Par Aymeric Engelhard
Voilà une comédie qui sent le divertissement de haute volée ! Un casting des plus sympathiques, une nouvelle d’origine complètement barrée et un titre qui prône l’odyssée à 200 à l’heure accompagnée d’une bonne dose de rhum. Malheureusement les apparences restent souvent trompeuses au cinéma. Ne boudons tout de même pas notre plaisir…
Ce n’est pas la première fois que l’esprit excentrique de Hunter S. Thompson et la gestuelle délirante de Johnny Depp sont réunis au cinéma. Terry Gilliam tenta l’expérience en 1998 dans son démentiel « Las Vegas Parano ». Celle-ci se révéla si puissante, l’alchimie fonctionna tellement bien qu’un deuxième round était à prévoir. D’où « Rhum Express ». Adapté d’une nouvelle de l’écrivain frappa-dingue, le film retrace la surprenante carrière journalistique de Paul Kemp, un alcoolique propre sur lui, dans les méandres de la société portoricaine. Entre un journal douteux qui l’engage, un homme d’affaires qui l’embobine et sa femme qui l’ensorcelle, deux alcooliques comme acolytes et une île où rhum et violence semblent fais pour s’entendre, Kemp fera quand même tout pour réaliser son objectif : publier au moins un article. Soyons clair, tous ceux qui s’attendent à un équivalent de « Las Vegas Parano » seront déçus. Déjà parce Bruce Robinson n’est pas Terry Gilliam, et ensuite parce que « Rhum Express » ne constitue pas un enchaînement de « trips » tous plus hallucinants les uns que les autres. Ici, il n’y en a qu’un, un beau, qui permet de constater que Johnny Depp n’a pas perdu la main. Sinon rien, bien que les personnages passent les ¾ du film avec un taux d’alcoolémie assez important. Aussi Bruce Robinson est un réalisateur plutôt sage mais qui sait se lâcher quand son scénario s’emballe. Du coup, fréquents sont les passages où le rire s’invite, remplaçant parfois au pied levé un état de choc. Le fait que Johnny Depp et la sculpturale Amber Heard soient coupés dans leur élan par un vieux tourne-disque diffusant un discours du Führer donne une idée assez précise du type d’humour, cru, insolent, et, il faut le dire, ultra efficace. Si bien qu’un grand nombre de scènes rocambolesques s’enchaîne mais la même envie ne se retrouvera pas notamment dans les dialogues et autres séquences plus posées. Le réalisateur n’ayant pas su gérer toutes les composantes de son film à parts égales il en va de même pour les personnages. Si Kemp est absolument parfait (grandement aidé par un Johnny Depp au diapason), l’unique femme du métrage par exemple y perd au change et se révèle sans la moindre saveur (à part pour les hommes pour qui seul le physique compte). Et que dire d’Aaron Eckhart (« Thank you for Smoking »), excellent mais dont la profondeur du rôle ne nous laisse qu’un piètre souvenir… Heureusement l’odyssée tient suffisamment ses promesses, laissant toutefois un bon goût d’inachevé à l’arrivée du générique. Rock’n’roll à défaut d’être franchement travaillé. Un film dans l’air du temps…
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