Cette actuelle Biennale de Lyon est l'objet de jugements très sévères dans toute la presse aussi bien locale que nationale. On constate cependant que ces critiques, aussi dures soient- elles, se gardent bien d'aller ni au fond, ni sur les abords.
Il serait pourtant utile, d'aller au-delà de ces jugements esthétiques de surface- s'appliquant d'ailleurs à des œuvres faites pour échapper justement à tous les critères artistiques – pour apporter des éléments d ‘information et de réflexion sur les facteurs extra-artistiques de la manifestation, sur sa logique interne, sur le fonctionnement de l'appareil qui la produit, sur ses enjeux divers, sur la balance entre ses aspects positifs et négatifs, sur ses bienfaits comme sur ses méfaits.
Des « bienfaits « de la Biennale
On oublie toujours de dire que la Biennale est avant tout une opération de communication pour la ville de Lyon et pour les sponsors et, qu'en l'occurrence, toute évaluation en termes artistiques est sans objet, puisque c'est l'efficacité médiatique-économique qui compte. Or, à ce seul et principal point de vue, force est d'admettre que la Biennale est une réussite : les journalistes du monde entier sont venus nombreux, le public est encore plus important qu'en 2005, les subventions publiques investies, sont immédiatement et amplement rentabilisées en retombées économiques diverses. Inutile donc de déplorer telle ou telle « médiocrité », d'autant, c'est bien connu, que tout ce qui est consternant, scandaleux ou catastrophique est médiatiquement payant. Reconnaissons plutôt, qu'en termes de com', cette opération a bien des vertus.
De ses méfaits
Mais cette réussite a bien entendu ses revers , dont on ne parle pas non plus…Le principal étant de donner, fort de ses succès médiatiques, une sorte de toute puissance au directeur-concepteur de cette biennale, qui renforce ses réseaux, qui dicte ses choix esthétiques aux politiques reconnaissant leur inaptitude en la matière, qui juge abruptement de ce qui est « contemporain » ou pas, qui disqualifie allègrement la plupart des artistes et des diffuseurs d'art de la région, qui occulte l'existence d'une bonne cinquantaine de très respectables galeries prospectives à Lyon et Rhône Alpes, qui impose aux responsables culturels de la ville une pensée unique au détriment de la diversité créative et d'un développement culturel véritablement ancré dans la cité.
Ainsi, pour quelques bénéfices éphémères, la ville de Lyon a-elle, avec cette opération de prestige, vendu son âme au Diable médiatico-économique… Mais quelles pertes pour l'art, pour la culture, pour l'humain, pour la poésie, pour le Sens !…Et puis, à terme, pour une ville que se voudrait capitale européenne de la culture en 2013!
Par Pierre Souchaud
Directeur du magazine d'art Artension, le 10 octobre 2007
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