Par Benjamin Solly et Marc Polisson
Il y avait beaucoup d’humilité chez Christian Têtedoie mardi matin, lors de la présentation de son nouveau restaurant lyonnais, baptisé « Les Salins », en lieu et place de la « Rue Le Bec ». Aux côtés de ses trois associés, le chef étoilé a détaillé sans forfanterie son projet culinaire. Ouverture prévue le 18 septembre.
Ambiance de lendemain de fête à l’intérieur de feu La Rue Le Bec mardi matin. Où plutôt de lendemain de défaite. Quelques employés, l’air hagard, dévissent les dernières plaques qui portent la marque du chef exilé à Shangaï, après un départ tonitruant cet été. De petites mains jaunes s’échinent à effacer le reliquat de leur ancien patron, dans un silence de cathédrale.
A l’étage, Christian Têtedoie, le traiteur Franck Sucillon, Stéphane Fioc (ex-associé de Stéphane Cassez dans le Boui-Boui et gérant du nouveau resto du Double Mixte) et Frédéric Sartou (associé dans Flat 69) attendent la presse. Le quatuor, disparate sur le papier, s’est lancé un double défi : relancer la cuisine traditionnelle de brasserie pour une ouverture du nouveau restaurant le 18 septembre. Leur offre de reprise, d’un montant de 100 000 euros, a été validée par le tribunal de commerce le 28 août dernier. Un timing serré.
« Nous proposerons des plats classiques mais avec beaucoup de fantaisie dans la mise en assiette », rapporte Têtedoie qui jouera le rôle de conseiller culinaire en confiant le piano à son second. Une boulangerie et sandwicherie de luxe sont également dans les tuyaux, avec un pain fait maison. Le brunch du dimanche, sur la même formule à 49€, sera revisité mais conservé. Ticket moyen visé pour la brasserie : entre 25€ et 45€ par personne, pour 300 couverts par jour, avec des formules à 18€ et 24€ à midi, contre un menu unique à 39€ le soir. Les associés visent un chiffre d’affaire de 4 millions d’euros annuels, pour un montant d’investissement estimé à 400 000 euros.
Ce défi d’une cuisine de brasserie, chaleureuse et roborative, constituait à l’origine le projet de Nicolas Le Bec. « Nicolas était un passionné de cuisine gastronomique, reconnait Têtedoie. Chef de brasserie, c’est un autre métier », tacle-t-il. Une inclinaison au grandiose symptomatique du précédent locataire, peu en phase avec les réalités économiques. « Le Bec était un amateur de beaux produits qu’il faisait venir de Rungis, rapporte-t-il, sans les vendre au juste prix. »
Virage à 180° donc pour la nouvelle équipe, qui se définit comme « prudente et peu dépensière. » Franck Sucilllon a déjà identifié des postes de dépenses à mieux maîtriser : « les produits d’entretien, la consommation d’électricité… » Côté personnel, 39 des 49 salariés ont été repris. « Il ne nous apparaissait pas indispensable de conserver le poste du père de Nicolas Le Bec, de son épouse, du voiturier, de la lingère », explique, acide, Têtedoie. Et si les quatre associés ont assuré le règlement des soldes de tout compte des salariés abandonnés par leur ancien chef, ils ont également eu mis la main sur des montages contractuels parfois douteux entre Le Bec et ses salariés étudiants étrangers.
Quid du quiproquo sur le projet initial de cabaret, brocardé par le sénateur-maire de Lyon Gérard Collomb ? « Une incompréhension totale », s’amuse Sucillon. « Il y a eu une confusion entre un projet que nous partageons également tous les quatre, sur un projet de cabaret, baptisé le Magic Hall, détaille-t-il. Mais nous menons ce projet dans l’Ain ! » Une porte de sortie toute trouvée pour clore la polémique, même si Gérard Collomb s’impose – de facto – comme le 5e associé. Il se murmure que le nom du restaurant, Les Salins, a été choisi par Collomb lui-même. « Nous avons proposé, il a disposé », explique un brin gêné Christian Têtedoie.
Preuve que c’est bien l’édile lyonnais qui fixe le cap du paquebot confluence.
On attend avec impatience de savoir qui osera dire la vérité et lever le voile sur ce qui est l’une des plius grandes escroquerie du siècle à Lyon. De la position étrange du pool d’investisseurs de la Rue Le Bec aux pertes cumulées de l’argent public (et des épargnants) via la CNR et la Caisse des dépôts, propriétaire de la Caisse d’Epargne. Et GG, dans tout ça, cappo di tutti ? Il y a fort à parier que l’affaire sera étouffée !