Babycall

11 mai, 2012 | CINEMA | 0 commentaires

babycall.jpg Par Aymeric Engelhard

 

Des œuvres telles que « Morse » ou la trilogie « Millenium » ont attiré tous les regards vers le nord de l’Europe. Ces pays scandinaves offrant des thrillers froids comme la lame d’un couteau ont révélé d’extraordinaires talents.

 

Le jury du dernier Festival du Film Fantastique de Gérardmer ne s’est d’ailleurs pas trompé en offrant son Grand Prix au dernier rejeton glacial norvégien. « Babycall », un cocktail de folie et de paranoïa qui vaut assurément le coup d’œil. Les premières images rappellent Polanski. Fît d’un premier plan grandement annonciateur, une femme entre dans un appartement avec son enfant, en fait une brève visite avant de s’installer. Le metteur en scène pose les bases du lieu principal de l’action à la manière de « Rosemary’s Baby ». Car déjà une sorte de malaise s’installe. Point de musique ni de couleurs chaleureuses, point de décorations ni sourires. Juste un trois pièces sinistre que la mère assombrit dès les premières secondes en fermant les rideaux. Anna protège son enfant d’un père violent. Elle ne vit plus que pour lui. Si bien que dormir dans deux pièces différentes la rend malade au point d’acheter un babyphone. L’appareil va alors capter des sons provenant d’ailleurs. Les hurlements d’un enfant battu. Anna va alors entrer dans un processus de paranoïa aiguë et amorcer une descente aux enfers dévastatrice. Pal Sletaune filme son héroïne comme une entité perdue et seule. Sa folie grandissante la rendant toujours plus craintive. Plus le film avance, plus les hallucinations la rapproche inexorablement de l’autodestruction. Mais cela se fait calmement, froidement. On hésite souvent concernant son état psychologique. Ce sentiment se voit amené par une mise en scène ultra maîtrisée, patiente comme la Mort guettant sa prochaine victime.

 

Il n’y a pas de stylisation dans la réalisation de Sletaune, juste un dément sens de la simplicité la plus efficace et la plus glaçante. Sans pour autant faire réellement peur, « Babycall » distille une ambiance des plus dérangeante tant on se fait balader dans l’esprit malade d’Anna. Malheureusement, le soufflé si maîtrisé finit par retomber dans les dernières minutes. Dans un déferlement incompréhensible d’explications, le réalisateur assassine son film. Là on l’on aurait aimé sortir la tête aussi perdue que l’héroïne, on a droit à une sorte de « Babycall pour les nuls » en fin de métrage. Un dénouement particulièrement étonnant et dommageable qui fait de Pal Sletaune un sous-Polanski au talent évident mais qui a bâclé la fin d’une histoire jusque-là passionnante. Reste que l’une de ses plus grandes réussites aura été de choisir Noomi Rapace dans le rôle principal. L’actrice qui mit tout le monde à ses pieds en interprétant la désormais célèbre Lisbeth Salander de la trilogie « Millenium », croit fermement en son personnage et lui offre un magnétisme hors du commun. Elle est sidérante de crédibilité, au point de nous attirer dans son cerveau dérangé au même titre que le seul « ami » qu’elle se fait dans le film, Helge. Elle porte sur ses épaules une pellicule débordante de maîtrise, juste cruellement blessée par un finish loupé, mais dans laquelle on a aimé se perdre à ses côtés. Le cinéma nordique, avec ses danois (Lars von Trier et Nicolas Winding Refn en tête), ses islandais (« Jar City »), ses finlandais (« Insomnia »), ses suédois (« Morse ») et ses norvégiens (« Babycall ») a encore de belles heures devant lui, assurément.

 

 

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