Avec Grégory et Jacotte, la bonne humeur est dans l’assiette – Photos Fabrice Schiff
Propos recueillis par Benjamin et Marco (Lyon People)
Ce nouveau rendez-vous estival sera forcément gourmand, puisque à KGB reçoit aujourd’hui deux ambassadeurs de la gastronomie lyonnaise… Nous vous invitons à passer à table pour déguster les confidences de ces deux nouvelles personnalités fort attachantes. Un régal !
Résumer Jacotte Brazier à fille de et petite-fille de est une grave erreur, car la Jacotte est à elle seule une grande dame qui mérite qu’on lui consacre bien plus. Pour autant c’est un vrai bonheur de l’écouter raconter la vie de son illustre famille. Elle sait cuisiner les mots, mijoter les anecdotes et vous faire déguster avec malice sa vie haute en couleur. Chère Jacotte, vous êtes délicieuse, une vraie gourmandise dont on ne se lasse pas !
Le chef lyonnais Gregory Cuilleron, gagnant d’un dîner presque parfait, et cinquième de Top chef en 2010, a ce petit sourire et cette gentillesse en plus qui font la vraie différence… Celle des grands et des généreux. Le recevoir et le découvrir furent un réel plaisir. Marié avec la truculente Jacote fut aussi un régal !
Quand on vous dit « vacance », quels mots vous viennent spontanément à l’esprit ?
JB : Bisous & premier amour.
GC : Moi c’est soleil & copain.
Parlez-nous de votre jeunesse !
JB : J’ai eu une enfance très heureuse. Jusqu’à l’âge de 12 ans nous allions en vacances pendant deux mois avec mon oncle et ma tante du côté maternel à Dompierre-sur-Veyle. Ils avaient 3 enfants, étaient instituteurs. On a fait des choses épatantes. Les copains allaient pécher les grenouilles et nous on les coupait… A partir de 12 ans, nous sommes allés à la mer, et c’était la première fois que je la voyais. C’était la Méditerranée à Antibes. Mes parents avaient des amis de jeunesse qui avaient un appartement dans un petit immeuble avec une énorme piscine remplie entièrement à l’eau de source. C’était le rêve, c’était le temps des premiers bisous ! Nous y sommes allés jusqu’à 20/22 ans.
D’où était originaire votre famille ?
JB : Toute la famille est installée à Lyon depuis 1921 est à Lyon. Ma grand-mère y avait ouvert son restaurant. Mon père et ma mère étaient également dans l’hôtellerie. Mon père est parti à la guerre, et quand il est rentré, il est tombé amoureux de ma mère, et surtout, ce qui est assez rare, ma grand-mère était amoureuse de sa future belle fille. De générations en générations, nous avons toujours habité rue Royale, et c’est seulement en 2009 que j’ai immigré à la Croix-Rousse.
Les prénoms de vos parents ?
JB : Gaston et Carmen. Ma mère est née en 1915, à l’époque, personne ne s’appelait Carmen ! Elle était brune et avait l’accent du Creusot. Tout le monde pensait qu’elle était Espagnole ou Roumaine.
Et toi, Grégory ?
GC : C’est très marrant, parce que j’ai passé une partie de mon enfance à la Veyle. Mon grand-père paternel est Lyonnais de la Croix-Rousse, et côté maternel, ils étaient du Vieux-Lyon depuis 5 générations. J’ai un petit-frère qui s’appelle Thibaut, il a 7 ans de moins que moi. J’étais très content de le voir arriver. Mes parents s’appellent Georges et Jacqueline. Mon père était dans la recherche pétrolière. Du coup, il était très souvent en voyage, aussi nous habitions souvent chez mes grands-parents. Mon grand-père m’a en partie élevé et c’est lui qui m’a donné le goût de la cuisine. Enfant, j’avais toujours plein de copains, et beaucoup étaient asiatiques. Ce qui fait que j’ai passé mon enfance dans les cuisines des restaurants chinois… C’est sans doute cela qui m’a vraiment donné le goût de la cuisine asiatique et qui m’a aussi beaucoup influencé. Ma grand-mère, elle, vient d’Auvergne. Chez elle, on faisait des parties de pêches, on jouait avec les voisins, j’allais faire du vélo et je participais au concours de pétanque… J’y ai aussi le souvenir de sandwichs qu’elle nous préparait. On buvait du sirop de cassis avec les myrtilles que nous allions ramasser avec elle…
Jacotte, comment se passaient les départs à Dompierre ?
