De l’eau dans le gaz au Salon du printemps

31 mars, 2010 | INDISCRETIONS | 2 commentaires

salon-de-printemps-2010 Par Alain Vollerin

 

On peut légitimement se poser la question. Jean-Jacques Cesbron. Qui sait ? Le nouveau président de la S.L.B.A, malheureuse et plus ancienne société vivante dans le monde des arts plastiques à Lyon où les dictats affligeants se multiplient.

 

Pourquoi un nouveau président ? Les précédents Yves Malfroy et Jean-François Forest se sont bouffé le nez, comme dirait Guignol à son compère Gnafron, et puis, il faut du neuf. « Semblable à de l'ancien », aurait dit notre regretté ami René Deroudille. Vous avez dit du neuf ? Mais, comment faire plus neuf que neuf, quand on vit dans la ville qui inventa la Biennale d'Art Contemporain, événement qui reçoit des milliers de visiteurs venus du monde entier. Jean-Jacques Cesbron n'est pas pour moi un inconnu. J'ai retrouvé dans mes archives un catalogue d'une exposition à la Maison des Arts de Genas, alors administrée par le très estimable Jean-Claude Guillaumon, où, il avait signé une préface pour un hommage au camarade Geormillet. Ceci lui donne-t-il autorité pour faire du neuf ? A moins qu'il n'ait inventé, comme un père Ubu contemporain une machine à faire du neuf. Si, tel est le cas, sa machine est en panne. Car, en me promenant dans les allées du Salon de Printemps, rien ne m'a particulièrement bouleversé. La présentation générale n'est pas meilleure que celle de L'Hivernale, au contraire, une grande œuvre de Claude Gazier empêche la lumière de pénétrer dans les salles. Pour innover, il suffit parfois de peu, en installant à gauche ce qui était à droite. Un projet poursuivit avec un succès partagé par Mrs Collomb et Queyranne depuis de nombreuses années. Mais au fait. Qui c'est ce Claude Gazier ? Un peintre né à Lyon, me dit-on, soutenu par la galerie Pallade qui, venue de Paris, a tort de croire qu'elle fait du neuf en présentant des Parisiens aux Lyonnais. Les ficelles déployées par Claude Gazier sont au niveau primaire. Décrire le mouvement dans la photo et le cinéma est une aventure qui remonte à la nuit des temps. Je ne vous ferai pas l'injure de vous citer des références.

 

A part cela, docteur, y a-t-il encore de l'eau dans le gaz ? Oui. On s'ébaubit au Salon devant les bricolages infantiles de Lionel Stoccard. Je suis allé, il y a maintenant plusieurs années, dans son atelier, rien n'a changé, toujours de tristes copies de la folle inspiration du nouveau réaliste Jean Tinguely, le mouvement en moins. « C'est ça qu'est triste », aurait dit Bourvil qui lui au moins était un vrai marrant, et un sensible, tous sentiments absents chez Stoccard. Et ben mon vieux, pour du neuf. J'ai vu à côté de cela d'épouvantables tartouzes comme celles de Christine Azaïs, Jocelyne Beaugrand-Tual, Bena, Gérard Bendrihen, Cako, Françoise Castellon, Micheline Finot, Issorg, Di Carlo, Michel Relave, Annie Robin, Samy, Seguin-Ducroux, Vallerotonda, Roland Vernhes, Wambst… Comme au Salon du Sud-Est, on croit faire du neuf en bidouillant de l'Abstrait. C'est faux. Odile Bérard plagie naïvement Edward Hopper. Je veux saluer le courage de mon vieil ami Bernard Philippon, disciple d'Hans Bellmer et de Wols. Des sculpteurs, l'école lyonnaise en reconnaît peu de bons, surtout parmi les modernes et les contemporains. Ceux qui sont présents ici sont des pleureuses qui font dans le sentimentalisme primaire. Ils ont l'âge mental des adolescents. Ils croient encore à de vieilles chimères. Dans leur production tout est approximatif. Nous sauverons la céramiste Suzanne Angéniol, héritière d'un vrai métier. L'intérêt de cette édition du Salon résidait dans la présence d'Annick Hadacek qui nous a convaincu depuis plusieurs années de son talent au service d'une certaine idée de la femme. Anne-Marie Glathoud a réussi une chaleureuse composition avec une bicyclette. Thierry Grosfilley démontre comme George Boulé, un savoir-faire établi entre tradition et modernisme. Marc Curial copie toujours des pin-up comme ses modèles américains.

