Deux ans après avoir lancé avec brio, le festival Le Château Perché (en Auvergne), le collectif franco-berlinois Perchépolis débarque sur Lyon les 29 et 30 avril prochains, avec l’ambition d’installer son conceptival La Mouche sur le Cuir, dans la capitale des Gaules. Chargée de l’organisation en compagnie de Samy El Moundi, Etienne Castel, Kathy Quint, et Elisa Carvalho, Tiphaine Carrère nous présente ce festival un peu particulier…
Pour les novices, qu’est ce qu’un conceptival ?
Un conceptival, c’est festif comme un festival, mais avec des idées à explorer. Nous avons donné carte blanche à tous les artistes que nous avons invités, avec pour seule indication donnée que l’expérience soit éveillée ou engagée pour le public. Il n’y a pas de raison pour que la réflexion soit refoulée à l’entrée des festivals, ou des lieux dédiés au divertissement. Ça ne veut pas dire qu’il faut tomber dans le cliché dont souffrent les « concepts ».
Qu’est ce qui a motivé la création de ce projet ?
Nous réfléchissions depuis un moment, au monde de l’événementiel, à ses limites et à son pouvoir. Nous voulions proposer une nouvelle manière de faire la fête en ville, envers et contre les difficultés du favoritisme politique. Un collectif jeune, 100% indépendant peut prétendre à organiser un festival de qualité dans un lieu aussi emblématique que la Sucrière. On veut aussi prouver que le monde de la fête n’est pas une horde d’individus qui ne cherchent qu’à fuir la réalité mais bien des gens qui viennent célébrer ensemble, une manière d’être avec l’autre, une ouverture de soi, une ouverture à l’autre. On souhaite responsabiliser le public grâce à des œuvres qui accrochent à la réalité.
Après Château Perché dont vous gérez l’organisation, c’est une nouvelle prise de risques …
Effectivement, c’est une prise de risques parce que les œuvres que l’on va montrer sont issues de mondes qui se rencontrent rarement. Et c’est d’ailleurs tout l’enjeu. Il y a ainsi des ateliers accessibles aux personnes en situation de handicap, valides (Brut-Box, de résonance), des œuvres sur la transsexualité ou sur les luttes LGBT, un groupe de gospel ainsi que de la musique folklorique orientale interprétée par Fattouch, un groupe composé en majorité de syriens réfugiés à Berlin.
La Mouche sur le Cuir, c’est une rencontre d’individus, authentiques et multiples. Le risque, c’est qu’un public vienne apprécier de la musique gospel et qu’il soit un peu décontenancé devant la performance de bondage qui suit. Lyon a une réputation de ville plutôt tranquille. Le challenge, c’est d’arriver à surmonter le scepticisme et à convaincre un public qui a ses petites habitudes.
On parle d’un festival à deux dimensions, une musicale et l’autre baptisée « dimension expériences », de quoi s’agit-il ?
La Sucrière est un lieu formidable que nous avons choisi pour la possibilité de créer ces deux parcours. Au rez-de-chaussée, les « dancings inaccoutumants », une partie en libre accès, faite de musiques et de performances, de bars de dons, de projections, de chill-out, de foodtrucks réunionnais et de burgers. La mezzanine est elle, consacrée à la partie « Expériences », des œuvres à vivre de 30 minutes, en groupes de 12 personnes. Nous avons invitée plusieurs disciplines : les arts numériques (Partition Libre), la musique (Playtronica), le stand-up engagé (Patricia Lippert), la performance (Kay Garnellen, Maddishakes, Chatte Chatoyante, Camille Ducellier, Fur Aphrodite), l’installation et le théâtre argentin (In Carne), la vidéo (Antoine de Bujadoux, Les froufrous de Lilith), des méthodes douces pour le corps (Lyly Enitram, Docteur Lumière et Transe-Porteur) et d’autres qui le questionnent (Divine Putain et Fur Aphrodite).
Votre festival est donc l’un des seuls festivals de musique électronique en France de cette envergure à accueillir également une programmation de performances …
Nous essayons avec La Mouche sur le Cuir de sortir des carcans de la culture cloisonnée, avec d’un côté la fête des clubs où l’on serait censé s’oublier et fuir la réalité, de l’autre la nourriture de l’esprit et des yeux. Ces séparations sont tellement réductrices et dangereuses. Nous avons souhaitez provoquer des collaborations entre les disciplines et les artistes, car les rencontres sont des richesses, des partages et des reconnaissances. Notre monde à besoin de se confronter à l’autre et sa différence, de manière bienveillante pour sortir de la peur. Notre conceptival ne fuit pas la réalité, il la confronte.
Côté scène, vous attendez près de 130 artistes avec une pluralité de musiques, comment cela se traduit-il ?
Nos artistes viennent de toute l’Europe et seront pour la plupart, des découvertes en France. Nous nous sommes partis du principe que la musique, le mouvement du corps qui l’accompagne provoque des émotions intenses et belles, qui existent aussi bien dans le hip-hop (Supa Dupa…), le jazz (Cvd…), la musique expérimentale (Caterina Barbieri…), la techno (Maxime Dangles, Lakker, Fabrizio Lapiania…) ou la house (Folamour, Nick V., FaCIL, DJ Boring). Nous avons pensé la programmation en nous disant que la sincérité d’un artiste n’a pas de genre, et qu’elle est capable d’émouvoir toutes les âmes.
Propos recueillis par Morgan Couturier
La Mouche sur le Cuir
Le samedi 29 et le dimanche 30 avril à La Sucrière, 9-50 Quai Rambaud (Lyon 2e). Plus d’information sur la page Facebook La Mouche sur le Cuir ou sur https://lamouchesurlecuir.wixsite.com/mouche/copie-de-obtenir-un-billet
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