JB : C’est mon père qui nous emmenait en Citroën. J’ai des souvenirs terribles de ces voyages. Surtout du col de la Luère. Vu la route, on était souvent malades. Mon père nous disait : « On ne s’arrête pas ! Vomissez dans les bonnets ! ». Vous imaginez le tableau… C’était des bonnets tricoté par notre grand-mère ! La première fois, en arrivant, nous avons dit qu’on les avait oubliés, ma mère avait alors téléphoné au Col de la Luère pour savoir s’ils les avaient retrouvés. Comme bien évidemment ils ne les avaient pas, elle a raccroché. Mais au bout de la troisième fois, elle a fini par comprendre et nous a désormais bourré les poches de sacs en plastique (rires). Avec mon père et ma sœur, nous y allions souvent et nous arrivions pour le déjeuner. Curieusement, ni mon père ni ma mère, ne nous ont appris à faire la cuisine. A l’époque, on était surtout recrutés pour essuyer les verres. Sinon, à Dompierre, avec les copains, on faisait du vélo, et on refaisait le monde, même vers 4 ou 5 ans. `
N’y aurait-il pas eu de petits bisous à cette époque ?
JB : Ah non ça c’était après. Par contre, je vais vous raconter quelque chose de rigolo. Ma sœur et moi nous n’avions pas de frère. Mon père, lui, n’était pas très pudique, aussi quand il sortait de la douche, il mettait juste une serviette autour des reins et il nous disait de ne pas regarder… Donc nous ne savions pas comment était fait un garçon ! Par contre, quand nous partions en vacances chez mon oncle maternel, il y avait trois enfants et l’aînée était un garçon. Curieuses et intriguées, je me souviens qu’à 6 ou 7 ans nous lui avions dit : « Jean-Paul, fais nous voir ton zizi ! ». Comme il était amoureux de ses cousines, il s’était exécuté ! Notre curiosité était satisfaite mais cela ne nous a nous a pas trop avancé !
Parlez-nous de vos vacances à Antibes !
JB : C’était en 1964, la première année Papa nous a descendus avec ma grand-mère, ma mère et ma sœur. Il avait décidé de s’arrêter à Aix en Provence à l’hôtel du Roi René. C’était la première fois que j’allais dans un hôtel. On ne s’arrêtait jamais dans les restaurants, car papa trouvait que c’était trop long.
Avez-vous quelques souvenirs gustatifs de votre enfance ?
JB : Depuis toutes petites, nous mangions de la volaille comme on mange du steak haché. D’ailleurs, aujourd’hui, j’en mange toujours avec autant plaisir. Par exemple, mon menu préféré chez Paul Bocuse, c’est une douzaine d’escargots et une belle volaille, c’est divin ! Façon Paul, c’est une symphonie ! Mais Il y a aussi autre chose que je peux manger midi et soir, c’est le homard.
GC : Moi aussi, sur ce point je suis un peu comme Jacotte. A chaque anniversaire, j’avais droit au poulet à la crème et au fraisier. J’adore ça ! J’en fais de temps en temps, mais pas trop non plus, car mine de rien, il y a beaucoup de crème… (Rires)
Petits, aimiez-vous déjà prendre les casseroles ?
GC : Tous les jours, à midi, quand je rentrais de l’école, je mangeais chez mes grands-parents et la première chose que je leur demandais c’était ce qu’il y avait à manger. Hélas, à l’époque, je n’avais pas le droit d’accéder aux fourneaux. Mon premier souvenir de cuisine, c’est quand j’ai voulu faire un gâteau de semoule, il était immonde car je n’avais pas fait cuire la semoule. Heureusement la maîtresse d’école a été très sympa, elle a même eu le courage de le goûter !
JB : Non, cela ne nous venait même pas à l’idée.
Quelles étaient vos destinations de vacances ?
GC : Bandol, Sanary. On a aussi fait un peu d’Espagne. Mon père adorait la plage ! Mes parents étaient aussi fans de road trip. Et puis comme j’étais aux scouts de France, j’ai fait plusieurs camps de vacances.
JB : Cela me fait penser, moi aussi, que je faisais partie des Jeunesses Etudiantes Chrétiennes. On couchait dans des granges, on était nourri, midi et soir, et je trouvais la nourriture extraordinaire ! Un jour, je vois débarquer mon père, il me dit : « Tous les parents me téléphonent, ils me disent tous que leurs enfants mangent affreusement mal » il venait donc voir ce qui se passait. Il fut extrêmement surpris de ma réponse et mon appréciation. Pour moi tout était délicieux. C’était l’opposé de tout ce que nous mangions habituellement. Le cabillaud et le lieu, je n’en avais jamais mangé ! La compote, pareil, sans parler des haricots en boîte… Je trouvais tout cela délicieux. Je ne comprenais pas pourquoi les autres filles se plaignaient ! En fait, je crois que les gens sont difficiles, parce que leurs parents font de la mauvaise cuisine, ils mangent la même chose tout le temps. Mais moi qui étais habituée à manger que des choses raffinées, j’avais l’impression de n’avoir jamais aussi bien mangé car c’était des mets nouveaux et inhabituels… Comme quoi !
