Texte : Margaux Nourry – Controverses et débats de droit notarial à l’Université Jean-Moulin Lyon III autour de la loi du 31 mai 2024 sur la déchéance des avantages matrimoniaux en cas de violences conjugales et meurtre.
L’Association des étudiants de droit notarial (AEDN) de l’Université Lyon III, présidée par Victor Fradin, assisté par son vice-président Nino Filliol ainsi que la responsable du pôle Partenariats Juliette Reynaud, a organisé ce mercredi 2 avril 2025 un colloque du notariat portant sur le thème de « La loi du 31 mai 2024 dans tous ses états ». Il s’est tenu dans l’amphithéâtre Roubier de la Faculté, située quai Claude Bernard, et sous la direction scientifique du professeur Sylvie Ferré-André.

De gauche à droite, Maître Yves Delécraz (notaire), le professeur Sylvie Ferré-André et le professeur Frédéric Zenati-Castaing.
Étudiants, avocats et notaires ont assisté aux présentations d’éminents intervenants, à savoir les professeurs Michel Grimaldi, Frédéric Zenati-Castaing, Bernard Vareille, Sabine Mazaud-Leveneur, Nathalie Peterka, Gulsen Yildirim, Marc Nicod, Sylvie Ferré-André ainsi que Maître Yves Delécraz.
Éviter que l’époux meurtrier ne profite d’avantages matrimoniaux
Pour rappel, la loi du 31 mai 2024, appliquée à tous les contrats de mariage en cours, vise à davantage de justice patrimoniale. Concrètement, le texte prive l’époux condamné pour meurtre de son conjoint ou violences de ses avantages matrimoniaux, c’est-à-dire des clauses du contrat de mariage qui lui bénéficient lorsque l’autre décède ou en cas de divorce. Cette loi institue dorénavant une déchéance matrimoniale de ces clauses.
Avant cette ce texte, « le conjoint qui vient de tuer son partenaire est exclu de la succession de celui-ci : c’est le mécanisme de l’indignité successorale qui s’applique. Toute donation faite par son époux ou épouse à son encontre est également révoquée : c’est le dispositif de l’ingratitude qui s’applique. Mais la loi ne dit rien sur le sort à réserver aux avantages matrimoniaux. En l’absence de disposition expresse, l’époux meurtrier en conserve le bénéfice », rappelle Vie-publique.fr.
Une définition floue dans le droit notarial
Or d’après les professeurs intervenants, cette nouvelle loi est plus complexe que le texte précédent. « Le choix d’un mot aussi flou qu’avantage permet une réinterprétation des effets et ne donne pas de définition claire. Cela apporte une nouvelle dose d’obscurité c’est l’une des questions les plus importantes dans la loi car éminemment pratique. Ce sera à la jurisprudence d’éviter les divergences entre praticiens », expose le professeur Gulsen Yildirim.

Le professeur Michel Grimaldi, agrégé des facultés de droit, et Victor Fradin, président de l’AEDN de Lyon 3 et étudiant en Master 2 Droit notarial interne.
Une efficacité limitée
Par ailleurs, les professeurs en ont démontré les limites. « Quand on observe la loi de plus près, le législateur s’est éloigné de l’indignité. Le système unique de déchéance est plus simple et sévère, il n’est plus question de subtilité judicaire », atteste le professeur Sabine Mazaud-Leveneur. En effet, la notion de pardon présente dans l’indignité successive est aujourd’hui mise de côté.
« Une telle différence peut produire des conséquences pas toujours compréhensibles et nuire à l’efficacité recherchée, » poursuit le professeur. Concrètement, les avantages matrimoniaux tombent dans le régime de succession et des arrangements entre l’hériter et le conjoint condamné risquent d’être mis en place. Le professeur Sabine Mazaud-Leveneur conseille ainsi « une harmonie entre déchéance et indignité successorale ».
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