Texte : Morgan Couturier et Marco Polisson – Trois mois après l’acte de vandalisme perpétré et revendiqué par le collectif Riposte Alimentaire sur une toile de Claude Monet, les deux activistes étaient convoquées à la barre du Tribunal Correctionnel de Lyon. L’audience a été marquée par l’absence de représentants de la Ville de Lyon.
Un mois qu’elles s’étaient emmurées dans le silence, faisant fi de deux gardes à vue. L’intimité d’un commissariat n’a eu sur elles aucune portée. Trois mois après avoir jeté de la soupe sur « Le Printemps » de Claude Monet, au Musée des Beaux-Arts de Lyon, les deux activistes écologistes Sophie Brodt et Ilona Jelic, ont donc choisi leur moment. Et les bancs du Tribunal Correctionnel de Lyon pour s’exprimer.
Une chose est sûre, malgré leur jeune âge (23 et 20 ans, ndlr), les deux Lyonnaises, déjà bien rompues à l’agit-prop écolo-gauchiste n’ont pas choisi de se démonter. Bien au contraire. Toutes deux sagement vêtues d’un chemisier, elles ont ainsi profité de l’attention de Brigitte Vernay, la présidente du tribunal pour revendiquer leur geste. Sans le regretter.
« On a fait une action qui permet d’avoir une attention médiatique. C’est grâce à l’importance de ce tableau que l’on peut avoir des caméras qui se tournent vers nous », se défendit ainsi Sophie Brodt, la plus loquace des deux, déjà condamnée pour un blocage d’autoroute le 4 août 2023 (300 euros d’amende) et engagée auprès du collectif Riposte Alimentaire, après s’être informée « pendant plusieurs années sur la crise climatique ».
Aucun regret exprimé par les deux accusées
« Les choses avancent très lentement. Même les scientifiques nous invitent à la désobéissance civile. Tous les professeurs avec qui j’ai échangé m’ont donné leur soutien », poursuivit cette étudiante… aux Beaux-Arts de Lyon, en interpellant la présidente du tribunal. « Le tribunal n’est pas une tribune, mais un endroit où l’on vous juge », rétorqua-t-elle, sans toutefois mettre à mal les accusées.
« On le voit avec le nombre de journalistes présents aujourd’hui, ce procès nous permet de nous exprimer sur le sujet. Il nous reste que peu de temps pour réagir », répliqua Sophie, droite dans ses baskets. « Et le cadre légal, ce n’est pas important de le respecter ? », souleva néanmoins la juge, suscitant un léger bégaiement des deux jeunes femmes.
Vint alors l’opportunité d’aborder le sujet principal de ce procès : la dégradation du tableau de Claude Monet, perpétrée le 10 février 2024. Car si la toile n’a manifestement pas été touchée, le cadre aurait lui, fait les frais de la soupe envoyée par les deux militantes (avec un devis estimé à 2200€), et ce, malgré l’installation d’un caisson de protection. Un équipement qui, selon la défense, aurait justifié le passage à l’acte.
« On a choisi le tableau de Monet car il était protégé. Notre objectif n’est pas de dégrader l’art, bien au contraire », dixit Lola, jeune militante pour l’instauration d’une « carte vitale alimentaire de 150€ ». Un point encore appuyé par leur avocate Laurène Griotier qui n’a pas manqué d’amuser la galerie avec ses propos lénifiants et culpabilisants.
« Ce sont deux filles pleines de courage. Moi-même, je n’agis pas, je suis venue en voiture. Et elles me mettent face à ma triste réalité. Je vous invite à voir leur courage. Derrière l’œuvre, le Printemps, il y a un message : si on n’agit pas, ce sera notre dernier printemps et les peintres n’auront rien à peindre », revendiqua l’une d’elles, dans des propos qui trouveront écho auprès de la mairie écologiste.
Une action implicitement cautionnée par la mairie ?
Et pour cause, si cette dernière s’est constitué partie civile, aucun membre de l’exécutif n’a daigné se joindre au procès, Grégory Doucet se contentant d’une lettre transmise à la justice, où ce dernier évoque « un cadre d’une grande valeur artistique » et d’un geste qui suscita « un déferlement médiatique ».
Une posture qui laisse encore à penser que l’édile de Lyon cautionne pareille action, ce dernier ayant parlé « d’angoisse légitime » en février dernier, à l’heure de « condamner » ce geste. La ridicule demande d’un euro symbolique en dommages et intérêts, en est la preuve.
À l’inverse, le procureur de la République Alain Grellet fut lui, plus véhément. « Une œuvre artistique est protégée par la loi. L’égoïsme de votre action a fait omettre d’autres causes. Si la toile n’a pas été dégradée, c’est indépendant de votre volonté », souligne l’homme de loi, celui-ci interpellant sur cette « infraction caractérisée qu’est la dégradation de l’accès à l’art ». De quoi justifier selon lui, une peine de deux mois avec sursis.
Ce à quoi la défense a choisi de riposter, pointant « une gravité relative du dommage », avant de réclamer une relaxe basée sur la liberté d’expression, « avec une action symbolique et de solidarité ». « Ce moyen d’expression a un sens. On est plus ému par ce jet de soupe que par la réalité. Une condamnation serait disproportionnée. Elles ont agi pour le bien commun ». Sur ce point, chacun se fera son avis. Celui du Tribunal Correctionnel lui, sera rendu le 18 juin !
Des sdf qui volent pour se nourrir sont condamnés pour vol alors pourquoi seraient-elles relaxées au seul motif qu’il n’y a pas eu dommage ?
si elles s’étaient attaquées aux découpages de Jean Marc R .elles auraient eu moins de médiatisation .
Il faut maintenant prendre des sanctions sévères, ce genre de manifestation est inadmissible.
Dégrader l’art pour la planète est-ce concevable ?
Mais carrément !
La preuve : ça vous bouscule, vous êtes tout chiffonné.
Quand on s’indigne pour un acte si peu destructif, non violent et seulement subversif, mais qu’on détourne le regard sur les causes qu’ils défendent, cela peut signifier deux choses (compatibles entre elles en plus !) :
1. vous vous trompez de combat
2. vous n’y comprenez rien à l’art, son histoire et surtout, ses objets
Au lieu de réclamer des sanctions « sévères », et si vous méditiez sur le sujet… en profondeur je veux dire ? Histoire de travailler votre sens de la nuance.