Maintenant, parlons de vos vacances d’ado…
GC : Mes premières vacances d’ado, c’était vers mes 14 ans. Je partais chez des copains ou alors c’est nous qui recevions une dizaine de copains à la maison. Sinon, quand nous allions à la mer, je pouvais emmener un pote pour passer les vacances. Je me souviens plus particulièrement de deux d’entre eux Tony et Adrien et il y avait aussi Pierre-Marie. Notre jeu favori était de repérer les filles pour aller leur parler. Celui qui allait leur parler c’était Pierre-Marie, moi j’étais surtout le meilleur pour les repérer !
Avez-vous eu, au moins, un succès dans ces tentatives de séduction ?
GC : Des micros succès, oui… Un bisou, de temps en temps, mais hélas on revenait souvent bredouille.
Te souviens-tu d’un prénom?
GC : Oui. Il n’y a pas très longtemps, j’en ai retrouvé une sur face book. Elle m’avait beaucoup marqué, elle s’appelait Claire Bellemere, on s’était rencontré à Bandol, j’avais 11 ou 12 ans.
Jacotte, quels sont vos premiers souvenirs de vacances hors de la cellule familiale ?
JB : Entre 12 et 14 ans, il ne se passait pas grand-chose. On allait se baigner, on allait manger une glace de temps en temps et ça n’allait pas plus loin… Et un jour, tout à coup, dans l’immeuble d’Antibes où nous logions, nous avons vu arriver de nouveaux habitants. Des Parisiens, une famille avec 3 garçons célibataires : Jacky, Jean-Claude et Jean-Pierre dit « Bubuche ». Ils étaient beaux garçons, sportifs, bons nageurs, avec tout ce qu’il fallait. Il y avait un plongeoir, je me souviens qu’ils avaient des « moule-bite », c’est drôle car je crois que ce n’est plus du tout la mode aujourd’hui… Nous étions béates d’émotion mais nous n’étions pas les seules filles sur le coup !
Que faisiez-vous le soir avec ces charmants jeunes hommes ?
JB : Rien du tout. On refaisait plutôt le monde, c’est tout. Le matin, on allait à la plage, on retrouvait les copains, à midi on rentrait manger, on avait souvent des amis à déjeuner avec nous. L’après-midi, pendant que les parents dormaient, on allait à la piscine. Bref, tout ça pour dire que « Bubuche », celui qui me plaisait le plus, était amoureux d’une autre fille. On ne s’envoyait pas en l’air, on se faisait juste des bisous, on excitait les mecs, c’était terrible.
Des bêtises?
JB : Mes parents nous laissaient tellement de liberté, que non, nous étions plutôt sages. D‘abord et surtout, nous n’avons jamais été enceintes, et rappelez-vous je fais partie de la génération où il a fallut attendre belle lurette pour prendre la première pilule. Le sida n’existait pas encore, aussi notre plus gros souci était de ne pas tomber enceinte. Du coup, j’ai attendu l’école hôtelière pour faire « crac-crac ».
Et toi Greg ?
GC : Je n’ai pas de souvenir très précis sur ce point. Je n’étais pas très excité du machin. Mon premier « crac-crac », ce devait être vers 16 ou 17ans. Par contre, c’est surtout aux retours de vacances que j’étais le plus motivé…
Avez-vous des souvenirs d’ivresse?
JB : Bien plus tard. Quand j’étais en Suisse, mais avec les copains. J’avais un ami qui s’était débrouillé pour qu’on ait accès à une boite de nuit de 22h à minuit. C’était le Dry Club à Juan les Pins. Nous avions droit à un Coca pour 2 et à minuit nous devions partir. Après, nous allions manger une glace sur la plage. A l’époque, Juan les Pins était extrêmement chic. Nous nous donnions rdv dans un bar ou l’on avait les consommations à moitié prix, mais jamais nous n’avons été ivres. Cela ne faisait pas partie de nos priorités.
Vos premières vacances d’adultes ?
JB : Ça a été la continuité de nos vacances d’adolescence, puisqu’on partait déjà seuls. Par contre, je ne suis jamais partie avec mes Jules, ils n’étaient pas là pour les vacances. Cette période de l’année c’était souvent pour retrouver mes copains ou retrouver ma famille à Lyon.
GC : Je suis rarement parti avec mes petites amies. Mis à part la dernière. Mais je partais souvent avec une copine qui s’appelle Claire.
