Texte : Christophe Magnette – Parmi la jeune génération, il est le plus capé. Le fruit d’une rencontre. “Ma grand-mère prenait des cours de cuisine, avec le chef, Christophe Muller. Un jour, je l’ai rencontré, par simple curiosité : il m’a incité à l’appeler, si j’en ressentais l’intérêt…”
Quentin Veyrat a dix-huit ans, un bac pro en poche (hôtellerie-restauration, option cuisine), passé à Challes-les-Eaux, une saison de deux mois en saison, dans les bottes (à Belle Plagne), et l’envie de gravir les échelons. “J’ai pris mon courage à deux mains et appelé le chef Muller : deux jours après, le lundi-matin, j’étais à Collonges. Avec une mise en garde très claire” :
« C’est pas parce que je connais ta grand-mère [sic], que tu auras un traitement de faveur. Si tu ne fais pas l’affaire, au bout d’une semaine, tu auras droit au même tarif que les autres, la porte ! »
Voilà comment, Quentin Veyrat (aucune filiation avec le célèbre chef haut-savoyard), découvre l’antre du restaurant de Paul Bocuse.
Nous sommes le 14 octobre 2014. La suite le met dans le bain, immédiatement. À cet instant, la période est (encore) rude, en bords de Saône. Le rythme est intense, la cadence, parfois infernale. Mais Quentin s’accroche. Aux amuses-bouches, le temps d’un trimestre, au garde-manger, l’histoire d’un semestre, puis “aux poissons”, durant… un septennat !
Un passage formateur. Avec de l’émulation et de la fraternité, c’est encore mieux. Le groupe des “trois” s’entraide : Maxime Delangle a quelques années derrière lui, mais Raphaël Garel n’a guère plus d’expérience que lui. Les trois sont soudés, se soutiennent. Ils grandissent, ensemble. L’après Covid offre un nouvel horizon à Quentin : saucier ! Une sacrée responsabilité pour qui connaît l’ADN de l’Auberge.
Toujours épaulé par Maxime, il écoute attentivement les conseils (avisés), du chef Olivier Couvin, “il me laisse assez libre, mais reste vigilant quant à la justesse de notre travail.” Quentin a les pied sur terre, bien posés. Son identité ? La campagne, Moras, village de cinq cents habitants, dans le Nord-Isère. La ruralité, il l’a quittée, mais promet d’y retourner, un jour.
Papa qui œuvre dans les travaux publics, maman, aide-soignante, lui ont appris le goût de l’effort. On l’a compris, ce garçon est (très) bien élevé, respectueux, reconnaissant. Avec le décès de Paul Bocuse, il a perdu un repère, un homme qui lui a ouvert les portes d’un univers exceptionnel. Alors Quentin, s’est fait tatouer, derrière son biceps droit : Monsieur Paul, les bras ouverts, son épitaphe, ainsi qu’un mot, “Merci !”
Avec des jeunes qui ont de la mémoire, le futur s’écrit au présent.
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