Par Marco Polisson
Pas encore ouvert au public mais déjà à la polémique. La présentation à la presse du projet de restauration dans le grand réfectoire s’est révélée indigeste pour les amoureux du patrimoine.
Situé dans l’enceinte de l’Hôtel Dieu, ce lieu intemporel va accueillir à la fin de l’année une brasserie et un bar portés par les gérants du Hard Rock Café de Lyon, alliés à Marc Bonneton et un certain Emmanuel Sailer présenté comme « spécialiste de la gestion d’établissements hôteliers » sans que l’on en sache plus. « On n’a pas la chance de faire une première bonne impression » assure un dicton populaire…
Pour le grand réfectoire, c’est mal parti à en juger les commentaires lus ici et là.
Premier à réagir sur les réseaux sociaux, l’ancien adjoint à culture Patrice Beghain. Si l’on compare son actualité et son activité par rapport à celle de l’actuel adjoint (comment s’appelle-t-il déjà ?), on a le sentiment étrange que c’est toujours lui qui « vit » cette délégation. Il est certain qu’il n’aurait jamais accepté que le grand réfectoire soit dénaturé.
Dès le 3 juillet, il a sorti son carton rouge depuis son compte Facebook et ses mots, ciselés, vont à l’essentiel : « Le réfectoire de l’Hôtel Dieu de Lyon. Hier, demain…. avec ce commentaire savoureux de l’architecte du projet : « Nous avons dû travailler autour de différents éléments classés que nous ne pouvions pas enlever, comme les voûtes, les vitraux ou encore le carrelage. »
« Sûr que s’ils avaient pu « enlever » les voûtes, ils auraient pu donner libre cours à leur talent… » Patrice Beghain
En découvrant les images sur son post, les internautes ont surenchéri dans la dérision : « Encore un petit effort, un peu de mauve et ils vont pouvoir rivaliser, dans les petits jeux de massacre, avec le grand hôtel de Cabourg… » plaide l’un. « On dirait, on dit, on dira/ Une cafétéria verre au vin et prise électrique dans un aujourd’hui sans idées ni imagination » assure l’autre. « Très médiocre » conclut Mireille.
A coup sûr, on regrettera le fait que Jérôme Bocuse et Naxicap aient renoncé à y installer une brasserie. Leur projet eut été sans nul doute plus respectueux de l’histoire des lieux marqués par la présence multi séculaire des sœurs hospitalières qui y prenaient leur repas. Mais c’est justement la complexité de la tâche et l’impossibilité de rentabiliser qui les ont fait reculer .
Dans ces conditions, les banquiers du Crédit Agricole auraient dû réfléchir à une autre alternative : en faire une belle salle de réception.
Cette option aurait permis de conserver son intégrité à savoir ses voutes, ses vitraux et ses boiseries. Et aux Lyonnais de profiter pleinement de ce lieu emblématique. Mais la logique financière l’a emporté et le Grand Hôtel Dieu, déjà saturé de restauration, va se retrouver avec un énième gros porteur de 340 places assises, soit 400 couverts / jour à trouver et un investissement de 4,5 millions d’euros à amortir – pour mémoire, les travaux du Buddha Bar ont couté 2 500 000 euros – soit une échéance mensuelle qui avoisine les 60 000 euros. Auxquels il faut rajouter le loyer astronomique (entre 350 000 et 425 000€ + 100 000 € de charges selon plusieurs sources), les charges d’exploitation et de personnel…
Dernière info à relever : le chef exécutif chargé de concocter « la carte bistronomique » arrive tout droit du Monte Carlo Bay et se nomme… Marcel Ravin… Prémonitoire ?
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