Propos recueillis par Morgan Couturier – Depuis le 1er janvier 2023, le Crédit du Nord et ses entités régionales, dont fait partie la Banque Rhône-Alpes, ont fusionné avec la Société Générale, pour donner naissance à une nouvelle banque, baptisée SG. Nommé délégué général du groupement SG Auvergne Rhône-Alpes, Didier Pariset en profite pour dresser le portrait d’une entité amenée à être au plus proche de ses clients. Si une telle mutualisation n’impliquera que peu de changements pour les adhérents, celle-ci entraîne toutefois l’abandon du siège historique de la Banque Rhône-Alpes, autrefois campé sur le cours Lafayette. Place à une nouvelle aventure, dessinée autour du quartier de Gerland. Non sans émotion, mais avec de grandes ambitions. Explications.
Lyon People : Depuis quelques jours, la Banque Rhône-Alpes et la Société Générale ne font plus qu’un. Pourquoi ce rapprochement ?
Didier Pariset : Pour être tout à fait précis, ce rapprochement dépasse le cadre même de la Banque Rhône-Alpes, puisqu’il concerne toutes les entités du groupe Crédit du Nord (soit la banque Nuger et Laydernier dans la Région AURA), lesquelles ont rejoint la Société Générale au 1er janvier. La raison ? C’est d’abord un projet mûrement réfléchi sur lequel nous travaillons depuis plus de deux ans. Il a été coconstruit par quelque 2000 collaborateurs des deux enseignes, de façon à ce que l’on soit vraiment au plus près des problématiques des territoires pour construire le modèle de notre nouvelle banque.
Cette décision n’est donc pas motivée par des raisons économiques ?
L’ensemble des entités du Crédit du Nord sort de très bons résultats et est rentable depuis de très nombreuses années. Leur avenir était assuré. Il n’y a donc pas de difficultés économiques spécifiques. Mais il y a le poids du contexte réglementaire (et des conformités aux directives de la BCE) qui fait que la taille critique du groupe Crédit du Nord était insuffisante pour mutualiser les coûts. Ces derniers devenaient de plus en plus lourds au niveau des banques et mobilisaient un nombre de personnes de plus en plus important. Tout cela nous obligeait à avoir une base de clients très large pour pouvoir amortir ces coûts liés au réglementaire.
Il est même question d’investir massivement ?
Oui, les investissements sont très importants, notamment dans le digital. Aujourd’hui, le canal digital est devenu incontournable. Mais jusqu’à maintenant, le groupe Crédit du Nord et la Société Générale avait deux systèmes d’informations différents. Nous étions obligés de développer deux fois nos applicatifs digitaux. Désormais, en ayant tout regroupé sur une même plateforme informatique, on va davantage concentrer nos investissements sur un seul système d’information, ce qui coûtera évidemment moins cher.
Une migration progressive, conclue au mois de mars prochain
Comment s’organise le regroupement de deux banques aussi influentes ?
Il y plusieurs sujets. Il y a d’un côté le sujet juridique et de l’autre, un sujet technique, mais également un sujet culturel. D’un point de vue juridique, il y a toute une série d’autorisation à obtenir des instances de tutelle, de la Banque de France ou de la BCE, pour faire en sorte que les entités du Crédit du Nord fusionnent avec la Société Générale. Il y a toute une préparation pour mener à bien ces modalités juridiques.
Qu’en est-il de la partie technique ?
Une telle fusion demande que nous prenions les 2 millions de clients du Crédit du Nord pour les basculer dans le système d’information de la Société Générale. Il y a une migration informatique qui concerne des millions d’opérations par jour, le transfert des crédits ou des épargnes de nos clients, mais aussi le transfert de nos collaborateurs pour qu’ils puissent opérer dans ce système d’information. Cette partie technique va donc s’organiser en deux vagues. Pour la première, toutes les entités du Crédit du Nord dans la région AURA, vont migrer le 11 et 12 mars 2023. Toutes les autres migreront, elles, mi-mai.
