Pierre Alberti, séquence nostalgie

23 décembre, 2008 | LES GENS | 16 commentaires

alberti1 Photos © Jean-Luc Mège

 

Par Nadine Fageol, envoyée spéciale à Nice

 

Fils de bûcheron, il a fait fortune dans la démolition pour créer dans les folles années de la bande FM, Radio Nostalgie, sa danseuse anti boum boum gavée des musiques de sa jeunesse. 20 ans après son départ mouvementé de Lyon, retrouvailles à Nice et à Monaco avec « Ma », la femme de toute une vie et Radio Emotion, son dernier bébé. Pierre Alberti est en piste pour une nouvelle aventure qui repassera peut-être par notre capitale.

 

alberti2 Il n'aura pas échappé au Lyonpipolien attentif, qu'en plus de sa mission dantesque de grand chasseur de pioupious, rédac' chef Marco cause dans le poste. Voui voui, de sa  voix de « fouine rieuse » (dixit ses comparses de micro), il donne à ses « petits loups » Lolo et Dodo les pistes de l'agenda pipole tous les lundis sur Hit & Sport. Bref, Marco paye un peu trop de sa personne pour entretenir le réseau. Conséquences de cette crise de radiologie aigue, il s'est mis à farfouiller dans le passé en quête d'un homme de poids au passé composé. Dans la série des grands dossiers lyonnais, voici Pierre Alberti, à la fois démolisseur d'édifices fatigués et fondateur de Radio Nostalgie. L'un en a fait un millionnaire, l'autre une célébrité, l'ensemble va générer une embrouille compliquée de valises farcies de papiers sur laquelle nous allons faire une impasse monumentale. Cette précision apportée, on reprend. « Sur la route, la la la », d'un chantier à l'autre, Pierre avale du kilomètre en pagaille dans sa Mercedes noire blindée avec la radio pour compagnie. Un jour de mai 1981, le démolisseur s'arrête sur un article dans le journal, « Nous vous révélons cette semaine comment monter votre radio ». Alberti a trouvé son Eldorado. Il va créer sa station. Installé à Lyon, et plus exactement dans un château de Trévoux, le franco-italien rapatrie de Toulon deux DJ pour créer Radio Contact, l'une des toutes premières radios privées, dans la tour de la Duchère. Programmation à l'avenant en fonction des goûts des bénévoles.

 

alberti3 C'est grâce à Anne Fleuret Truche qui a vécu la monstre aventure que l'on remonte la filière Alberti jusqu'à Nice. Dans la rue des hôtels chicissimement vieillots, il a investi le premier étage d'un curieux immeuble appelé « Queen ». Au bout d'un couloir sans âme, une enseigne trace le mot « Émotion » dans une belle écriture d'écolier. On a l'impression de rentrer dans un reportage de « Tracks » sur Arte, à part qu'ici en guise de contre culture, on a affaire à un fondu des Yéyés, de ces airs désuets qui vous font chavirer pour peu que vous soyez dans une mauvaise passe. La fameuse nostalgie. Sylvie, Johnny, Michel, lui avec la pulpeuse Jane Manson, des photos partout glanées ça et là par Maryse, fidèle assistante dont on devine qu'elle sera de toute cette nouvelle aventure émotionnelle. Le voilà, dégaine à la Montand tout de noir vêtu, grande gueule dans la veine italienne qui passe du rire intempestif au mur blindé dès que les questions se font plus précises sur la fin de son épopée lyonnaise. Émotif pur et dur, Pierre Alberti a appris l'autogestion pour ne dire que ce qu'il veut bien. Il raconte pêle-mêle sa nouvelle aventure radiophonique niçoise et son enfance paysanne pauvre dans la vallée des Merveilles à la frontière italienne. Son village rattaché à la France en 1947, le voilà français. Issu d'une famille de bergers, son père bûcheron ne cesse d'haranguer ce « bon à rien qui n'entend rien à l'école ». Alors Pierre va régulièrement livrer le bois à Menton. Il a 17 ans quand il rencontre la belle Cathy, il ne la quittera plus. Nul doute que c'est pour ses beaux yeux qu'il va créer un empire. Il démarre dans la ferraille, « pique, pelle, pioche des tranchées dans les rues de Menton », puis dans tout l'Hexagone. Son entreprise de démolition s'attaque aux marchés des travaux publics. Églises, hôtels, usines du Nord, il a tout rasé jusqu'au ventre de la Gare d'Orsay, sans oublier les ballastes du TGV via « la technique du dynamitage par implosion » qu'il dit en vous pinçant la joue. « Attends ma chérie, j'ai deux, trois articles là-dessus ». Il sort une épaisse revue de presse, bible de la démolition selon Alberti. Son frère Lino, ayant fini « de faire le mannequin aux Amériques » intègre la société. Pierre à Lyon peut prendre quelques libertés.

