Mario
Gurrieri : « A Cannes, je n'ai tiré que des photos !
»
De
notre correspondante Alexia
Photos
Jean-Luc Mege et Nicolas Winckler
Deauville,
Cannes, Roland Garros ou encore les soirées mondaines lyonnaises sont
quelques-uns des terrains de chasse de Mario. Ami des stars et photographe
de renommée mondiale Mario est une exception dans la profession. Sa
morale, son honnêteté et son côté latin lui confèrent ce petit plus
qui le distingue.
Portrait d'un photographe sage comme une image.
Originaire
de Bizerte (Tunisie), Mario a commencé la photo à l'âge de 13 ans
dans la rue et sur les plages tunisiennes plutôt que d'aller à l'école.
Il n'a jamais pris un cours de photographie car pour lui: « Les
cours de photos c'était la
rue. ». Puis en 1956, à l'indépendance de la Tunisie, il débarque
avec toute sa famille à Marseille mais n'abandonne pas pour autant son
objectif. Il ne tarde pas à
photographier ses premières stars puisqu'en 1958 il rencontre Johnny
Hallyday en concert en terre phocéenne.
Puis
tout s'enchaîne très vite... la même année il répond à une annonce
pour être photographe au Festival de Cannes. Célibataire, jeune, beau et
déjà très pro, il se lance dans l'aventure cannoise. Il côtoie les
plus grandes stars (Romy Schneider, Fellini, Mastroianni...)
et fait la fête. « C'était
la grande époque. Il y avait peu de photographes et le Festival était
sensationnel. Moi, j'adore Cannes. Je dis toujours que je ne veux plus y
aller mais j'y retourne quand même parce que c'est sensationnel. »
L'année
suivante il rencontre au cours de la foire de Roanne, où il faisait des
photos, celle qui deviendra sa femme. Cependant, de 1960 à 1972 Mario
n'ira pas à Cannes, c'est sa période blanche. Et si Mario reste mystérieux
sur les raisons de son absence on peut se douter que sa jeune femme
craignait sans doute les sirènes et starlettes cannoises ? Mais
depuis Mario a trouvé la parade puisque depuis 1973 son épouse
l'accompagne et peut ainsi « surveiller » son mari.
A
Cannes, Mario se sent comme chez lui : « Je
fais ce que je veux. Je connais tout le monde et ils savent que je mets de
l'ambiance. Pour les photo call, j'anime et je chante en
italien." Et les stars le lui rendent bien. Chaque année elles
le reconnaissent et ne jurent que par son objectif.
Car
Mario n'est pas seulement un bon photographe, il est aussi un homme de
confiance, qualité rare dans la profession. En 50 ans de métier il n'a
jamais failli à sa ligne de conduite: « Je
suis contre les photographes paparazzi. Moi je demande toujours
l'autorisation pour prendre des photos. On a pas le droit à l'image,
l'image ça appartient à la vedette ! ».
Le Cannes sulfureux, il ne connaît pas. Car jamais, au grand
jamais, il ne se serait adonné aux photos volées : « Quand
je vois que c'est pas bon, que je ne peux pas faire de photos, je préfère
rentrer chez moi et regarder la télé ou être avec mes copains. »
C'est
pourquoi il a réussi à faire des clichés inédits comme ceux de Michaël
Jackson lors du 50ème Festival de Cannes. C'est son
producteur en personne qui a invité Mario dans la salle pour le
photographier. Des photos vendues dans le monde entier par la suite.
Certes,
Mario aurait pu faire fortune en paparazzo mais c'est un homme simple
pour qui l'argent n'est pas une finalité.
«Photographe, c'est un métier de clochard. Moi je préfère habiter
chez moi dans un HLM avec ma famille. » Travail, famille,
photos... telle pourrait être sa devise. Il mène une vie de photographe
quasi « monacale ». Lorsque ce n'est pas son appareil
qu'il porte dans ses bras, c'est sa magnifique petite-fille qui prend
le relais, le transformant en papi gâteau. D'ailleurs il n'a cessé
de me répéter pendant l'interview : « Je
ne bois pas, je ne fume pas, je fais bien mon travail et j'aime ma femme ! ».
Tout un programme.
Contrairement
à beaucoup d'autres il ne profite pas
des avantages que lui confèrent le métier. Il garde bien
soigneusement dans son agenda les adresses personnelles de Robert de
Niro ou Sharon Stone mais n'osera jamais s'inviter chez eux
par morale et conscience professionnelle. Il sait garder ses distances.
Si
l'on surnomme Mario « L'ami des stars » c'est
parce qu'elles lui font confiance. L'exemple le plus criant de son
amour et de son infime respect pour ceux qu'il photographie est sans
doute celui de la mort de Claude François. Il était présent pour
ses funérailles mais pas en tant que photographe... en tant qu'ami.
Mais
Mario est un homme de caractère, sans doute son côté sicilien. En
effet, en 1983 avec deux autres de ses copains photographes il a été
l'instigateur de la grève des photographes dirigée contre Isabelle
Adjani venue présenter « L'été Meurtrier » au
Festival de Cannes. Son absence à la conférence de presse puis au photo
call avait déclenché la colère des photographes qui, pour lui rendre la
pareille, n'ont pris aucune photos de la belle lors de sa montée des
marches.
« On
est des photographes, pas des chiens. Les vedettes doivent jouer le jeu de
la médiatisation. » acquiesce
Mario, fier de son action.
Enfin
quant on évoque l'éventualité de sa retraite et de sa succession il
bafouille, hésite et dit qu'il verra, ne sait pas... Le Tina Turner de
la photo a encore de belles années devant lui. Si un soir au détour
d'une soirée vous entendez chanter en italien les tubesques « O
Sole Mio », « Volare » ou « Come Prima »
alors « sourissez » et vous serez photographié !
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