D’un point de vue culturel, le groupe Crédit du Nord avait rejoint le groupe Société Générale en 1997. L’histoire se répète ?
Jusqu’à maintenant, même si le Crédit du Nord était dans la Société Générale, il s’agissait encore de filiales. Là, la différence, c’est que les entités juridiques du Crédit du Nord ont disparu au 31 décembre. Elles se sont fondues dans la Société Générale.
La Société Générale avait-elle déjà une certaine influence sur les prises de décisions et le fonctionnement du Crédit du Nord ?
Nous étions comme une filiale, mais une filiale détenue à 100%. Donc bien-sûr, dès que vous êtes actionnaire unique, vous avez votre mot à dire. Pour autant, nous avions un système d’information distinct et des produits, une tarification ou des procédures différents.
Ce fonctionnement est désormais révolu…
Tout à fait. La nouvelle banque, c’est désormais un seul siège, un seul réseau et on l’a dit, un seul système d’information.
De cette fusion nait une nouvelle entité baptisée SG. C’est un peu, une manière déguisée d’écrire Société Générale ?
Oui, vous avez raison. Nous avons voulu marquer deux choses. Désormais, chaque marque régionale est composée d’un préfixe SG qui rappelle son appartenance au groupe Société Générale. A côté de cela, nous aurons une référence à la zone géographique, soit à un nom d’une ancienne entité Crédit du Nord. Dans les Hauts de France, nous aurons donc SG Crédit du Nord, quand nous aurons ici : SG Auvergne Rhône-Alpes.
Des suppressions de poste, mais aucun départ forcé
Vous teniez à créer un trait d’union entre le passé et le présent ?
Exactement ! Nous voulions aussi faire un trait d’union entre un grand groupe bancaire international et une déclinaison régionale dans des régions davantage autonomes et plus proches de leurs clients. Les décisions se feront ainsi au plus près de ces derniers. L’objectif est de régionaliser l’ensemble. Le Crédit du Nord était une fédération de banques régionales. Le réseau Société Générale était lui, très monolithique avec la même marque de partout. La réunion des deux se veut être un système intermédiaire. Il y a une proximité plus importante, tout en conservant ce qui faisait la force de la Société Générale, soit la dimension internationale et les moyens financiers qui sont beaucoup plus importants de ceux du Crédit du Nord. Là, on change de dimension !
Quelles sont les conséquences de ce regroupement sur vos collaborateurs ? Sont-ils tous conservés ?
Nous allons regrouper les agences qui sont très proches les unes des autres. Il n’y aucun intérêt à garder deux agences qui soient côte à côte. Cela correspond à peu près à 30% de nos agences. En parallèle, nous allons mutualiser un certain nombre de fonctions, qui correspond plus ou moins à 3700 postes. Néanmoins, ce qui a été affirmé, c’est qu’il n’y aura aucun départ contraint sur les trois années que nécessite la mise en place de cette nouvelle banque. C’est un engagement très fort de la direction générale de cette nouvelle banque.
Dès lors, comment allez-vous procéder ?
Il y a un certain nombre de départs naturels. Nous avons plus ou moins 1500 départs par an au niveau des deux réseaux. En 3 ans, cela représente près de 4500 départs sans diminution de postes. Pourtant, il est vrai, ceux qui partent ne sont pas forcément ceux qui voient leur poste être supprimé. Il y a donc un gros effort de mobilité fonctionnelle et géographique. Nous plaçons de très gros budgets pour permettre aux personnes qui ne sont pas mobiles, de rester dans leurs zones, en changeant de métier. Il va de même pour la mobilité géographique. Il peut avoir des besoins en région parisienne par exemple. Ces postes seraient proposés en priorité à des personnes dont le poste est supprimé.
Près de deux millions de clients garnissaient les rangs du Crédit du Nord. À quels changements doivent-ils s’attendre ?
