Est-ce que les Renseignements généraux se sont servis de vos travaux ?
Mais vous croyez que lorsque les RG, la
surveillance du territoire ou quand la CIA ou le FBI, lisent mes bouquins
et font la connaissance de la France des banlieues à travers mes bouquins,
ils viennent me dire : « Monsieur Begag, je suis de la CIA, c'est génial
ton bouquin, c'est vachement intéressant, ça nous donne des indications ».
C'est une étrange question ! Tous les travaux que réalisent les chercheurs
en science humaine du CNRS une fois qu'ils sont publiés sont accessibles à
tout le monde. Aussi bien aux RG qu'aux renseignements particuliers,...
Étant donné que nous avons eu un paroxysme d'émeutes en 2005, en quoi
votre sonnette d'alarme a-t-elle marché ? On vous a payé à ne rien
faire
pendant toutes ces années ?
C'est comme si vous demandiez à un
météorologue qui n'a pas su que la pluie allait tomber demain à quoi il
sert ! C'est comme si vous demandiez aussi à vos enfants qui auront appris
l'Anglais pendant 20 ans et qui ne finalement ne parlent pas anglais, à
quoi ça sert d'aller à l'école...
Aujourd'hui 30% des élèves rentrent en 6ème sans savoir lire et
écrire ! C'est dans ce sens là que je vous disais que le modèle ne
marchait plus !
Souvent, le travail d'un chercheur est évalué en fonction de deux critères
importants surtout en sciences sociale et humaine. Le premier ce sont ses
publications : quand on fait des études, des recherches, il faut ensuite
publier et être connu en France mais aussi à l'extérieur, dans le monde.
Plus on est invité dans le monde, parce qu'on a écrit des choses, fait des
travaux, plus cela signale l'intérêt des travaux du chercheur dans le
monde entier.
Ça ne touche que le microcosme universitaire...
Oui, mais ce n'est pas plus microcosmique que Lyonpeople ! A quoi ça sert
Lyonpeople ? À rien ! Moi je suis traduit dans 13 langues ! Lyonpeople est
traduit dans combien de langues ? Si y'a quelqu'un qui sert à rien, c'est
bien vous ! (Rires)
Sociologue et écrivain, vous avez toujours été tenté par la politique.
En 2001, vous avez présenté vos offres de service à deux candidats Collomb
(PS) et Mercier (UDF)... mais aucun d'eux ne vous a pris au sérieux !
Ce n'est pas vrai ! Au moment des municipales, la seule personne qui m'ait
contacté pour pouvoir faire partie de l'équipe c'était Michel Mercier mais
il était avec Dubernard. Moi j'ai toujours été attiré par le centre car je
n'ai jamais été clivé politiquement. Dans ma tête je n'ai pas eu
d'embarras. Michel Mercier m'avait proposé une tête de liste dans le 1er
arrondissement, vous pouvez lui demander ! Comme il y avait toujours cette
ambiguïté à la fois entre Michel Mercier (UDF), Dubernard (UMP) et Charles
Millon, il y avait donc un panier de crabes à droite qui ne permettait pas
de voir un avenir intéressant pour les idées que je défendais. Quelles
étaient ces idées ? Il y a des millions d'individus qui sont en France
issus de l'immigration, vous les voyez bien dans l'équipe nationale de
football, dans le sport... Ces individus font gagner la France dans leur
diversité. Il faut les faire entrer en politique pour crédibiliser le
projet politique. Le seul moyen pour faire bouger contre la violence c'est
l'engagement en politique. Ce n'est jamais la gauche qui leur a proposé
mais la droite et en particulier Mercier à cette époque.
Dans ce cas, pourquoi n'êtes-vous pas allé sur les listes de Michel
Mercier ?
C'est à cause de la confusion qui régnait entre Mercier, Dubernard et
Millon !
Pourtant dans le milieu politique on assure que vous n'avez pas été pris
au sérieux ni par l'un ni par l'autre !
Oui bien sûr, ils ont tellement été
sérieux eux qu'ils ont donné la mairie à Gérard Collomb ! Si c'est ça être
sérieux...
Suite de l'interview
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