Black swan

16 février, 2011 | CINEMA | 0 commentaires

black-swan.jpg Par Aymeric Engelhard

 

Le monde du ballet placé sous le signe du fantastique. C’est cette découverte qui nous est proposée avec « Black Swan », film ambitieux qui, sous ses faux airs tranquilles, cache une violence étonnante. Schizophrénie et paranoïa s’entrechoquent pour un spectacle absolument sidérant.

 

Le cinéaste new-yorkais Darren Aronofsky n’a pas volé sa réputation. Depuis ses débuts et le film en noir et blanc « Pi », il a toujours affiché un anticonformisme qui a su à la fois plaire aux conformistes eux-mêmes mais aussi bien sûr aux autres. « Requiem for a Dream » l’a propulsé sur le devant de la scène et malgré de lourds combats menés contre les majors (qui lui refusèrent les grandes batailles dont il rêvait pour « The Fountain » et lui soutirèrent de nombreux projets tels qu’un nouveau « Robocop »), son talent de metteur en scène est aujourd’hui des plus reconnus. Tout comme il y a de cela deux ans avec l’excellent « The Wrestler », Aronofsky se retrouve en lice aux Oscars avec « Black Swan ». Ce n’est pas le plus ambitieux de ses projets mais indéniablement, preuve de son excellente croissance avec le temps, c’est son meilleur film. Le Black Swan c’est évidemment le Cygne Noir, exact contraire du Cygne Blanc dans le célèbre ballet «Le Lac des Cygnes» de Tchaïkovski. Choisie pour interpréter les deux rôles sur scène, la douce et belle Nina ne parvient pas à se trouver dans le personnage sombre et rusé qu’est le Cygne Noir. Mais face à Lily (Mila Kunis, au top) qui possède ces particularités-là, elle se laisse peu à peu couler dans la schizophrénie. En plus de la dangereuse relation qui se créer entre les deux femmes, la belle doit échapper à une mère ultra protectrice (Barbara Hershey, impressionnante) qui couve violemment sa fille afin de la rendre parfaite. Jusqu’au moment fatidique de la représentation sur scène, Nina devra faire face à ses démons et ne pas oublier que son plus grand adversaire reste elle-même. Déjà vu ? Certes. Sauf que lorsque le film sombre dans le fantastique horrifique la donne est toute autre.

 

L’œuvre commence dans un rêve. La caméra danse autour de Natalie Portman (dans le rôle de sa vie) comme si elle était elle aussi sur scène. Un homme se mue en cygne noir et se joint au ballet. La musique de Tchaïkovski rugit, les images virevoltent sublimées par une photographie scénique à la fois sombre et lumineuse… Du grand art. Par la suite, la montée scénaristique a de quoi décevoir. La linéarité dont fait preuve le scénario pourrait rappeler « The Wrestler », de même en ce qui concerne la façon de filmer les personnages. De toute façon, les deux films restent relativement proches dans le sens où Aronofsky s’attarde sur deux arts (il considère le catch comme de l’art) qui demande force d’interprétation et dépassement physique. Il n’est pas étonnant alors de trouver des similitudes. On dénotera assez peu valeurs de plan éloignées, mais au contraire une proximité profondément troublante avec le casting. La caméra devient témoin, danseuse et nous rend confident. Finalement la grimpée se fait donc douce, une atmosphère noire règne mais encore rien de bien méchant. Mais plus le film avance, plus les choses virent au chaos. Les hallucinations se font de moins en moins rares, une tension sexuelle palpable se créer entre Nina et le directeur artistique Thomas (Vincent Cassel, excellent) et l’emprise du Cygne Noir arrive à son sommet. Là « Black Swan » vire de la façon la plus habile qui soit dans l’horreur. Au son d’une BO terrifiante de Clint Mansell, Natalie Portman donne tout ce qu’elle a dans un enchaînement de scènes fulgurantes qui trouveront leur paroxysme dans la représentation finale. Vingt minutes d’un autre monde. Paranoïa et schizophrénie atteignent leur comble, le ballet s’écoule dans sa poésie visuelle la plus violente, le fantastique et l’horrifique s’entrechoquent alors que la composition de Tchaïkovski hurle… Franchement, si « Le Discours d’un Roi » et « Au-Delà » étaient les deux premiers grands films de l’année, « Black Swan » vient clairement d’un autre monde. C’est un chef d’œuvre.

 

 

 

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