 

alberti4 Dans l'illégalité la plus complète, il déploie l'antenne de Radio Contact le 13 juillet 1981 à la Duchère. Mais très vite se fatigue de ce grand n'importe quoi et surtout « d'écouter du boum boum ». Du hard rock ! Il cède Contact, alors n°1, très cher à Paul Dini, patron du groupe Comareg (Le 69), et sans lâcher prise commande à son responsable d'antenne, Frédéric Coste, de lui faire « une radio à moi, personnelle avec des musiques de ma jeunesse ». 500 panneaux 4X3 mètres annoncent aux Lyonnais la naissance de Nostalgie nichée à la Croix-Rousse. « On s'est retrouvé devant les micros sans trop savoir que faire alors on a demandé aux auditeurs de nous appeler » raconte Anne. « Le téléphone n'a plus arrêté de sonner ». Dans la folie du mouvement des radios libres où tout le monde ne pensait qu'à se faire plaisir, il a eu raison de penser « toute la musique que j'aime » celle de ses jeunes années. Un poster d'Édith Piaf de douze mètres sur la façade, Nostalgie déménage place Valmy à Vaise. Un émetteur planqué au Mont Cindre, l'audience grimpe en flèche, seulement la pub n'est toujours pas autorisée. « On déguisait les pubs en reportage, on envoyait un mec avec un micro chez les clients pour faire du faux direct », quant à l'émetteur, il arrosait jusqu'à Grenoble. À l'époque, Alberti et son confrère Daniel Perez (Scoop) se livrent à des tours de passe-passe avec les autorités. Les émetteurs disparaissant et réapparaissant… jusqu'en 1984, année du lancement du satellite Télécom 1. Alberti fonce à Paris négocier un canal de diffusion pour lancer Nostalgie sur tout l'Hexagone. Le provincial ringard avec sa musique de vioc qui fait se gausser les jeunes patrons parisiens branchouilles, va jouer son joker. Il n'hésite pas à signer un chèque de caution personnelle de 20 millions de francs et règle 500 000 francs mensuels de location de fréquence. La publicité toujours pas réglementée, la radio n'a pas de rentrées financières légales mais Nostalgie et NRJ bénéficient désormais des moyens de diffusion identiques à ceux des aînées que sont Inter, RTL, Europe 1, et RMC. Nostalgie va véritablement éclore à Paris avec une quinzaine de personnes de confiance. « Yves Maillet qui vendait de la lessive à la Duchère est venu faire l'animateur, il est aujourd'hui producteur pour TF1 ».

 

alberti5 Pour relancer ces artistes « interdits d'antenne », Alberti invente les podiums et confie à la journaliste de Paris Match, Agathe Godart l'émission culte sur la Nostalgie des Stars. Nicoletta, Richard Antony « ce gros con qui me faisait de l'émotion »… tout le monde rapplique, jusqu'à Aznavour. En 1991, après dix ans de bonheur absolu, Alberti vend Nostalgie à RMC. Devenue trop grande, trop compliquée. « Plus tu feras de choses, plus tu te feras d'ennemis ! » lui a dit un jour l'ami Charles Hernu. A l'heure des ennuis, l'establishment lyonnais lui tourne le dos, une attitude dénoncée par le patron de Scoop : « C'est un type exceptionnel et d'une grande générosité. Beaucoup de gens se sont servi de lui et l'ont exploité. Il ne leur en a jamais voulu. » A l'ombre, il a compris. Puis s'en est allé retrouver le soleil du midi et créer de nouvelles affaires. Sans se retourner. Après une douche froide à l'eau minérale de Fontemps, il a replongé dans la radio en mars dernier en lançant Émotion, sa petite dernière, dont les studios sont techniquement fins prêts pour un nouveau buzz régional (il arrose toute la Côte) puis national. Il pense d'ailleurs aller en causer un brin à Daniel Perez. Il verra, rien ne presse si ce n'est de prendre des nouvelles de Cathy qu'il appelle «Ma» et que l'on rencontre après une demi-heure de route dans une immense résidence au pied de Roquebrune – Cap Martin. Au milieu de fantomatiques oliviers millénaires classés au patrimoine de l'Unesco et à deux minutes de Monaco. On comprend Pierre, « Ma » c'est de la gentillesse pure, une douceur inouïe, des yeux doux. Le guerrier en perd de sa superbe pour goûter avec elle et Pacha, un craquant chiot foutraque le bonheur d'être en famille. Il y a les photos des trois enfants, du frère de « Ma » trop tôt parti et du château de Trévoux. « Ma maison, c'est tout ce que je regrette !». A 67 ans, de la Nostalgie, il n'a point mais de l'Émotion à revendre, certainement !

