Jacques Simonet, patron d'Intermedia, journal confidentiel du monde de la publicité et des médias, fête cette année les 25 ans de son titre. Pour cela il a décidé de réaliser une manifestation qui « marque » les esprits. Comme il sait mieux que personne que les « gens de rien » (comme les appelle l'écrivain Patrick Rambaud) et les publicitaires qui sont des gens de pas grand chose adorent la gloriole et les médailles de pacotille comme les enfants raffolent des bonbons, il a eu l'idée d'honorer ceux et celles qui avaient brillé dans la communication ces 25 dernières années.

Il a fallu bien du talent, beaucoup d'imagination et surtout énormément de mansuétude à Jacques Simonet pour établir une liste d'une trentaine de « nominés » censés avoir « marqué » la communication pendant un quart de siècle. Pour ce faire, il a été obligé de mélanger torchons et serviettes, chèvres et doux, carottes et navets ; Il fallait bien mettre du monde sur l'estrade pour que l'événement soit événementiel.

Parmi les impétrants qui avaient accepté l'invitation figuraient quelques vieux publicitaires, quelques patrons de médias, mais aussi imprimeurs, businessmen, organisateurs de salons, ou fabricants de jeux vidéos et deux journalistes, l'un malheureusement décédé il y a 10 ans, Alain Buhler (le plus respectable de la presse lyonnaise) et plus surprenant Brunet-Lecomte, bien vivant mais dans quel état ! Bizarrement il y avait une proportion incroyable d'amis du patron de Lyon Mag qui pourtant en a peu.

Parmi les vieux publicitaires on reconnaissait (encore que !) Georges Chapuis que l'on voit davantage (depuis 20 ans) sur les jeux de boules que dans les agences de publicité qui semble-t-il n'en voulaient plus. Il y avait aussi Denis Troux(e) qui n'a jamais été considéré par ses pairs comme un grand publicitaire. On lui reconnaît en revanche un grand talent de faiseur de fric. Il a même réussi à vendre deux fois son agence. Il s'est aujourd'hui recasé dans le tourisme. Jean-Michel Daclin, ci-devant adjoint au Rayonnement de Lyon, fut longtemps le publicitaire attitré de la gauche jusqu'à ce que Collomb qui en avait assez de perdre les élections, confie ses campagnes à de meilleurs que lui et le mette sur sa liste pour le consoler.

Si ces gens-là ont marqué la « communication », tous les communicants lyonnais auraient dû être sur le podium. Le seul publicitaire qui ait marqué son temps à Lyon et bien au delà de Rhône-Alpes puisqu'il a révolutionné la pub à la fin des années 60 s'appelle Jean-Marie Chourgnoz. Dommage que Jacques Simonet qui est sans doute trop jeune, ne l'ait pas connu.

Comme par hasard, il y avait aussi sur l'estrade l'imposant Olivier Ginon, l'ex golden boy Bruno Bonnel, tous grands amis de Brunet-Lecomte. On se demandait bien ce qu'ils faisaient là. Leur présence insolite explique peut-être quelques défections. En effet, de nombreux nominés avaient refusé de venir cautionner cette « Foire aux vanités ». Seuls quelques uns méritaient d'être honorés (comme par hasard la plupart ne sont pas venus). Daniel Perez et peut-être Alberti qui ont réussi à imposer leurs radios dites libres (Radio Scoop et Nostalgie). Paul Dini qui a « inventé » les journaux gratuits qui depuis ont fait flores. Il a d'abord créé le 38, puis le 69 avant de faire des petits partout. Fortune faite, il a crée le musée Dini à Villefranche. Pas mal ! Non ?!

Eric Peyre, lui pour avoir créé Jet Multimédia et Jérôme Bellay qui a fait exister TLM (dommage que ses successeurs n'aient pas été à la hauteur) mais aussi inventé LCI, France Info ou encore Radio Autoroute, méritaient d'être là. On est loin de nos petits notables de la réclame. Mick, pourquoi tu tousses ?

Pour moi, celui qui méritait la palme était incontestablement celui qui a réellement marqué la communication en Rhône-Alpes. Il ne l'a pas fait exprès. Par vanité, ce fils à papa, héritier d'un empire de presse régionale a réussi à nous débarrasser du monopole insupportable que constituait l'alliance « Le Progrès-Dauphiné Libéré ». Louanges (il aime ça) à Jean-Charles Lignel pour cet acte héroïque. Aujourd'hui (ne le dites pas à sa mère) il joue du piano dans les bars new-yorkais. Ce qui explique qu'il n'ait pas pu venir. Il s'est fait excuser mais a envoyé un petit mot pour dire qu'il allait revenir et récupérer Le Progrès. Comme quoi, le culot et la vanité sont incontestablement des valeurs essentielles, pour réussir dans les métiers de la communication. Qui les porte mieux que Jean-Charles Lignel ?

Jacques Simonet, qui avait besoin de monde, m'avait inscrit sur sa liste des nominés. Imaginez ma gêne. Que dis-je, mon désarroi ! J'ai failli céder à la tentation et assister à cette soirée hommage sans intérêt ; histoire de voir ça de près. Au dernier moment, j'ai dû rebrousser chemin (le petit vélo qui tourne dans ma tête ayant refusé d'avancer). Décidemment je crois que je déteste ce genre de cérémonies où l'on s'autocélébre sans se rendre compte que chacun sombre dans le ridicule. Qui heureusement ne tue pas. Ce qui promet encore de beaux jours aux grenouilles qui se voient aussi grosses que certains bovidés décorés. Des veaux d'or ?

Vanitas vanitatum et omnia vanitas !