Photos © Fabrice Schiff
Par Benjamin Solly
Patatras. Alors que l’accord de 1er tour entre l’UMP et l’UDI en vue des municipales de mars semblait scellé, Michel Havard annonce par voie de communiqué, mardi 3 septembre 2013, la fin des négociations avec les centristes.
« L’UDI ne donne pas suite à ma proposition de rassemblement. » L’intitulé du communiqué est factuel et policé. A la lyonnaise. La formule a même des allures de litote. « Va UDI, je ne te hais point. » Et pourtant, pendant trois mois, la droite lyonnaise avait les yeux de Chimène pour le parti de Jean-Louis Borloo. Faire l’union. Une attitude parfois difficilement compréhensible pour les observateurs de la vie politique locale, tant l’armée mexicaine des centristes lyonnais parait disparate. Et surtout créditée de seulement 2% d’intentions de vote dans un sondage réalisé fin août par l’Ifop. Alors qui de Geourjon ou Broliquier porte les galons de général de l’UDI à Lyon ? Visiblement Michel Mercier, patron des centristes du Rhône, qui a emmené à la table des négociations son sens aigu du contrepied. « L’UDI n’a pas interrompu les négociations. Il y a encore des discussions (…) Mais si M. Havard souhaite les interrompre, c’est son choix », a-t-il affirmé mercredi à l’AFP. « La chattemite », comme le dénommait son ami le conseiller général Jean-Jacques Pignard dans son discours d’hommage à l’ancien président du Département, a-t-il fait parler son intransigeance feutrée ? « C’est vrai qu’avec Mercier à la table des négociations, cela devient plus serré », confesse un cadre de l’UDI.
Réuni en comité exécutif mardi, le bureau de l’UDI a donc fermé la porte un accord en l’état avec l’UMP. Pourtant, l’entente semblait conclue depuis de longues semaines. A telle enseigne que Michel Havard et Christophe Geourjon devaient faire meeting commun le 26 novembre dernier pour sceller l’union. « Aucune salle à Lyon n’était alors disponible », expliquent les proches du candidat UMP. L’affront logistique aurait du être lavé le 2 décembre. Nenni ! A la place, l’UDI a reçu par voie de presse l’ultimatum de Michel Havard. De l’avis unanime des membres de l’UDI que Lyon People a pu joindre, cette dernière manœuvre a achevé de crisper les négociations. « Nous étions pourtant à deux doigts d’aboutir et cette communication a tout cassé », glisse un lieutenant de Broliquier. De son côté, Michel Havard avait déjà bien assez soupé des atermoiements pour ne pas rappeler aux centristes lyonnais, fut-il par voie de presse, qu’il fallait désormais passer la seconde et faire campagne commune. Il avait d’ailleurs prévenu lundi Christophe Geourjon de cette sortie médiatique. « Je ne lui donne pas tort, explique Geourjon. Le temps de la décision est arrivé. » Repoussé sine die ! « C’est en interne, à l’UDI, qu’ils n’ont pas su se mettre d’accord », confiait mardi soir Emmanuel Hamelin. La corbeille de la mariée avait pourtant été dûment dotée par Havard : 1/3 des places sur les listes et trois têtes de listes d’arrondissements (2e, 7e, 9e). Les Divers Droite avaient même obtenu de l’UDI un partage à 50/50 du contingent de places réservées sur les listes, quand Denis Broliquier souhaitait deux conseillers d’arrondissement de plus sur le 2e.
Philippe Cochet sort la sulfateuse
« Cet accord n’était pas infamant, il n’était simplement pas abouti », glisse un membre du bureau de l’UDI. Goutte d’eau qui a fait déborder le vase centriste, l’ultimatum a cristallisé certains contentieux entre les deux alliés. « A dix kilomètres de Lyon, l’UMP nous envoie des candidats au premier tour face au maire sortant UDI. Forcément, ça n’aide pas à réchauffer l’ambiance. » D’aucuns voient dans ce déplacement de l’enjeu municipal à l’échelle communautaire la marque du sénateur-maire de Lyon. « Vous croyez ? Oh non… », nous confiait mercredi matin un Collomb plus retors que jamais. « Mercier fait le jeu de Collomb pour la Métropole qui en échange lui laisse les coudées franches sur les reste du Département », rapporte-t-on chez Havard. D’autant que l’ancien député de Fourvière a posé une condition au ralliement qui n’est pas anodine, celle de soutenir le candidat de la droite et du centre au Grand Lyon. Quand on sait que nombre de maires UDI, dont la plupart sont réunis dans le groupe Synergie, soutiennent Gérard Collomb, l’équation centriste se complique. Une personnalité cristallise ainsi la rancœur de la droite dans l’échec des négociations. Pierre Jamet, l’ancien DGS et directeur de cabinet de Michel Mercier au conseil général du Rhône, « a tenu à Lyon des réunions en sous-main pour flinguer le projet », selon le camp d’Havard.