Pour commencer, ils vont changer de banque. Ils vont conserver leurs agences, leurs conseillers, mais ils vont changer de RIB par exemple. Tout cela, va se faire automatiquement. Les clients vont pouvoir continuer d’utiliser leurs moyens de paiement.
Que vont devenir leurs actifs, leur carte de crédit va-t-elle changer ?
Oui, mais de manière très progressive. Ils peuvent continuer à utiliser leur carte actuelle, leur chéquier. Il y aura automatiquement un reroutage des opérations sur les nouveaux comptes. De la même façon, ils continueront à recevoir les virements de leur mutuelle, de leur employeur ou d’être prélevés comme c’était le cas jusqu’à présent. Les clients de la nouvelle banque SG seront très largement accompagnés. Le vrai seul changement pour eux, c’est le changement d’identifiant pour se connecter à la nouvelle banque.
De la même façon, un client ayant engagé un prêt dans une des banques du Crédit du Nord conservera-t-il les mêmes conditions ?
C’est toute la difficulté de cette bascule informatique. C’est pour ça que nous la préparons depuis deux ans, mais bien-sûr, toutes les conditions tarifaires doivent se retrouver dans la nouvelle banque. Tout cela a été vu par nos juristes. 90% des produits seront tellement repris de manière identique qu’il n’y aura pas besoin de refaire signer quoi que ce soit, aux clients. Nous sommes même allés jusqu’à recréer certains produits qui n’existent pas dans la nouvelle banque pour que nos clients puissent continuer de les utiliser. Ils ne seront plus commercialisés, mais les clients concernés pourront continuer d’utiliser les anciens produits du Crédit du Nord.
Fermeture de près de 60 agences dans la région de façon à éviter les doublons
Combien d’agences sont concernées par ce réaménagement sous l’enseigne SG ?
Toutes, puisque les agences Société Générale vont elles aussi, voir leur nom modifié. On a vraiment vocation à changer toutes les enseignes. En Auvergne Rhône-Alpes, ce sont ainsi près de 280 sites qui seront concernées.
Doit-on s’attendre à la fermeture de certaines d’entre elles ? Combien ?
Comme évoqué précédemment, cela concerne près de 30% de nos agences, soit près de 60 agences. Mais ce n’est pas vraiment fermé. C’est plutôt regroupé. L’engagement très fort que nous avons pris, c’est que nous quittons aucun territoire. Dans n’importe quelle commune où il existe une agence Banque Rhône-Alpes soit Nuger soit Société Générale, il existera toujours une agence, même après la fusion. Nous, nous ne gérons que les doublons.
Parmi elles, il y le cas de l’agence du cours Lafayette…
On va garder l’agence. On va la regrouper avec une agence Société Générale que l’on connait peu, car elle est peu visible de l’extérieur. Celle-ci est au pied de la tour Britannia. C’est cette dernière qui va être fermée. Nous allons la regrouper avec l’agence du cours Lafayette.
Pour autant, près de la moitié de l’immeuble Banque Rhône-Alpes du cours Lafayette, soit 5 400m2, ont été cédés à 6e Sens Immobilier… Pourquoi abandonner votre siège historique ?
Nous avons vendu la participation que nous avions. Nous étions propriétaires à hauteur de 49% de cet immeuble dit « Banque Rhône-Alpes ». On sera donc locataire de l’ensemble et en particulier du rez-de-chaussée, qui a vocation à être conservé de façon pérenne pour avoir une agence SG Auvergne Rhône-Alpes. Quant aux étages supérieurs, ceux du siège de la Banque Rhône-Alpes, ils ont vocation à être libérés.
Vous changez d’adresse. Où se situe le siège de la banque SG Auvergne Rhône-Alpes ?
Nous avons choisi les Jardins du LOU (à proximité du stade Gerland, dans le 7e arrondissement, ndlr) où nous avons déjà le siège actuel de la délégation régionale de la Société Générale. Nous occupons un immeuble entier d’un peu plus de 4000m2, sur quatre niveaux, dans lequel nous comptons près de 300 personnes.
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