Des souvenirs de voyages?
JB : En général, je pars toujours avec une amie. Je suis allé 2 fois à Madagascar. J’ai visité l’Asie, et les États-Unis. Lorsque que je suis parti à Hong Kong, je suis tombée sur un de mes amis de l’école hôtelière, donc nous avons été reçus comme des princesses, dans un hôtel formidable. C’était en 1997, l’année de la rétrocession de Hong-Kong à la Chine. Comme j’étais sur place, je suis allée aux cérémonies. Tout était bleu et blanc, c’était magnifique. A minuit, tout ce qui était bleu et blanc est devenu rouge Chine, l’émotion était énorme, j’ai pleuré comme une madeleine… Il y avait des feux d’artifice incroyables, des orchestres, des concerts, … C’est sans doute mon plus beau souvenir de voyage !
GC : Moi, je prends une destination qui me plait, et ensuite j’avise sur place. Je ne réserve souvent que la première nuit d’hôtel… D’ailleurs, cela peut quelquefois jouer des tours quand il n’y a plus de place dans les hôtels ! J’aime donc partir à l’aventure, je me souviens ainsi avoir dormi sur le port en Crète. Car nous étions arrivés à 2h de matin au lieu de 7h. Sinon, j’ai même traversé la Crète, en moto. On a eu des pannes d’essence et des chutes. Je suis aussi allé 6 ou 7 fois au Brésil, c’est un pays magnifique. Ce qui est fantastique avec les Brésiliens c’est que même quand ils ne parlent pas ta langue, ils font tout pour communiquer avec toi. Génial et généreux.
Vous voyagez plutôt léger ?
JB : Très léger ! Mais par contre, j’ai un toc. Tout doit aller ensemble, donc je ne me perds pas dans une valise pleine de couleurs. Je pars du principe que tout doit pouvoir se marier ! Et puis j’essaie aussi d’avoir des vêtements qui ne se repassent pas ! Mais aujourd’hui, j’ai en partie résolu le problème des bagages car je ne voyage presque plus. Je n’en ai plus les moyens ! Ça fait bien 3 ou 4 ans que je ne suis plus partie au bout du monde. Et puis peut-être que je n’aime plus autant faire de longs voyages en avion. L’an dernier, par exemple, je suis simplement partie avec des amis en bâteau, pendant 15 jours, on a fait le tour de la Corse et de l’Italie, c’était superbe. Sinon, je pars chez des amis, à côté d’Aix en Provence, nous y allons environ pendant un mois.
GC : Cet été, je vais peut-être partir à Ibiza, mais pas dans la partie clubbing. J’y vais surtout pour voir les paysages qui sont magnifiques ! On va donc sûrement louer une maison avec des potes. Sinon moi qui adore l’Orient, j’adorerais faire la Route de la soie… Hélas, cela est juste infaisable, aujourd’hui, compte-tenu des problèmes comme en Syrie ou au Pakistan… Sinon, j’aime aussi aller dans le Sud voir des amis, à droite à gauche, jusque dans la région ibérique ! Par contre, je ne sais pas encore si je pars seul ou en couple. Cela fait peu de temps que je suis avec ma nouvelle petite amie et je n’ose pas encore lui demander de partir avec moi…
Avez-vous de mauvais souvenirs de vacances ?
JB : Non, jamais ! Il faut toujours positiver, qu’est ce qui peut être désagréable en vacances ? Un mauvais hôtel ? Non, il ne faut pas exagérer, tout cela n’est pas grave, alors !
GC : Je suis complètement d’accord avec Jacotte !
JB : Par contre, j’ai une anecdote. Une fois, aux Etats-Unis, on s’est fait voler notre sac avec les passeports. C’était chez Macy’s, je me suis mise à hurler « Help, fermez la boutique, ne laissez sortir personne !!! » Bien sûr, ils ne m’ont pas entendus, ni obéis, (rires), ça a seulement fini à l’ambassade, une vraie galère !
GC : Moi aussi, j’ai un truc un peu sympa. Une fois, au Brésil, il n’y avait plus de place dans l’avion de retour. Du coup, la compagnie aérienne nous a logés gratuitement pendant 2 jours avant de nous faire repartir en business!
Quelle destination aimeriez-vous redécouvrir ?
JB : Le pays de Galles et Hong-Kong, pour voir comment cela se passe depuis le départ des Anglais.
GC : J’aimerais retourner dans les Cyclades en Grèce ! Et j’aimerais visiter le Japon et le Liban, j’adore leur cuisine, la Syrie aussi et l’Afrique du Sud. Ça me tente beaucoup.
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