P E O P L E ... n e w s
/ LES GENS

25 novembre 2002

 

 Didier Rinck :
 « Je ne suis pas un enfant gâté ! »

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

LP : Vous venez de céder la Brasserie Georges. Dans quel état d'esprit êtes-vous aujourd'hui ?

DR :Tout va bien, je suis un homme content heureux de transmettre une société en bonne santé avec une bonne image de marque et une bonne notoriété...

 

Quel chiffre d'affaires avez-vous réalisé sur le dernier exercice ?

6 millions d'euros (40 MF HT)

 

Vous aviez réussi l'exploit de passer aux 39h sans trop de casse. La « Georges » est donc une affaire saine socialement et économiquement.

On était à 43h et on est passé à 39, nous il y a 2 ans. On était l'un des premier dans le Rhône à faire la loi Aubry 1 et Aubry 2 en France on était le n°3. Et ça sans trop de casse donc la Georges est une affaire saine, socialement et économiquement.

 

Vos employés et clients ont appris lundi avec stupeur pour les premiers et étonnement pour les seconds que vous aviez vendu l'entreprise familiale. Que va-t-il se passer pour les premiers ?

D'après ce que me dit le repreneur Monsieur Lameloise, il compte embaucher, puisqu'il manque des postes. Donc pas de souci pour le personnel !

 

Avant la transaction, à qui appartenait précisément la Brasserie Georges ?

A des actionnaires, dont la famille Rinck : mon frère, ma mère et moi. De plus il y avait encore une quinzaine d'actionnaires aussi, des petits porteurs.

 

La décision a-t-elle été collective ?

Non, moi seul en premier et avec ma mère. (ci-contre en compagnie de ses fils NDLR)

 

Et votre frère aujourd'hui ?

Il a suivi avec difficulté mais il a suivi.

 

Aujourd'hui 98% de la SA ont été vendus à Monsieur Lameloise, donc il reste 2% de petits actionnaires qui n'ont pas souhaité...

Pour l'instant, son but c'est d'avoir le gros paquet. Ensuite il verra avec les autres.

 

Christian Lameloise pouvait donc se passer de votre frère...

Absolument !

 

Alors pourquoi votre frère a-t-il suivi ?

Il ne veut pas qu'on en parle.

 

Le microcosme lyonnais s'interroge. Personne ne comprend vos motivations. Pouvez-vous nous éclairer à ce sujet ?

Il y des milliers d'entreprises tous les jours qui se vendent, s'il fallait comprendre pourquoi... Pendant 24 ans de ma vie, je n'ai vécu que dans ma brasserie Georges à faire mes grandes fêtes, mes banquets... Je veux dire que j'ai eu une vie extraordinaire à l'intérieur de la brasserie. Je souhaite avoir une vie un peu plus calme maintenant. J'ai 47 ans, je vais peut-être changer de vie.

 

L'affaire était dans le famille depuis 1836... N'avez-vous pas l'impression d'être celui par qui le scandale arrive ?

Oui, j'avais peur de cette réaction, pendant 2 jours, j'ai reçu à peu près 80 coups de téléphone d'amis, de gens importants qui m'ont téléphoné et pas un seul m'a dit : « Pourquoi as-tu fait ça, c'est honteux, scandaleux ! » Ils m'ont tous félicité : « Bravo ! tu as eu le courage de le faire, on aimerait faire la même chose mais on ose pas franchir le pas... » C'est une décision de chef d'entreprise. J'ai toujours été un homme de décision, ça s'est vu dans d'autres choses et là c'est une décision de plus.

 

Vous avez 4 enfants de deux lits différents. Cette décision est-elle personnelle ou l'avez prise en concertation avec vos enfants ?

Non, ils ont été mis au courant le jour de la vente, pas avant. Je me suis posé plein de questions pendant deux mois. J'ai réfléchi jour et nuit ! Cela a été dur même si je ne suis pas à plaindre. Est-ce que je pourrais vivre sans ? Mes enfants qu'est ce qu'ils vont dire ? J'ai une petite fille de 10 ans, une autre de 8 ans, un fils de 17 ans et un autre de 15 ans. Est-ce que je vais attendre 10 ans ou encore 15 ans ici ? Ils ont vu ce que c'était ma vie ici. Je veux pas leur donner ça.

 

Qu'en ont-ils pensé ?

Ça ne les traumatise pas. Ce qu'ils les intéresse, c'est les Nintendo, les consoles, les CD et compagnie.

 

Vous resterez dans l'histoire familiale comme celui qui a rompu la chaîne ?

Quand mes oncles et mon père ont vendu les usines Rinck en 1970, j'avais 15 ans et mon frère 18 ans, on n'en est pas mort. Là j'ai souvenir de traumatismes. La brasserie Georges, c'est un restaurant qu'on a racheté en 1939, ce n'est donc pas pareil.

