Texte : Bernard Gouttenoire – Lorsqu’en 1976 la ville de Lyon invitait Jean Couty à exposer à l’Elac « le peintre et le format », Jean-Louis Maubant qui avait été nommé directeur du site de Perrache par André Mure, alors adjoint à la culture de Francique Collomb, donnait au Maître de l’île Barbe l’opportunité de s’expliquer sur le thème qui lui était si cher.
En effet, Couty s’est toujours exprimé par rapport à la dimension de son tableau, il disait à qui voulait l’entendre « Je compose de grands tableaux sociaux exaltant la misère et la grandeur des ouvriers ». La toile directement concernée par l’inspiration du Maître d’Ornans, Gustave Courbet « Les ouvriers » date de 1935. Jean Couty posait fièrement pour le catalogue tenant fermement la toile maîtresse.
Il imposait le format devenu majeur. Comme le sera plus tard (en 1941) la très grande toile imposante du « Bénédicité » (226 x 363 cm) présentée chez la fidèle Katia Granoff, galeriste réputée de la place Beauvau et du quai de Conti à Paris. D’ailleurs quand cette pièce fut installée dans la vitrine de la galerie parisienne, remarquée par Pablo Picasso lui-même, qui, devant un tel chef-d’œuvre, aurait dit à Jean Couty : « Aujourd’hui, on ne peint plus comme ça ». L’homme de « Guernica », voulait-il-dire que l’intensité de la prière était à son comble par la touche sévère de ces cinq sœurs réunies au réfectoire, pour le chant sacré du matin ?
Couty prit le compliment comme ça. Pour le peintre qui était un petit homme trapu (1m56), peindre de si grandes toiles était un vrai défi.
Je l’ai toujours vu peindre avec un petit marchepied complice devant lui. Il se sentait revivre littéralement car, selon lui, être peintre signifiait « donner la vie à l’espace ». Pour preuve encore ces toiles très expressives du début consacrées à sa famille. Elles sont carrément imputables au courant expressionniste, jadis et éternellement en vogue. C’est un genre confirmé qui se perpétue, d’artistes en artistes, de générations en générations.
Ce qui a très tôt, inscrit le nom de Jean Couty, parmi les peintres essentiels de l’histoire de la peinture lyonnaise contemporaine aux côtés de Jean Fusaro, André Cottavoz, Jacques Truphémus, Henri Lachièze-Rey, à Lyon, qui se sont, tour à tour, confrontés avec délice, aussi au format (ils ont osé se mesurer, à l’influence du grand peintre « nabi » Pierre Bonnard, en se targuant de « Sanzistes » en 1950).
Jean Couty poursuivra son œuvre passant par les vues de Lyon, les paysages de la Saône et également sa remarquable série (1960-1980) dédiée aux « Églises Romanes » de France. Puis ce seront les grands formats des buildings de New York et leur profusion de lumières enchevêtrées. Puis Couty, avec son épouse Simone feront le tour du monde. Les grandes toiles se succèdent, Venise, Khiva, l’Espagne, la Grèce où se côtoient dans des paysages tortueux, personnages et paysages où le peintre s’enivre de couleurs et de formes pures. Ces attributs qui feront, tout le sel merveilleux, de l’œuvre unique, le trait et le style, si particulier, de Jean Couty.
Exposition « Jean Couty en grand »
Jusqu’au 6 octobre 2024
Musée Jean Couty
1, place Henri Barbusse – Lyon 9
Tel 04 72 42 20 00
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