16 Commentaires

  1. Clinesque

    C’est beau….comme du Madoff !

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    • Anonyme

      Merci à ce Monsieur pour Radio Nostalgie qui fort heureusement existe encore

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  2. Suzanne du Borrigo

    très beau document sur Pierre et Cathy que j’adore. Lino et Donata aussi. Pierre tu a le bonjour de Raymond Eyraud il est toujours a Toulon BISOUS

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  3. Bertrand et Hélène

    Salut Pierre, On se voit de temps en temps chez Chantal et Lino. Bravo pour ta radio. De grosses grosses bises à Cathy et toi-même. Bisesss Bertrand et Hélène

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  4. clemencin michel

    J’ai connu mr et mme Alberti à chazay (69) avec leurs fils Pietro Bruno et Silvio.Ils étaient déja dans la démolition et circulaient en Rolls! Et pourtant avec moi fils d’ouvrier ils se sont toujours montré d’une simplicité rare. Ce sont des personnes admirables !!

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  5. Jean Pierre de Mandelieu

    Bravo pour cet excellent article! Je me rappelle du 13 juillet 1981. J’habitais Genève et la bande FM était juste occupée par France Inter, France Culture et France Musique, et la radio romande. Par hasard, je suis tombé sur les premières émissions de Radio contact qui tournait sur 104 Mhz. Il y avait une voix féminine, c’était celle de Nadine et un titre qui revenait tout le temps: c’était Can’t take my eyes off of you. Puis un téléphone. J’ai appelé. Une personne m’a répondu: c’était Frédéric Coste, un ancien de RMC. Il n’en revenait pas que l’un capte Contact en Suisse.

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  6. sarciron yves

    bonjour a toute la famille je cherche a contacté piétro

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  7. Sophie A

    Dommage que ne figure pas ds cet article le nom d’André Chomier, qui, ds les années Fortes de Nostalgie à Lyon Vaise, faisait pâlir d’envie tous les animateurs avec ses taux d’audience record pour la matinale , des taux jamais plus égalés à Lyon !! et qui était très présent au sein de l’équipe.

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  8. Nelly

    Une grosse bise à Pierre Alberti et Cathy. J’ai animé des émissions sur Contact « transit Temporaire ». C’était le temps e F. Coste, O . Perrot, D Guyot et son débilo Rock … Et les belles soirées chez P. Alberti … Tendres pensées à tous ! Nelly

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  9. mathelin

    quel plaisir de vous revoir tous les deux meme si ce ne sont que des photos que de souvenirs nous avions appris que vous aviez mal tourné en vous lancant dans l’eau !!! heureusement que vous revenez à des choses plus serieuses nous vous suvrons avec le coeur dans cette nouvelle aventure radio beaujolaisement votres Bises à toute la famille les mathelin

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  10. véronique

    Quelle joie de vous revoir, vs ne vs souviendrez peut etre pas de moi, j’étais v/ secrétaire à l’agence Alberti de Tourcoing (59),les quelques années passées auprès de vs sont truffées d’excellents souvenirs, c’était un vrai plaisir de travailler pr des personnes aussi gentilles que vs. Je me souviens aussi de la grande fête que vs aviez donnée chez vs pour le 1er anniversaire de radio contact, où ns étions tous invités, que du bonheur. j’espère que vs aurez l’occasion de lire ce message et je peux vs dire que vs restez pour tjs ds mon coeur je vs embrasse Véro (comme vs m’appeliez)

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  11. thierry

    J’ai eu la chance de connaitre Pierre dans les année 90. J’ai rejoint les Alpes Maritime pour travailler à Fontan. Je n’oublierai jamais cet entrepreneur d’exception. Un grand bonjour. Thierry GAILLARD

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  12. eyraud raymond

    Pierrot je ne sais où te joindre, appelles moi au 0620678694 ton voisin des années 50

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  13. pupier chazay d azergues

    vous souvenez vous !!!la boucherie !!!!patrick et gilles !!lui habite beaulieu sur mer avoir des nouvelles de pietro et bruno leurs anciens copains bonjour a tous.

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  14. Roberto FIGAROLI

    Que de beaux souvenirs : avec Anne Fleuret, Yves maillet, Jocelyne Buisson à l’info, Paul Saviotte… et bien d’autres. Belles et douces années 80 avec tous ces plateaux d’artistes à Lyon !

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