Texte : Philippe Lecoq – On se rend chez Abel comme on se rend à l’office. A l’office religieux bien sûr, pas dans la pièce qui jouxtait la cuisine des grandes maisons et qui porte comme un clin d’œil le même nom.
Un office religieux célébré dans une église romane encore habillée de vieux bois et de stuc où la messe se dirait toujours en latin – non, pas en latin de cuisine ! – à la recherche de parfums, d’odeurs, d’émotions connues plus jeune quand grand-père ou papa nous emmenaient déjà au même endroit.
On se rend chez Abel comme on entreprend un voyage et non un pèlerinage.
Car si l’adresse est mythique – on cherche toujours Galabru derrière le petit comptoir en zinc – si aucuns travaux depuis 1926 n’est venu saccager les superbes plafonds à la française, les parquets, les boiseries des murs ou les tentures bordeaux, le lieu est diablement vivant, actuel, cosmopolite et gai, dans un paradoxe étonnant et réconfortant.
La carte pourtant n’a pas bougé d’un iota en quarante-six ans. La quenelle de brochet – réputée dans le monde entier – est la seule de Lyon « faite maison » oubliant au passage le Poêlon ou chez Brunet. Mais on lui pardonne vite en dégustant l’incroyable poulet aux morilles ou encore le fabuleux gratin d’écrevisses.
Les chefs de cuisine sont les seconds qui ont pris du grade ; Sonia la directrice de salle semble là depuis toujours ou du moins depuis Marie-Danielle ; et le personnel en effet ne ressemble en rien à un parterre de gardiens de musée. Résultat, une sorte de Kouro Sivo (courant chaud) vous prend sous la voûte d’Ainay et vous berce jusqu’au repas suivant, léger celui-là, forcément léger comme dirait Duras.
Café Comptoir ABEL
25, rue Guynemer
69002 Lyon
Tél. 04 78 37 46 18
Tres belle adresse où nous nous sommes regales hier soir. Accueil sympa et cuisine lyonnaise au top ! Merci