Texte : Morgan Couturier – Libérée des contraintes du Covid, Air France retrouve progressivement ses standards habituels. Une bonne nouvelle pour la compagnie tricolore, laquelle s’apprête à célébrer en 2023, ses 90 ans d’existence entre Rhône et Saône. Une date anniversaire honorée en compagnie du directeur régional des ventes Auvergne-Rhône-Alpes, Stéphane Lamarrigue, dont le profil avenant colle idéalement avec les ambitions de la marque.
Vous avez pris vos fonctions en septembre 2021 en sortie de pandémie. Quel fut l’impact du Covid sur les activités d’Air France ?
SL : Le Covid nous a quasiment mis à l’arrêt. Mais nous préférons ne pas nous appesantir sur le passé et plutôt nous tourner vers l’avenir. Depuis le début de l’année 2022, nous observons une reprise très forte de nos activités, nous ramenant à une activité proche de 2019, notre année de référence. Alors, oui, ce furent deux années difficiles, mais durant lesquelles nous sommes restés actifs, notamment avec les opérations de rapatriement de nos compatriotes à l’étranger, de transport de masques, de vaccins et de soignants.
S’est-on inquiété d’un possible changement des mœurs et de nouvelles habitudes touristiques de vos clients ?
Bien sûr ! La reprise de l’activité a toujours été associée à des interrogations. Nous étions tributaires des réouvertures de frontières donc, au fur et à mesure que les possibilités de voyager réapparaissaient et que les contraintes sanitaires étaient modifiées, nous devions faire preuve d’agilité. Notre objectif : être capable de remettre le bon avion au bon horaire et au bon endroit. J’ajouterai que, malgré la crise nous avons maintenu nos investissements, notamment en termes de renouvellement de la flotte. Cette crise a renforcé notre capacité d’adaptation et de réactivité.
Fallait-il revoir ses habitudes par rapport à ce qui se faisait par le passé ?
Complètement. Pendant un moment, le nombre de passagers a diminué, alors il a fallu que l’on modifie notre niveau d’activité en conséquence tout en maintenant une approche volontariste, en offrant plus de sièges et de destinations que nos concurrents. Cette stratégie a permis de renforcer notre positionnement.
Les clients avaient-ils eux-mêmes changé leur façon de faire ?
La période Covid a eu pour effet de faire naître de nouvelles exigences de la part des voyageurs. A titre d’exemple, on a vu que nos clients n’anticipaient plus leur réservation voire ne réservaient qu’au dernier moment. Pourtant, on sait que dans l’aérien la règle qui prévaut, c’est l’anticipation pour accéder aux tarifs les plus intéressants. Depuis janvier, on constate que les clients retrouvent leurs anciens reflexes. Nous ne sommes pas encore revenus au niveau de 2019, mais nous nous en rapprochons.
Air France a-t-il retrouvé les fréquentations qui étaient les siennes ? Ont-elles augmenté ?
Pour schématiser, nous travaillons sur deux saisons annuelles : la saison été (d’avril à octobre) et la saison hiver (de novembre à fin mars). Dès l’été dernier, nous étions quasiment à 90% de nos capacités. Pour cet hiver, nous étions autour de 90-95%. Pour l’été 2023, nous devrions retrouver le niveau d’activité qui était le nôtre en 2019.
« À Lyon, ce que l’on fait, c’est augmenter l’alimentation
du hub Charles de Gaulle pour permettre aux clients qui veulent aller loin de pouvoir le faire »
Les destinations ont-elles évolué ?
Tout à fait. Nous avons dû nous adapter aux réouvertures des frontières. Avec une offre importante sur l’Amérique du Nord, nous avons également beaucoup investi sur l’Afrique. À l’inverse, l’Asie aujourd’hui, est bien entendu en retard du fait, des réouvertures tardives des frontières sur la Chine. Mais au global, nous sommes au niveau d’activités de 2019.
Combien de passagers enregistrez- vous au départ de Lyon ?
