du fourgon, Toni Musulin fait une escapade en Serbie, dont il est originaire, avec sa Ferrari. Tout le monde pense que c’est là-bas qu’il est allé déposer le butin lors de sa fuite…
C’est peut-être ce que tout le monde pense. Mais le fond de ma pensée, c’est qu’il n’a pas ces 2,5 millions d’euros. C’est mon intime conviction. Un seul exemple. Expliquez-moi comment vous mettez 2,5 millions d’euros en petites coupures dans le top case d’une moto ? Dites-moi, techniquement, comment cela est possible ? Cette interrogation faisait également partie de nos demandes d’actes. Demande refusée. Pourquoi ? Ces 2,5 millions d’euros n’intéressaient visiblement pas la justice.
Vous plaisantez ? Quand le procureur Marc Désert interjette appel, il le justifie en expliquant que « Toni Musulin ne profitera pas dans la tranquillité des 2,5 millions d’euros qu’il a cachés quelque part »…
Ce sont des déclarations obligatoires. Le procureur représente l’intérêt public, il ne peut pas dire autre chose. Aujourd’hui, Toni Musulin ne risque plus rien sur le plan pénal. Il a purgé sa peine. Admettons qu’il ait ses 2,5 millions d’euros, il peut les dépenser librement, où il veut. Il ne peut plus être poursuivi pour recel. Il a des comptes à rendre sur le plan civil, mais plus sur le plan pénal.
Pourquoi met-il en scène sa reddition dans les Jardins de l’Observatoire à Monaco ?
Il savait que cela allait considérablement compliquer les choses. Mais cela n’a pas été le cas parce que la loi a été bafouée. Nous avons fait des demandes d’actes pour faire annuler la procédure au regard de l’illégalité de l’extradition de Toni Musulin. Eric de Montgolfier, procureur de la République de Nice, habitué à traiter cette problématique avec la principauté, nous avait soutenus publiquement à l’époque en déclarant l’extradition illégale. Il fallait que Musulin reste 40 jours à Monaco et que son extradition soit signée par le Prince Albert. Or nous n’avons jamais vu sa signature… Mais c’est un dossier hors norme…
Pourquoi l’affaire Musulin est-elle hors norme ?
Toni Musulin a fait son casse avec le Code Pénal dans la tête. C’est un intellectuel, un meneur, un type au dessus du lot. Il savait parfaitement qu’il ne fallait pas qu’il commette des imprudences aux regards de circonstances qui auraient pu être aggravantes, comme l’utilisation de la violence par exemple ou de complicités. Tout notre travail, pendant l’instruction, a été de garder cet état d’esprit initial pour éviter que le juge d’instruction densifie le dossier et trouve des circonstances aggravantes. Musulin aurait alors encouru 10 voire même 20 ans de prison.
Pour vous, il s’agit donc du casse du siècle ?
C’est le casse du siècle au regard du mode opératoire et de l’équation qui en résulte : voler 11,6 millions d’euros et n’encourir que 3 ans de prison. Cela n’avait jamais été fait avant. C’est l’un des casses les plus simples et les plus complexes. De plus, l’idée du mur invisible pour planquer l’argent est tout simplement géniale. Ni la police, ni le propriétaire qui lui a loué le box ne l’ont remarqué. Toni comptait aller se servir dans sa tirelire quand bon lui semblait, même si le box avait été reloué !
Quel est votre intime conviction dans cette affaire ? A-t-il, oui ou non, planqué le magot quelque part ou ce dernier s’est-il volatilisé ?
Je n’ai pas de certitude mais une conviction. Et ma conviction c’est qu’hélas pour lui, il n’a pas cet argent. Finalement, le personnage m’est apparu tellement sympathique que quelque part je souhaite qu’il l’ait.
Que savez-vous de la nouvelle vie de Toni ?
Pas grand-chose ! Je sais juste qu’il a quitté la France et qu’il vit désormais à l’étranger. En Europe probablement.
A quoi consacre-t-il ses journées ? A recompter ses billets ? A ruminer son échec ? A honorer la nouvelle Madame Musulin ?
Je sais qu’il avait des projets d’affaires, tout à fait honnêtes.
Pour le qualifier, on hésite entre deux appellations : manipulateur génial ou perdreau de l’année…
A choisir… Manipulateur génial ! Peut-être qu’il nous a tous enfumés, vous, moi, et que l’argent il l’a. Je n’en sais rien au final. A chacun de se faire son idée.
L’épilogue officiel est bidon de chez bidon… S’il est parti sans rien, ce n’est plus le casse du siècle mais le fiasco du siècle…
J’assume. Des fiascos pareils, j’en veux tous les jours dans mon cabinet !
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