« Nous parlons de quelqu’un qui œuvrait au conseil général et qui œuvre aujourd’hui au nom de la République qui le rétribue (Pierre Jamet est conseiller maître à la Cour des comptes – NDLR). Va-t-on continuer à trimballer des gens qui sont la cause de l’échec de la droite à Lyon depuis plus de dix ans ? », s’interroge mercredi à l’autre bout du fil Philippe Cochet. Maniant la carotte et le bâton, le président de l’UMP du Rhône assure que cet épisode « impactera d’autres échéances électorales à venir » mais laisse entendre que « toute initiative allant dans le bon sens sera prise en compte. » Comprendre que la porte reste ouverte, mais que la négociation sera plus serrée pour rejoindre les listes d’Havard. « Il n’y a eu aucune rupture entre Michel et moi et je prendrai mes responsabilités », promet Geourjon, qui à trop vouloir ménager la chèvre et le chou se retrouve aujourd’hui dans une position inconfortable. Le centriste tient toutefois à préserver son patron. « Le cerveau de Pierre Jamet et celui de Michel Mercier sont clairement dissociés. Ce que fait l’un n’engage pas l’autre, et Michel Mercier a été le premier surpris de la décision du bureau de l’UDI. » D’autant que lors du comité exécutif de l’UDI, Michel Mercier n’a pas voté contre l’accord, il s’est abstenu. Dès lors, comment interpréter l’intercession vraisemblablement contre-productive de Jamet, si cette dernière n’est pas téléguidée par Mercier ? « Une façon de faire de la politique qui est révolue et qui ne convient pas à notre génération », clôt Geourjon.
Le cas Bouzerda : « Ce genre d’attitude fait monter le FN », selon Geourjon
Le ralliement de l’élue Modem Fouziya Bouzerda à Gérard Collomb est également une couleuvre bien indigeste pour l’UDI. « Je trouve gonflé de la part de Fouziya d’avoir créé des tensions lors des négociations avec l’UMP alors qu’elle savait sans doute déjà à cette époque qu’elle rejoindrait les listes du maire sortant », rappelle Geourjon. Bouzerda s’était vu proposer la tête de liste du 9e arrondissement qu’elle a refusé. « C’est ce genre d’attitude qui fait monter le FN », embraye le centriste, finalement plus désappointé que courroucé. En attendant, l’horloge tourne. Les municipales sont dans trois mois et la machine se grippe. Forcément, ces échecs successifs présentés en cinémascope dans les médias lyonnais régalent le landerneau. Ou le désolent. « Depuis des semaines, Michel Havard s’enorgueillit de présenter une candidature de rassemblement de la droite et du centre à Lyon. On allait voir ce qu’on allait voir, nous disait-on ! Finalement ce n’est pas le rassemblement derrière Michel Havard qui a triomphé mais la désunion », note le candidat FN à Lyon, Christophe Boudot. Du côté d’Havard, on veut croire que l’épisode ne sera qu’un aléa de campagne, et que les listes pourront être présentées le 9 décembre prochain. En attendant, Gérard Collomb jubile. Une chance, Lyon People l’avait sous la main mercredi matin. « Ah bon, il n’y a pas de listes communes ? Je pensais pourtant que c’était le grand départ en campagne de la droite… » Pour l’instant, il s’agit plutôt d’un faux-départ.
Après avoir positionné pour les prochaines élections municipales des candidats UMP face aux sortants UDI du Grand Lyon, il ne faut pas s’étonner des relations les plus froides et de blocages avec ce parti.
Une stratégie pas vraiment gagnante pour le président de l’UMP Philippe Cochet qui rêve encore de la présidence du Grand Lyon…au fait qu’est devenue son association « l’autre métropole » lancée en 2010 ? Au fond de la saône ?