À l’aéroport de Lyon, au sein du Groupe Air France-KLM (Air France, KLM et Transavia, ndlr), nous avons transporté 2,6 millions de clients en 2022. Nous sommes très contents de notre performance.
L’Aéroport Saint-Exupéry est en pleine rénovation de son terminal 2. Doit-
on s’attendre à une amélioration des prestations fournies par Air France ? Aujourd’hui, nous ne sommes pas encore en mesure de donner une réponse claire car la feuille de route est à écrire mais, comme je vous le disais c’est un point sur lequel nous travaillons en étroite collaboration. Nous sommes confiants sur le fait que nous saurons proposer une expérience client de qualité lors de notre retour au terminal 2.
Ce nouvel équipement peut-il booster la fréquence de vos vols ?
Notre offre, nous la calibrons en fonction des habitudes de consommation et de la demande. L’infrastructure en tant que telle, peut aider à fournir un parcours plus agréable, mais le vrai déterminant, c’est vraiment ce que souhaitent nos clients.
Sur ce point, quelles sont les destinations préférées de vos clients ?
Si on regarde l’offre Air France-KLM, lié au programme que nous proposons, les destinations qui ressortent en premier sont celles de Paris et d’Amsterdam. Ces deux routes sont particulièrement fréquentées, parce qu’elles représentent nos plateformes de correspondance vers les vols long-courriers. C’est notamment le cas pour l’aéroport Roissy- Charles de Gaulle (avec notamment 100 vols directs vers les USA). Pour Amsterdam, c’est différent, puisque la moitié des passagers prend l’avion pour aller à Amsterdam, l’autre pour profiter de nos connexions vers le reste du monde. Pour les vols intra-France, les destinations phares sont Bordeaux, Toulouse et Nantes.
« D’ici 2030, notre ambition est de réduire de 30% nos émissions de co2 par passager- kilomètre »
Combien proposez-vous de destinations au départ de Lyon ?
Nous proposons 14 destinations avec Air France, 1 avec KLM et 28 avec Transavia.
La modernisation de l’aéroport Saint-Exupéry peut-elle permettre le développement de nouvelles lignes ?
À l’heure actuelle, je n’ai pas de nouvelles destinations à annoncer. En revanche, nous augmentons les fréquences vers Paris et Amsterdam. On augmente ainsi les opportunités de correspondances. À l’inverse, Air France, au départ de Charles de Gaulle, a ouvert récemment des vols vers Ottawa ou Dar es Salam (la capitale de la Tanzanie). À Lyon, notre volonté est d’augmenter l’alimentation du hub Paris-Charles de Gaulle pour offrir à nos clients lyonnais un accès à l’ensemble de notre réseau dans le monde.
Peut-on imaginer la mise en place de vols long-courriers ?
Nous évaluons en permanence les nouvelles opportunités. Ce qui est certain aujourd’hui, c’est que la région de Lyon est le deuxième bassin en France, en termes d’attractivité. Cela fait donc partie des choses que nous étudions. Maintenant, dire si nous allons le faire et quand, je ne peux rien graver dans le marbre. Néanmoins, tout cela fait partie des points sur lesquels on se penche régulièrement.
Pourquoi est-ce impossible à l’heure actuelle ?
L’explication première tient aux contraintes de flotte. Il faut avoir les avions disponibles puis, être sûr d’avoir une équation économique qui soit solide. Si on ouvre une ligne il faut que ce soit de manière pérenne.
Un mot d’écologie. Prendre l’avion est-il mal vu en 2023 ?
