Implantée à Bordeaux depuis 1890, la célèbre école de "Santé navale", dont la fermeture a été décidée dans le cadre du plan de modernisation de la Défense, a formé des centaines de médecins de la Marine, contribuant notamment au développement de la médecine tropicale en France.
L'Ecole de service de santé des armées (ESSA) de Bordeaux, historiquement destinée à la Marine pour des missions outre-mer, va fusionner en 2011 avec l'ESSA de Lyon, implantée à Lyon-Bron (photo ci-dessus). "Je tiens à exprimer mon profond regret et ma grande déception devant cette décision", a déclaré au cours d'une conférence de presse, Alain Juppé, le maire de la ville, soulignant que "c'est une partie du patrimoine historique, culturel et universitaire (de la ville) qui s'en va". C'est l'un des premiers élèves de l'école, Alexandre Le Dantec, qui fonda en 1891 la chaire de médecine tropicale à la toute jeune faculté de médecine de Bordeaux, donnant ainsi à la ville son avance et le début de son audience dans cette discipline alors méconnue. La prestigieuse école, qui a formé d'illustres élèves tels que l'écrivain et ethnologue Victor Segalen, a continué de cultiver sa spécificité, comme la médecine en situation extrême, qu'il s'agisse d'environnements tropicaux ou hostiles (nucléaire, biologique, chimique), des situations d'urgence, de catastrophe humanitaire et de maintien de la paix. L'université Victor Segalen de Bordeaux II, qui travaille en étroite coopération avec Santé navale et l'hôpital d'instruction des armées Robert Picqué, possède aujourd'hui une expertise mondialement connue dans ces domaines de risque.
L'installation à Bordeaux de "Santé navale", rebaptisée ESSA en 1971, correspondait à la volonté de la ville de faire valoir ses relations maritimes avec le monde entier et son influence dans les colonies, rappelle Jean-Claude Cuisinier-Raynal, président de l'Amicale des anciens de Santé navale. Sa situation géographique avantageuse par rapport aux trois ports de guerre, Brest, Toulon et Rochefort, acheva de convaincre le gouvernement de créer l'Ecole à Bordeaux, le 22 juillet 1890. "On pense que c'est une décision qui sera regrettée plus tard", a affirmé jeudi M. Cuisinier-Raynal, estimant notamment que "la médecine des opérations à l'international n'est pas de tradition lyonnaise mais était en phase avec l'environnement bordelais". Santé navale, dont l'esprit incarné par la devise "Sur mer et au-delà des mers, toujours au service des hommes" est encore représenté par l'uniforme, les traditions et les chants des "Navalais", avait déjà été menacée d'un transfert à Lyon en 1981. Mais une pétition de 100.000 signatures apportées à l'Elysée par une délégation conduite par le maire de l'époque, Jacques Chaban-Delmas, avait permis de sauver l'école. Une nouvelle pétition de 22.000 signatures avait été remise le 13 juin dernier au maire de Bordeaux Alain Juppé.
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