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/ LES INTERROGATOIRES à KGB 


 

 

Six ans plus tard, le même Michel Mercier vous embrasse au Palais des Sports lors du meeting de François Bayrou... Vous n'avez pas l'impression qu'on vous manipule ?

Évidemment, je m'appelle Azouz Begag... Je ne peux pas être un homme libre et autonome, si je fais quelque chose c'est que je suis manipulé... Vous êtes mal informé ! C'est moi qui suis parti de cette confusion de la droite car je sentais que ça n'allait pas, je sentais que ce n'était pas sérieux.

 

À l'époque, il y a une liste UDF, une liste UMP et une liste milloniste. Ne refaites pas l'histoire... C'était bien cloisonné, on n'était pas encore au deuxième tour.

On avait déjà l'impression que Charles Millon allait faire la différence et que c'était déjà perdu. Je suis désolé, mais personne ne m'a viré, c'est moi qui suis parti. J'ai toujours été un homme libre, quand je décide un mois avant la fin de ma mission gouvernementale de publier mon livre, dans lequel je raconte un des traits de visage de Monsieur Sarkozy, c'est un homme libre qui le fait. Quand je décide de rejoindre Monsieur Bayrou, c'est moi qui le fais ! Quand je décide en novembre 2005 de m'opposer dans les médias à la sémantique guerrière du ministre de l'Intérieur, c'est moi qui le fais ! Vous pouvez imaginer un instant que les individus comme moi peuvent être libres et décider seuls de leur avenir sans être manipulés ?

 

Il faut dire qu'entre temps, vous avez été nommé en juin 2005 ministre chargé de la Promotion de l'égalité des chances. Quand vous leur annoncez la nouvelle, vos proches pensent que c'est encore l'une de vos blagues !

La veille je ne savais pas... J'ai été nommé officiellement le 3 juin 2005. La veille des bruits m'étaient parvenus aux oreilles sur la composition du gouvernement et qui indiquaient que j'avais de fortes chances d'en faire partie. J'avais une grande admiration (que j'ai toujours) pour Monsieur de Villepin que je connais comme un homme intuitif. Je m'étais préparé à cette idée... Je l'avais dit à personne sauf à Christian Delorme : «Si demain on me propose d'être ministre qu'est-ce que je fais ? », et il me répond : « Il faut y aller ! ». J'avais informé mes filles aussi mais c'est tout. Je savais que j'étais face à mon destin personnel, c'est moi qui allais prendre la décision mais l'unanimité était faite chez mes amis. Et à 16h40, le jeudi 3 juin 2005, le directeur de cabinet du Premier ministre m'appelle et me dit « Azouz, je te passe le Premier ministre», et là Villepin me dit : « Azouz, j'ai décidé de te nommer ministre délégué de l'égalité des chances. Rendez-vous demain matin à 9 h ».

 

Qu'est ce qu'on ressent à ce moment-là ?

J'avais anticipé la veille, j'avais évacué. Mes premières pensées ont été pour mon père et pour tous les prolos, pour la France qui est en bas et qui essaye de donner à ses enfants un peu d'espoir pour monter un jour dans l'ascenseur social. Je trouvais que cet ascenseur qui partait du bidonville de la Feyssine jusqu'à Matignon, c'était beau...

 

L'état de grâce durera une saison d'été avant l'automne 2005. Avez-vous eu le sentiment d'être l'Arabe de service du gouvernement Villepin ?
Pas du tout ! Mais je me rends compte tout d'un coup que si on veut exister en politique dans un gouvernement, il faut affirmer sa personnalité, qui on est, il faut prendre des risques et ne pas tomber dans la fosse aux ours ! En novembre 2005, quand l'autre balance ses « karchers », ses « racailles », tout le monde me dit : « Begag, qu'est ce que tu en penses, toi qui vient des banlieues ? ». Moi je dis : « Je suis opposé à cette sémantique guerrière, je ne peux pas accepter ». C'est à partir de ce moment-là que tous les couvercles de l'étouffement médiatique se sont ouverts. Tout le monde me considère comme un héros, comme celui qui s'est opposé à Monsieur Sarkozy, le patron de l'UMP...


 

Suite de l'interview