 

Vous venez de divorcer pour le seconde fois. Vos difficultés conjugales ont-elles eu des conséquences sur votre décision ?

Peut-être. J'avais l'habitude de travailler avec ma femme, elle avait l'habitude de travailler avec moi, c'est sans doute un élément important.

 

Une mésentente avec votre frère est également évoquée...

Non. On s'entend bien avec mon frère. C'est une rumeur. On mange tous les samedis ensemble à la Georges.

 

A partir de quel moment avez-vous songé à abandonner le navire ?

Pendant mes vacances. J'ai eu le temps de réfléchir tout le mois d'août, pour en parler avec ma mère et mes proches. Mais j'étais seul pour prendre la décision, il n'y avait vraiment que deux personnes qui étaient au courant, parce qu'il ne fallait en parler à personne.

 

Votre maman est la duchesse douairière de la famille Rinck. Qu'en pense-t-elle ?

Elle est contente pour moi. Parce qu'elle a vu ma vie pendant 24 ans qui était très dure. Il est nécessaire de rappeler que je suis parti de zéro ici et la maison était vraiment en mauvaise santé. Elle a vu la progression et la fatigue que j'ai accumulées pendant 24 ans. Tout juste quinze jours de vacances par an dans les dernières années.

 

Votre départ semble pour le moins précipité. Depuis toujours vous vous plaisez à incarner la continuité. Exemple l'an dernier, vous êtes à l'origine - aux côtés de Guy Augis (ci-contre NDLR) - de la création du club des entreprises lyonnaises centenaires et à l'élaboration du livre qui leur est consacré... Que s'est-il passé ?

C'est exact, une des rares questions que l'on m'a posée là-dessus. Hier, j'en ai parlé à Guy Augis. Il y a eu un changement dans ma tête et puis peut-être la peur de l'avenir, mais ce cercle de centenaire, je reste là dedans, parce que j'ai une expérience là dessus. Je suis toujours membre élu de la chambre de commerce. La brasserie Georges continue, moi, je ne suis que le 15ème patron de la brasserie.

 

Les Lyonnais ont l'impression que vous vous êtes comporté en enfant gâté qui a cassé son jouet...

Mon jouet ? et bien, j'aimerais bien avoir un jouet comme ça !

 

Christian Lameloise ne compte pas mettre les pieds dans la brasserie. Il va en être le PDG mais ça ne sera pas le directeur général. Vous auriez pu opter pour cette solution tout en préservant le patrimoine familial, en nommant un directeur général ici. Pourquoi n'avez-vous pas choisi cette option ?

Pour des raisons financières.

 

Pourtant quand on connaît les résultats de la Brasserie, on sait que c'est absorbable...

C'est vrai, mais j'ai une philosophie différente. Ou je suis sur place et je dirige tout, ou bien je pars. Quand tu es dans une maison comme ça, tu es tout le temps là. Et à ce poste là, je me voyais mal nommer quelqu'un, lui laisser le boulot et partir à la pêche.

 

Les professionnels du secteur évaluent la transaction entre 50 et 70 MF puisque vous avez vendu le fonds et les murs (un tènement de 12 000m2)... Vous en empochez la moitié. Qu'allez-vous faire de ce pactole ?

Moins les impôts sur plus value, donc il ne va pas me rester grand-chose. Ça me laisse juste de quoi vivre. Je ne vais pas faire d'écart. Je ne vais pas remplacer mes voitures : ma vieille Mercedes de 1990 et ma vieille 806 qui a 120.000 km, je vais les garder. Je vais sans doute aller plus dans les restaurant voir mes copains, un peu plus au cinéma, dans les cocktails. Mais il ne faut pas que je dérape. Parce que j'ai deux pensions alimentaires... C'est un petit pactole, mais je ne suis ni Rothschild, ni Aulas.

 

Christian Lameloise (ci-contre) est le nouveau propriétaire. Avez-vous songé à d'autres  repreneurs ou était-il seul sur le coup ?

Il était seul.

 

Vous allez redémarrer une nouvelle vie. Dans quelle direction ?

Je vais faire de la formation, je vais prendre le temps de me former. Des cours d'anglais, des cours d'informatique. Je vais suivre une formation sur l'histoire de l'Art pendant 4 ans, parce que je suis passionné par l'Art. La musée de la bière, je le laisse à la Brasserie. Par contre ma collection personnelle que j'ai constituée pendant 15 ans, je la garde. Comme ça mes enfants auront un bon souvenir.

 

Avez-vous pris soin de vous entourer d'un psychologue ? Car le contrecoup risque d'être terrible dans quelques mois...

On m'a dit dans 6 mois. En effet, j'ai actuellement une très bonne psychologue ! (rires)
 


Réagir à
cet article

 

A suivre, Philippe, le Lyonnais de Star Academy, « Emma est une vraie bimbo ! »
 

page suivante