Texte : Margaux Nourry – (Actualisé le 4 mars 2025) – Après plusieurs mois d’incertitude, les choses se sont accélérées pour Pierre Orsi. Le chef quitte son vaisseau amiral du Chateaubriand, place Kleber et le Cazenove va tirer également le rideau. La fin d’une institution lyonnaise.

Il devrait tirer sa révérence, le 4 mars, après avoir reçu son chèque du Groupe Epicure, repreneur des murs et du fonds du restaurant gastronomique. Tandis que ses appartements privés se vident et que ses meubles prennent la direction du garde-meubles avant son déménagement dans un logement de l’autre côté de la place Kleber ce jeudi 27 février 2025, ce sera au tour du Cazenove de fermer ses portes demain, 50 ans après son ouverture.

En grand uniforme, col bleu blanc rouge et toque sur la tête, le chef Pierre Orsi donne le ton : « Il faut qu’il y ait une fin mais il faut qu’elle soit royale, glorieuse, pas en catimini. » « Ce n’est pas une question de lassitude », nous explique-t-il à une table du restaurant, mais plutôt d’opportunité, à la suite du départ de son maître d’hôtel et de son bras droit, 24 et 18 ans de maison.

« J’ai essayé de travailler avec des anciennes relations, des anciens employés mais je n’ai pas trouvé ce niveau de qualité »

« Alors, après mure réflexion, début février je me suis dit que j’allais fermer, ma femme, Geneviève, ne travaillant plus. » Plusieurs offres, de Lyonnais cette fois-ci, sont à l’ordre du jour pour le Cazenove, avec la promesse de ne rien changer à son décor unique, sans qu’aucun compromis ne soit encore signé. Une réponse est prévue fin mars, annonce Pierre Orsi.

L’émotion est présente dans les yeux des derniers clients du service du midi de ce jeudi 27 février 2025 comme Fabienne et Jean-Paul Lacombe, Denis de Benazé, fondateur de l’IDRAC Lyon (ci-dessous). Certains ont même les larmes aux yeux, les mains se serrent. Le chef prend le temps de remercier, saluer, dire au revoir. C’est une page qui se tourne pour Lyon, pour sa famille de 500 employés sur 50 ans, sur un cadre unique.

Mais c’est aussi la fin de la maison rose, « un conservatoire du bien-être, du bonheur, de la qualité », comme le décrit le chef. Mais pour le disciple de Paul Bocuse, l’heure n’est pas à la tristesse. Nostalgique, oui, mais « soulagé, rassuré et en paix d’avoir eu une belle vie et fait une carrière professionnelle avec passion ».

Avant de fermer les portes du Cazenove, le chef va s’offrir une dernière danse, un dernier service, ce vendredi 28 février 2025. « On fait nos adieux à la presse et à nos fidèles clients. » Avant de recevoir le résultat de sa vente, s’élevant à sept chiffres, le 4 mars prochain à Paris, et de s’adonner à un rythme de vie plus doux entre lecture, sport et moments en famille.Sans que la cuisine ne soit bien loin : « On m’a déjà réservé quelques manifestations dans des relais-châteaux. »

Vendredi 28 février – Midi

Son filleul Christophe Marguin a débarqué avec des copains chefs toques blanches (Olivier Paget, Dominic Moreaud, Laurent Bouvier) et des membres du CAFAL (Pierre Nallet et Maître Frédéric Gutton) et du Club des Clubs (Marc Jean) pour le service de midi qui s’est étiré dans l’après midi dans les rires et les volutes. Comme à la grande époque du Club des 10.

Vendredi 28 février – Soir

Salle comble pour la der des der. Les restaurant est archi booké, avec des visages connus (le chef Grégory Cuilleron, Vincent Le Roux, directeur général du restaurant Paul Bocuse), le patron des charcuteries Sibilia… et une foule de clients fidèles depuis des décennies (ci-dessus).

Mais aussi les baronnes de Lyon People Françoise Petit (ex Figaro Magazine) et Odile Mattei (ex France 3), ainsi que baronnette Laurette (correctrice de LP) sous la protection de leur gentleman body-guard Marco Polisson, rédacteur en chef du magazine préféré des gastronomes lyonnais (ci-dessus).

Séquence émotion au moment du discours d’adieu pour son directeur de salle Patrick Desmurs, en larmes, son adjoint Michel, tout comme sa secrétaire particulière Nathalie et tout l’équipage (salle et cuisine).

Lundi 3 mars – Matinée

Ce lundi 3 mars 2025, trois jours après une émouvante closing à laquelle nous avons eu le bonheur d’assister, comme si de rien n’était, le chef Pierre Orsi s’est levé aux aurores. Pour la troisième fois, il s’est réveillé à l’hôtel, et non pas dans son appartement qu’il a occupé pendant 40 ans, déménagement oblige.

Il a enfilé son tablier, et avec deux membres de sa brigade, entamé le nettoyage complet de la cuisine du Cazenove. « L’important, c’est de montrer l’exemple, et la transmission » nous a murmuré le chef de 85 ans qui a désormais plusieurs offres de reprise pour sa brasserie rose bonbon. Dans le cahier des charges du repreneur, l’engagement de conserver son décor unique. Ce soir, gros dodo, pour être en forme demain matin : direction Paris.

Bonus : Odile Mattei nous offre le discours du chef Orsi à l’occasion de son dernier dîner. Collector !