Texte : Bernard Gouttenoire – Il y a plus de 50 ans que « nous » avons suivi l’évolution de l’itinéraire du peintre Alain Chevrette (né en 1947 à Lyon), artiste que Denise Mermillon (Galerie Saint-Georges, vieux-Lyon) présentait déjà avec une foi intacte et inébranlable avec ses amis sanzistes.
Notre jeune peintre Alain Chevette, s’est d’abord appliqué à suivre les traces de René Chancrin qui fut son professeur aux Beaux-Arts de Lyon. Puis, Jacques Truphémus, lui-même « beau suiveur » de Pierre Bonnard, tant dans le geste que dans sa forme. Un vrai caractère bien trempé. Il ne se contentera pas d’être non plus un amateur d’ombre et de lumière, qui sied au « Nabis japonard ». Il va chercher et fournir les frissonnements de la partie plus obscure qui rode entre les feuillages… de même que les zones claires des paysages prennent de l’ampleur.
Il s’adapte aux ambiances si chères à Jacques Truphémus quand celui-ci s’attardait au comptoir des bistrots avec aux premiers plans « la belle servante » chère et révélatrice du peintre du 11, rue Bizolon… Il peignait alors aussi bien les Pieds humides de la place Bellecour, que les « garçons bouchers » de la rue Vaubecour, que la brigade en cuisine de chez Léon de Lyon et son chef étoilé, Jean-Paul Lacombe. Il y avait une sorte de mimétisme flagrant avec la « Lyonnitude »…
Comme le peintre de l’Ile Barbe Jean Couty, Alain Chevrette brossait dans son atelier des terreaux (il a pris la suite de l’atelier Henry Vieilly aux Terreaux) des grands formats pour « être vu » de tous et de très loin. C’est à cette époque, que le jeune commercial est sorti de l’anonymat, d’expositions en expositions avec Denise Mermillon dans le vieux Lyon, puis, plus tard, chez Serge et Michèle Emliani (à la Bégude-de-Mazenc, Drôme). Et c’est le moment du véritable tournant dans sa vie quand il a été l’employé commercial du collectionneur Paul Dini, le patron de la Comareg.
Une autre rencontre primordiale avec Régis Bernard quand celui-ci accède (de force), en 1990, à la présidence du célèbre Salon du Sud-Est (créé en 1925). C’est ce moment où Alain Chevrette fait l’objet d’une acquisition d’une belle toile « Les Pivoines » par Bernard Gouttenoire, missionné par le président du Conseil général Michel Mercier, pour l’achat des 250 tableaux de la collection « Département du Rhône ».
Bien plus tard, son actuel président Christophe Guilloteau se rendra acquéreur longtemps après, d’une très belle toile emblématique sur le thème de la grande guerre « jusque-là, tout va bien » représentant un hommage poignant, un « poilu de Verdun » (145 x 114 cm). Il y a eu ensuite un Lyonnais contemporain son ami Patrice Giorda. Une sorte d’échange à l’avantage, tour à tour, de chacun. Qui a pris l’un sur l’autre ? C’est très discutable…. Comme en son temps, Jim Léon et Max Schoendorff à Lyon, se tiraient l’affiche ! Toujours est-il que les deux amis, Patrice Giorda et Alain Chevrette s’en sont sortis, individuellement, et très honorablement, chacun dans son coin !
Lui était soutenu par la galerie Désiré. Soucieux de vouloir tourner la page, c’est alors que Chevrette, mit un terme à sa façon. Après un passage au « Soleil sur la place » remarqué. Adieu figuration qui l’avait accompagnée jusque-là. Autoportraits expressifs, Natures mortes à l’emporte-pièce, Paysages lyonnais aux allures industrielles… Pour un plongeon dans littéralement dans l’inconnu. Tout en sauvegardant l’aspect traditionnel de la peinture dite de chevalet… huile sur châssis au pinceau. Il fallait tout changer mais garder l’essentiel !
Dans les pas de Gerhard Richter et Joan Mitchell
Besogneux, celui que l’on considérait -fort justement- comme « l’ombre des autres » (de Truphémus à Bonnard) a fait comme un « arrêt sur image ». Une pose salutaire dans son œuvre, déjà considérable, pleine de charme et de paysages familiers. Et surtout, voulant rompre avec les tableaux plus conventionnels, tout en gardant l’aspect peinture de chevalet classique. C’est à ce moment-là, que le peintre s’est remis en cause complètement et non sans un certain panache. Il a revisité ses gammes. Et accessoirement changé ses soutiens (galeriste compris). Il a osé traverser la rue, pour se retrouver auprès de Valérie Eymeric (33, rue Auguste Comte – Lyon 2ème). Et du coup, sa palette s’est embrasée d’une couleur éclatante, brodée et bordé de magnificence et d’implosions et d’explosions. C’est simplement, les « Nymphéas » revisitées. Il a pris à Claude Monet, mais pas seulement aussi à l’américaine Joan Mitchell, mais, aussi à l’Allemand Gerhard Richter, en réinventant ses couleurs jamais contenues (abstraites). Des couleurs « vivantes ». Il a « enfin » compris l’appel du large, et s’en rassasie. Il nous inonde de fastes et de bonheur ! L’immensité dévoilée comme un cosmos intime et ultime ! BG
Exposition Alain Chevrette
Du 16 mai au 26 juin 2023
Galerie Valérie Eymeric
33, rue Auguste Comte – Lyon 2eme
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