Texte : Morgan Couturier – À 32 ans, Amaury Jimenez vit pleinement sa carrière de fromager de l’autre côté des Alpes. Arrivé dans le Piémont fin 2019, l’ancien protégé de Patrick Sourbès à Sainte-Foy-lès-Lyon, dirige une charmante échoppe, où il écoule ses fromages… français.
Sous les voûtes de sa boutique, perchée sur la via Bogino, nombreux sont les passants à s’arrêter, alléchés par l’odeur. Le porche franchi, ces derniers lui tiennent d’ailleurs tous à peu près ce langage : « Et bonjour Monsieur, que vos fromages semblent beaux » ! Flatté comme le corbeau de La Fontaine, Amaury Jimenez se prend alors, lui aussi, à les lâcher. À une différence : le consentement est sincère et le plaisir certain.
Car depuis la fromagerie portant son nom, l’artisan-fromager se délecte de ces rencontres. Sa force ? Écouler au pays du parmesan et de la burrata, les fromages de nos contrées. Un patrimoine séduisant, qu’il convient toutefois d’expliquer, la réputation de ces produits se heurtant souvent à la méconnaissance de leurs saveurs.
Qu’importe, dans les rayons, le Saint-Nectaire, le Reblochon, le Comté, le Roquefort ou la Tomme de Savoie, apparaissent comme de précieuses gourmandises. Pour les Turinois, mais aussi pour quelques expatriés français, friands notamment, des immanquables raclettes. Amaury Jimenez se prend à ce jeu, visant à honorer des visites incessantes. « Je voulais recréer une fromagerie française et ça plaît énormément », expose-t-il fièrement, quatre ans après avoir trouvé cette belle vitrine, où s’exposent en parallèle, des terrines de Brindas, de la confiture de Chaponost et quelques bouteilles de nos régions.
Une vocation née sur le tard
« J’ai eu de la chance », soutient-il, sa quête de local rimant avec les débuts de la pandémie Covid-19. Amaury Jimenez sut en profiter. Alors que sa compagne, Italienne, et son activité professionnelle l’ont poussé à découvrir de nouvelles terres, le Rhodanien mit néanmoins la main sur une boutique à son goût, le parquet et l’ambiance boisée de cette dernière, répondant à ses critères. « Mon projet initial était de proposer du vin et des fromages à des comités d’entreprise », expose toutefois l’intéressé, Turin s’appuyant sur de nombreux événements autour de la gastronomie.
Depuis, ses plans ont évolué. Avec succès. Une habitude chez ce trentenaire, d’abord orienté vers les bancs de l’école de management de l’IAE. « J’en ai eu marre. J’ai toujours été passionné de nourriture. Alors un jour, pour rire, j’ai envoyé un CV à la fromagerie Sourbès. Le lendemain, Patrick Sourbès me contactait. Résultat, le 1er septembre 2016, je commençais mon CQP (certificat de qualification professionnelle, ndlr) », raconte-t-il. Une vocation lactée venait d’être enfantée, que Turin ne pouvait enfouir. Mieux, la capitale piémontaise lui a permis de s’émanciper. Sachant la morale de l’histoire, l’intéressé n’en fait pas tout… un fromage. Ses clients servis sur un plateau, le fromager aurait tort de s’enflammer. La leçon est retenue !
0 commentaires