Pierre-Yves Gas :
un pâtissier dans le ciné !
Le bon sens de Paul Dini et la tignasse de Tom Sawyer, tel
est Pierre-Yves Gas. Ne vous fiez pas à ses airs de gros chat
endormi. A 33 ans, l'éditeur de Ciné Clin d'il a plus d'un tour dans son
sac !
Il est à l'heure pour notre entretien sous les frondaisons du Théodore
à l'heure de l'apéro. Entre deux mignardises, les cheveux en vrac et l'il
en coin, il se prête amusé à mes préliminaires taquins. Avant d'enchaîner
presto sur les choses sérieuses : il a un message à faire passer et
n'entend pas partir en vrille. Pas aujourd'hui, en tous cas. Car sous des
airs de dilettante, Pierre-Yves Gas carbure à 200km/h. Il en a même
perdu 20 kg en 4 mois ! « Je suis redevenu un bon coup ! »
s'amuse-t-il. Par correction, je n'ai pas osé demander confirmation à
madame Caroline ! Il aurait fallu que j'aille enquêter à Craponne
(le bout du monde !), fief de la famille Gas. Blanchisserie, automate,
magasin de jouets, vidéo club... ils ont fait main basse sur tous les
commerces de la commune !
C'est là que le jeune PYG (sorry pour cette contraction facile...) va
grandir dans la buée des lessiveuses. De la vapeur sur ses lorgnettes et
un cerveau en ébullition : Pierre-Yves rêve de devenir footballeur pro.
Après un passage éclair chez les Lazaristes, il intègre une section
« sport études » en foot. Le jour, il essuie ses crampons sur les mollets
de ses adversaires, la nuit il pétrit la patte feuilletée chez le
pâtissier du bled. Car ses parents - fort prévoyants - ont bien
l'intention de lui faire apprendre un vrai métier. Grand bien leur fait :
une rupture du ligament croisé et les rêves de gloire s'envolent.
Pierre-Yves envoie alors tout valser : football et pâtisserie finissent à
la poubelle.
Atavisme familial ou pas, entre-temps, PYG qui s'est découvert une passion
pour le commerce intègre un BTS Action Co. L'occasion d'étrenner ses
mocassins à pompons sur le parquet de Pithiot. Ses compagnons du moment :
les radiateurs du cours privé et Nicolas Tedesco. Une vie
d'étudiant plus rythmée par les folles soirées à l'Actuel, au
Kings Car Club ou au Quartier Latin que par la rigueur
scolaire. A sa décharge, il faut bien avouer qu'il a la tentation facile
avec une belle équipe de fêtards composée de Philippe Kittel,
Arnaud Thomas, Franck Salagnat et Serge Gradent. Après
avoir laissé son argent de poche dans tous les tiroirs caisses de la
ville, il décide de s'installer à son compte en reprenant « Le
Gallery's » rebaptisé « La Bodega » avec Benoît Terrade
et Yves Chaponic pour associés. Patron de bar la nuit, étudiant le
jour, il parvient à décrocher un stage chez Gaumont Buena Vista
International et participe au lancement du multiplexe Pathé rue de la
République. Une expérience réussie qui amène le distributeur à l'envoyer
sur un nouveau front : le multiplexe de Nantes. Il revend alors sa boite
et s'échoue sur les plages de l'Atlantique. Il y restera trois ans.
De retour d'exil en 1999, PYG a déjà dans sa besace le projet « Ciné Clin
d'il ». L'idée est d'éditer un programme de ciné hebdomadaire en format
de poche distribué chez des partenaires sélectionnés. Parmi les premiers à
croire en son concept : Eric Barrier (Mac Do), François Gindre
(LPA), Jean-Christophe Chabret (TCL), Philippe Jocteur (Banette)
qui vont constituer les premiers maillons d'un réseau qui diffuse son
hebdo à 25 000 exemplaires. Condition sine qua non pour s'imposer : le
partenariat avec les pointures du cinéma. Et ça tombe bien Joël Luraine
(Pathé) et Patrick Gabet (UGC) sont sur la même longueur d'onde.
Le succès lyonnais amène PYG à partir à la conquête d'autres
agglomérations : Grenoble et Bordeaux en 2000, Toulouse, Montpellier,
Marseille et Nice en 2001. Parallèlement, un petit frère consacré aux
manifestations sportives voit le jour en avril 2003. Les titres ciné et
sport ont depuis fusionné. A l'heure où nous bouclons, PYG est
particulièrement stressé : Nantes, Rennes et Strasbourg sont sur la rampe
de lancement. Trois villes qui vont lui permettre de boucler son tour de
table hexagonal, schéma indispensable pour intéresser les annonceurs
nationaux. Paris viendra couronner le tout en 2004. Un maillage à la Paul
Dini, le fondateur de la Comareg, qui entre 1968 et 2000 a essaimé
les petits frères du 69 aux quatre coins de la France.
Proxicom, sa SARL devrait atteindre 450 000 euros (3MF) de CA fin
2003. Un beau pactole pour ce passionné de ciné qui vit désormais (plutôt
bien) de sa passion. Une réussite économique doublée d'une reconnaissance
de ses pairs (sans doute le plus important à ses yeux). Désormais adopté
par le monde du cinéma, Ciné Clin d'il joue les petits poucet à
Cannes comme à l'Alpe d'Huez en tant que partenaire officiel. Qu'on se le
dise !
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