Texte : Morgan Couturier – Fondé avant Covid, le club de boxe du Barreau de Lyon ne cesse de gagner en licenciés. Dans leur antre confidentiel du sixième arrondissement, une vingtaine de licenciés profitent du noble art pour décompresser et mettre fin à l’isolement que suggère régulièrement cette profession.
Il n’est pas encore question de courir à travers les ruelles de Philadelphie, ni même de faire percevoir dans la rétine des licenciés, cet œil du tigre cher à l’indémodable Rocky Balboa. Et pourtant, le frisson du combat est bien là, planqué dans cet immeuble du 39 rue Lieutenant-Colonel Prevost, à l’intérieur duquel, une porte dérobée ouvre sur une véritable salle de sport.
Point de ring encore, bien que celui-ci soit en projet. Mais déjà des sacs de frappe et surtout des gants, preuves irréfutables de l’existence d’un club de boxe. Un club un peu particulier, au regard de sa composition. De son appellation aussi, ce dernier faisant explicitement référence au Barreau de Lyon. Qu’à cela ne tienne, l’antre laisse autant les chaussures des membres que leurs dossiers, sur le pas de la porte.
Les combats juridiques attendront, le temps d’exercices organisés chaque mercredi, entre 12h et 14h, sous la coupe du coach Kamel Benaibouche. « Le midi, c’est le seul moment où tu peux être un peu tranquille », vient justifier Edouard Duhen, fondateur de ce club ô combien singulier, où l’accès ne peut se faire sans inscription préalable au Barreau de Lyon. Néanmoins, pour cet avocat spécialisé en droit routier et en infractions routières, comme pour ses collaborateurs, la richesse de cette structure tient autant dans les bienfaits de ses sessions que dans la fabrication d’un lien social.
Outre la boxe, des sessions crossfit sont également organisées chaque vendredi
« Nous avons des métiers très stressants, assez solitaires, mais le fait de se retrouver, ça permet de se dire que l’on n’est pas tout seul », poursuit ce juriste de 36 ans, ravi de la création de cet intermède sportif, y compris lorsque la séance exige de se surpasser. « Je m’occupe bien d’eux (rires). Ils n’ont pas l’habitude qu’on leur parle comme cela. Mais c’est un bon concept », valide Kamel Benaibouche, seul occupant du complexe à ne revêtir aucune robe d’avocat. Son seul droit : faire suer les participants comme n’importe quelle personne. Et comme pour « Cloclo », le public semble aimer ça.
« L’idée, c’était de transmettre ma passion. Puis la boxe anglaise est devenue tendance. Alors quand j’ai commencé à lancer des initiations, tout le monde me disait : ‘‘c’est trop bien, ça déstresse’’. D’autant que la boxe, c’est quelque chose d’assez exigeant, qui correspond bien à la profession d’avocat », poursuit Edouard Duhen, une quinzaine d’années de pratique au compteur. Une manière de légitimer cette activité. De veiller au bon respect des règles aussi, alors que ce dernier aspire à lancer dès l’an prochain, « une sorte de championnat de France inter-barreaux ».
La boxe favorise les relations entre les différents barreaux
Une évidence, alors que le Barreau de Lyon s’en va déjà régulièrement affronter des confrères d’autres contrées. Notamment à Marseille, où le Barreau local est friand de quelques affrontements. Avec casque évidemment. Mais aussi et surtout, avec l’envie d’échanger, tout simplement. Sur cette passion commune, voire des dossiers, de temps à autre.
« La boxe vient créer des liens entre les barreaux », avance le président du club, friand de ces expéditions sportives. D’autant que depuis près de 3 ans, celui-ci ne court plus seul. Le monde appelle le monde et de nouveaux licenciés. « Au fil du temps, on pousse un peu les murs », se réjouit-il. Une première victoire pour le club. Ici, tous les avocats peuvent être appelés à la barre. Les licenciés peuvent déjà en témoigner, nombreux sont les bienfaits d’un petit crochet dans le sixième arrondissement.
Bravo maître Duhen !