Propos recueillis par Caroline Auclair
On est loin de l'univers de l'avenue Bosquet, siège du Medef national. Le bureau du président du Medef du Rhône détonne. Si Laurence Parisot a choisi un mobilier design en plexi dans son QG présidentiel, Bernard Fontanel a opté pour le minimalisme. Nul tableau accroché au mur, une sobre table ovale en marbre fait office de bureau. Visite.
Qu'avez-vous changé au sein de ce bureau depuis votre prise de fonction ?
Rien n'a changé. J'ai gardé la table d'Hervé Laurent, -ancien président du Medef, NDLR-. La seule chose qui m'énerve, c'est qu'elle branle un peu. Tout ça reste très secondaire pour moi. Je ne suis pas un président de bureau. C'est au sein de mon autre bureau, chez Fontanel, que j'ai réuni quelques objets personnels dans une vitrine.
Connaissez-vous le bureau de Laurence Parisot ?
Non, je ne le connais pas. J'ai déjeuné deux fois avec elle à Lyon, une fois à Paris, rue Bosquet -siège du Medef-, mais ne suis jamais allé dans son bureau.
Comment partagez-vous votre temps entre la présidence du Medef et votre entreprise de bâtiment ?
Depuis que j'ai transmis l'entreprise à mes fils, Norbert et Josselin, -Gérald, le troisième est promoteur-, il y a 7 ans, je suis président du conseil de surveillance. Depuis que je ne suis plus président de la Fédération du Bâtiment, je suis la plupart du temps au Medef. Je ne me lève plus pour chercher du travail mais pour mettre les gens au travail. Aujourd'hui, l'entreprise Fontanel a gagné en notoriété. Ma plus grande fierté, c'est de n'avoir jamais conduit un exercice déficitaire. Et depuis 98, la croissance est continue.
Pourquoi avez-vous souhaité prendre cette fonction ? Est-ce bénévole ?
J'avais tout d'abord dit « non » à Hervé Laurent et à Bertrand Millet -précédents présidents-, Mais la porte restait grande ouverte. En fait, j'avais envie de trouver du temps pour moi. Lorsque j'étais maire de Quincieux, je travaillais le samedi matin. Et le lundi matin je réunissais les adjoints. Il y a deux ans, j'ai eu le sentiment qu'un patron de PME pouvait rassembler. La première année a été riche en découverte. Aujourd'hui je favorise les contacts. Quant à ma fonction, je vous rassure, elle est entièrement bénévole. Elle me coûte même.
Qui forme la garde rapprochée de votre état-major ?
Les présidents de branche, la présidente des GED (Groupe des entreprises diverses soit 400 entreprises), les présidents de commissions, le directeur Général. C'est important car le Medef travaille sur des dossiers de fond qui reposent sur un vrai travail de documentation et d'information qui nécessite beaucoup de compétences. Le recrutement de nos adhérents ne s'exerce pas sur les branches, -métallurgie, chimie, BTP …-, c'est ce qui nous différencie de la CGPME. Qui connaît le nom du président national de la CGPME alors que tout le monde sait qui est Laurence Parisot. Mais je suis conscient que le pays a besoin de deux organisations professionnelles. Je ne suis pas François Turcas. Je ne suis pas jaloux. Il occupe parfaitement l'espace.
Avez-vous un poids dans la prise de décisions au bureau national ?
Très peu de poids. Dans le Rhône, nous sommes totalement indépendants mais nous pouvons nous appuyer sur le Medef national. Je n'appelle jamais Laurence Parisot et Frédéric Favre – son DG, NDLR – non plus.
Êtes-vous favorable aux primes et autres parachutes accordés aux grands patrons ?
J'ai le sentiment que tout ça est totalement excessif et que ça bouscule l'échelle des valeurs. Mais il faut rappeler que ces grands patrons ont des salaires excessifs comme les acteurs du show-business ou les sportifs. C'est choquant mais les grands groupes souhaitent attirer les meilleurs. Et s'ils ne respectent pas le contrat, ils vont aux prudhommes. En revanche, je ne suis pas d'accord, qu'en cas d'échec, le dirigeant parte avec de l‘argent. Mais saviez-vous que la moyenne des revenus des patrons français n'est que de 4400 euros ?
Le système d'attribution des stock-options doit-il, selon vous, faire l'objet d'une loi ?
C'est une autre forme de contrat avec le salarié. Le principe n'est pas mauvais, mais ce sont les abus qui sont à condamner.
Comment allez-vous essayer d'améliorer l'image dégradée des patrons ?
Je préfère ne pas répondre aux attaques. Pour moi, les critiques restent infondées. 95% des patrons sont dévoués et travailleurs. Jaurès avait dit : « les patrons sont des gens courageux, il est normal qu'ils soient récompensées ». Je me suis moi-même trouvé dans une situation difficile en 1998, j'ai réussi à ne débaucher personne.
Faites-vous une différence entre le patron salarié et le patron créateur d'entreprise ?
Non, dans les grandes entreprises, il y a des patrons qui sont de vrais cracks. J'en connais certains…
Quelle est la part de petits patrons – TPE et PME – au Medef du Rhône ?
Il ya 85% de petits patrons contre 90 % au Medef national. La vision est brouillée car chacun a en tête l'image du Medef lorsqu'il monte au créneau pour des accords nationaux. Et puis l'image d'Ernest Antoine Seillière reste ancrée dans les esprits. On avait besoin de lui durant la première partie de son mandat. Après, il a été trop présent sur le champ politique.
Comment vous positionnez-vous par rapport à la CGPME ?
J'ai de très bonnes relations avec la CGPME. Je connais François Turcas depuis 1975. A l'époque, nous avions des relations commerciales alors qu'il était patron de SODAP. On essaie de se mettre le plus souvent possible d'accord. Les prudhommes se sont bien passés. J'ai obtenu ce que je voulais. Quant aux élections à la CCI, nous avons conclu un accord de dix ans.
Pourquoi êtes-vous si discret ?
Vous trouvez ? Pourtant je sors un peu plus qu'avant. J'ai été maire pendant 13 ans et auparavant j'étais adjoint au maire. Depuis 1975, j'ai des fonctions au BTP du Rhône. J'ai toujours eu beaucoup d'intérêt pour mes mandats. Plus qu'être discret, je m'efforce de travailler sérieusement. Et aujourd'hui je poursuis mon mandat de 3 ans.
Quelles sont vos occupations favorites lorsque vous ne travaillez pas ?
J'aime jouer à la Lyonnaise, même si ça arrive de moins en moins souvent. Je joue entre 15 et 20 fois par an au golf, souvent à la Tour de Salvagny. Je skie moins à cause de mon genou. J'aime suivre l'Olympique lyonnais. Je m'y rends encore quelques fois même si je laisse de plus en plus mes places à mes fils.
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