 

Mireille Cornillon affirme son tempérament véritable. Elle a des choses à dire. Elle s'exprime avec encore plus d'aisance et de naturel dans une palette très contrastée et  revendiquée. Catherine Basset-Aubonnet ne maîtrise pas sa technique, comment l'émotion pourrait-elle passer ? Marie Mancini voudrait bien. Elle ne manque pas de bonne volonté. Sa production est trop bien pour être vraie. Elève de Marc de Michelis qui, jamais, ne fit une œuvre personnelle, et qui empoisonne désormais le monde de l'art lyonnais, elle répète comme toutes les autres le même déferlement de pâtes et de couleurs. A vous donner une indigestion. La présence des artistes japonais apporte beaucoup de qualité à cette manifestation : Futakami, Teshima, etc… Ce salon qui à l'origine était la vitrine de professionnels très souvent formés à l'école des beaux-arts de Lyon est devenu un exutoire pour débutants et amateurs non éclairés. L'Histoire de la S.L.B.A contient des trésors qu'il faudrait utiliser pour retisser des liens avec le public lyonnais. Il y a là une mission déterminante pour l'avenir de l'aventure des arts plastiques à Lyon. Hélas ! Il n'y a pas d'artistes sans marchands, sans marché. Il faut convaincre les commissaires-priseurs de consolider la valeur de l'école de Lyon en salle des ventes. Un président de la S.L.B.A inspiré aurait les moyens par la richesse du patrimoine de cette société de s'attacher à ce devoir et de rendre service à sa ville, à sa région qui est depuis le XVIe siècle en France une des cités les plus engagées dans l'univers des arts. Vous voyez que la tâche est immense. Mais quel pari ! Quelle revanche est ainsi possible pour notre glorieux passé, pour la S.L.B.A ? Le Salon survivra-t-il aux déchirements qui le bouleversent actuellement ? S'il faut absolument faire du neuf, pourquoi ne pas concevoir ailleurs, une autre structure. Au fait, et si le Gazier Claude n'était qu'un suiveur de Jacques Monory ? Nous espérons que la raison l'emportera dans le respect d'une institution infiniment honorable.

 

Salon de Printemps 2010 – 123eme édition

Jusqu'au 8 avril 2010

Palais Municipal

20, quai de Bondy – Lyon 5eme

 

 

2 Commentaires

  1. tsenre

    Des questions légitimes me viennent effectivement à l’esprit à la lecture de cet article. Pourquoi une plume aussi acerbe pour parler de cette exposition ? Je partage cependant l’avis du critique quant à la présence de certaines œuvres dans ce salon et m’interroge également sur ce qui a justifié de les présenter… Les œuvres abstraites sont passées à la moulinette, mais comment alors expliquer que d’autres œuvres aient échappé à cette salve assassine de mots ! Si je suis d’accord sur le fond, je m’interroge davantage sur les méandres sinueux et obscurs qui conduisent à un tel article. (suite)

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  2. tsenre

    Quels sont ces conflits d’antichambre et ces querelles intestines que le lecteur doit deviner entre les lignes de cet écrit ? J’apprécie la critique d’un auteur lorsqu’il affirme sa vision et sa conception de l’art tout en espérant que sa plume ne soit pas guidée par une rancœur qui le conduirait à régler des comptes…

    Réponse

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