Notre tout premier chantier c’est celui de la responsabilité. Elle s’exerce à tous les niveaux afin d’apporter les solutions crédibles par rapport à notre empreinte carbone. Aujourd’hui, l’aviation, c’est 2,5% des émissions de CO2. On pourrait dire que ce n’est « que » 2,5%… Pour autant, si on ne fait rien, à l’horizon 2050, cela pèsera 20% de ces émissions. Il y a donc un vrai défi à relever et nous avons déjà bien avancé. Le gros de nos émissions, on sait déjà d’où il provient, à savoir la combustion du carburant. Air France met en place des actions concrètes en matière de décarbonation depuis de nombreuses années. D’ici 2030, notre ambition est de réduire de 30% nos émissions de CO2 par passager-kilomètre.
Comment allez-vous procéder ?
La stratégie d’Ar France, baptisée Air France ACT, a été lancée en avril 2022. Le programme est composé de trois axes : le renouvellement de notre flotte, un investissement lancé depuis 3 ans. Un avion de nouvelle génération permet une diminution immédiate de nos émissions de C02 de -15 à -25%. S’ajoute à cela, l’utilisation accrue des carburants d’aviation durables (Sustainable Aviation Fuel, SAF) qui permettent de réduire jusqu’à 80% les émissions de gaz à effet de serre tout au long de leur cycle de vie et enfin l’éco- pilotage. Au-delà de ces actions majeures, Air France soutient toutes les initiatives au sol comme à bord, pour accélérer sa transition environnementale. J’ajouterais qu’il ne faut pas oublier que nous sommes également là pour connecter les hommes entre eux, les cultures entre elles, donc finalement, avoir un impact social positif.
Peut-on imaginer un avenir avec des avions Air France 0 émission ?
Nous travaillons avec Airbus et les autres constructeurs pour trouver le plus de solutions possibles et ainsi réduire les émissions. Nous sommes constamment à la recherche d’innovation et de manière de réduire nos émissions de CO2..
Voir apparaître des avions électriques dans notre ciel est-il imaginable ?
Ça fait partie des projets dont nous entendons parler. Après, savoir à quel horizon ce sera, c’est difficile de s’engager. D’autant que nous ne sommes pas les uniques décideurs sur cette thématique-là.
Lyon est la capitale de la gastronomie. Sur ce point, Air France semble très attaché à la qualité de ses mets ?
Exactement ! Dans Air France, il y a le mot France, une terre de gastronomie. C’est un point extrêmement important pour nous. On a mis Lyon à l’honneur sur ce sujet, encore récemment dans la cadre du Sirha 2023, où l’on a dévoilé le nom des 17 chefs étoilés qui vont signer les plats de nos cabines business et La Première dans les mois à venir. Régulièrement, ces talents gastronomiques feront des créations à bord de nos avions. Parmi eux, nous avons deux chefs régionaux, Anne-Sophie Pic et Régis Marcon. Par le passé, Mathieu Viannay a également signé des plats pour nous. Ce qui montre que la gastronomie est importante pour nous, les chefs étoilés aussi.
Comment garantir cette qualité ?
Avec Servair, leader de la restauration aérienne, nous accordons une grande importance au choix des produits, ceci fait aussi partie de notre démarche en faveur du développement durable. Air France s’engage à proposer sur l’ensemble de ses vols et salons au départ de Paris des viandes, volailles, produits laitiers et œufs 100% d’origine française sans oublier des poissons issus de la pêche durable. Nous offrons également une offre végétarienne et les plats chauds sont systématiquement labélisés Nutri-Score A ou B dans nos cabines. Enfin, nos menus enfants et bébés sont élaborés qu’avec des produits issus de l’agriculture biologique.
Laisser penser qu’Air France pourrait lancer du long courrier à Lyon est une aberration. Air France KLM a une stratégie bien établie et rationnelle d’avoir 2 hubs long courrier, à Roissy et Amsterdam, le groupe n’a aucun intérêt à compliquer sa structure de flotte / bases équipages pour une ou deux lignes opportunistes à Lyon. Si Lyon veut chercher du long courrier il faut aller parler à des compagnies basées à la destination, un grand hub d’une compagnie américaine ou asiatique par exemple, il ne faut pas demander à Air France de prendre une décision complètement irrationnelle économiquement…